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Eglise Santa-Sabina à Silanus

Eglise romane Santa-Sabina ; commune de Silanus, province de Nuoro, Sardaigne, Italie

 

... [l']ensemble religieux de Sainte-Sabine, dont les origines préhistoriques sont attestées par un puits sacré à tholos et par un nuraghe à brève distance de l'église. En raison de sa facilité d'accès, le site figure sur les itinéraires touristiques et est ainsi connu de la plupart. ... Les archéologues ne se sont intéressés que tardivement à Sainte-Sabine, sans doute à cause de l'absence de points de référence dans les documents, ce qui oblige à une lecture basée sur les données stylistiques dont les conclusions n'ont qu'une valeur hypothétique. ... Un réexamen du document s'impose toutefois à propos de ce qu'en dit Delogu (1953) qui, l'assignant à la deuxième moitié du XIe siècle, soulignait le caractère tout à fait singulier de son plan, soulevant le problème «du repérage de ses origines précises et surtout de l'interprétation de son plan, très rare, qui semblait un écho de ceux du consignatorium et du vestiarium flanquant les rotondes de baptistères ». Sainte-Sabine se caractérise en effet par la greffe sur une rotonde (avec abside précédée d'un porche) de deux corps rectangulaires, eux aussi avec abside et communiquant avec cette rotonde par des portes cintrées; seul le corps de gauche est doté d'une entrée indépendante.

 

Quant à l'élévation de l'église, Delogu l'attribuait à «des équipes de formation continentale», c'est-à-dire au sens large italique, et tout en suggérant la possibilité de rapports avec le milieu ibérique, ne les considérait pas comme décisifs. L'influence hispanique s'exerce au contraire sur des détails précis, comme la mise en place particulière de chacun des arcs, tant à l'intérieur que dans le porche et le portail secondaire, ainsi que sur la fenêtre du corps septentrional. Le porche à pignon, plutôt que de garder des souvenirs de «l'esprit classique» (comme le voulait Delogu), révèle une influence d'ascendance wisigothique (San Pedro de la Nave) ; une disposition analogue des claveaux en retrait par rapport aux piédroits, et doublés de petits blocs peu épais dont le demi-cercle forme un sourcil sans saillie, se range parmi les traits du roman catalan, et se trouve particulièrement au portail Ouest de Sant Jaume de Frontanyâ. A la sensibilité ibérique se rapporte la physionomie spa­tiale résultant de l'adjonction de volumes distincts, qu'à Sainte-Sabine on peut particulièrement appré­cier en montant (par l'échelle intérieure) au sommet du nuraghe, pour observer l'église d'en haut. La rotonde est couverte d'un toit conique qui renferme une pseudo-coupole conoïde ; les corps latéraux plus bas sont couverts d'un toit à deux versants s ur des voûtes en berceau.Il est facile de constater l'entière reconstruction moderne du corps méridional, sur la trace des fondations originelles. Dans la rotonde, il n'est pas aisé d'expliquer les différences d'appareil du porche. Les deux parements externes du mur gouttereau sont surtout faits de gros blocs de basalte noir, qui contrastent avec les petits blocs calcaires de couleur claire des assises circulaires supérieures, dégrossis de façon régulière et de dimension nettement moindre. Cette diversité dans le parement semble indiquer l'ancienneté du corps central et donc deux campagnes de construction distinctes. On en a la confirmation dans les diverses asymétries axiales, dans le manque de point d'ancrage des corps rectangulaires et leur conformité (pour l'appareil et les détails) avec les anneaux supérieurs de la rotonde. Pour la partie reprise à l'époque romane, les liens ibériques se trouvent bien marqués par la fenêtre de l'abside médiane, à l'ébrasement interne lisse, et extérieurement à trois ressauts aux arêtes vives. La voussure au nu du mur, dessinée par de petits claveaux, retombe sur des piédroits formés des pierres du mur exactement comme dans l'église catalane Saint-Clément de Taull. Ce type de fenêtre ne dépend donc pas de San Piero a Grado comme le voudrait Sanpaolesi ( 1975) et l'on ne peut estimer pisane la bichromie au-dessous du faîte de la rotonde, dépourvu d'arceaux de façon significative. La bordure où une assise en basalte alterne avec plusieurs rangées de petits blocs calcaires s'explique peut-être par les influences exercées par ce qui préexistait de l'époque romaine tardive, et était semblable à des édifices en brique comme Sainte-Marie de Mesumundu. Il se pourrait a ussi que la rotonde de Sainte-Sabine ait respecté le tracé circulaire d'un nuraghe, comme le suggère le banc qui courait le long du mur à l'intérieur, stupidement démoli au cours des dernières restaura­tions ( 1986-1987).On peut, avec Delogu, attribuer l'intervention romane à la deuxième moitié du XIe siècle. A propos du plan anormal, il est intéressant de relever d'une part l'intention d'obtenir un espace canoniquement distribué en nefs; d'autre part des adaptations similaires propres en Sardaigne à la mentalité bénédictine : au Nord les églises cassinaises Sainte-Marie de Mesumundu et Saint-Elie de Montesanto, au Sud les victorines à deux nefs. En confirmation d'une possible appartenance monastique de Sainte-Sabine, on peut aussi compter l'antique tradition, rapportée par Angius (1850) selon laquelle « il y aurait eu, contigu à cette même église, un hospice bénédictin».

 

(extrait de : Sardaigne romane ; Renata Serra, Ed. du Zodiaque, Coll. La Nuit des Temps, 1979, pp. 360-361)

 

Descriptif de l'édifice en italien (avec coordonnées GPS) : "Carta e Guida alle Chiese Romaniche della Sardegna" ; Sando Mezzolani, Collana NATURA e ARCHEOLOGIA, Alpha Editoriale, 2. éd. 2007

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Uploaded on November 29, 2011
Taken on June 9, 2011