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Eglise San-Paolo à Milis

Eglise romane San-Paolo ; commune de Milis, province d'Oristano, Sardaigne, Italie

 

A Milis se signalent à l'attention les églises romanes de Saint-Pierre et de Saint-Paul, en dehors de l'agglomération. De la première, «du fait qu'elle présente des pilastres à bases superposées analogues à celles de l'agrandissement de Sainte-Marie de Bonarcado, on peut penser qu'elle a été exécutée vers le milieu du XIIIe siècle par les mêmes équipes» ...; la seconde révèle deux campagnes de construction. C'est à 1140-1150 que remontent l'implantation et la construction à la façon de la cathédrale de Santa Giusta (1135-1145), jusqu'à la mise en œuvre de la dichromie, qui en distingue le complément (1200-1225) dû à l'équipe de San-Palmerio de Ghilarza. Le plan de Saint-Paul forme un tau. Dans le passage au transept aurait dû se trouver un arc triomphal, jamais réalisé car les piédroits sont tronqués et il n'y a point d'arrachement dans le haut. La nef est couverte d'un toit de bois sur fermes ; le transept est voûté d'arêtes, comme le local qui en prolonge le bras Nord vers la façade. Les portes Ouest (seul le portail principal a un arc de décharge bicolore) présentent des piédroits non monolithiques. le linteau en bâtière est en trachyte sombre. Tant sa forme que le contraste coloré qu'il forme avec le parement en trachyte de couleur chaude renvoient à la porte Nord de Santa Giusta. De la cathédrale procède le motif des impostes chanfreinées sur les côtes de la façade, peut-être pour l'appui d'un auvent. L'édifice s'élève sur un soubassement emprunté lui aussi à Santa Giusta, mais comme un simple trait de style, car il n'est pas justifié par la présence d'une crypte. La haute plinthe est réalisée en trachyte ; sont aussi le plus souvent du même matériau les bases des pilastres, à tore et scotie, et les socles cubiques qui interrompent le talus. Au flanc Sud on compte quatre panneaux, séparés par des lésènes en forte saillie ; le pilastre d'angle fait retour en façade. Dans le second panneau s'ouvre une fenêtre à double ébrasement ; sur le tympan du troisième est incrustée une croix en trachyte de couleur rouge sombre qui rappelle celle du portail Ouest de Santa Giusta. Au quatrième panneau se greffe avec des lésènes le bras Sud du transept; des impostes moulurées des pilastres d'angle naissent d'amples arceaux, deux par panneau sur de larges modillons eux aussi moulurés. A l'Est de ce bras s'ouvre dans l'axe du modillon une fenêtre ébrasee qui, comme celle du panneau médian de l'abside, est caractérisée par un appui en pente, trait attestant la participation d'équipes cisterciennes de Sainte-Marie de Corte (1147). Le bras Nord du transept se présente de façon analogue mais avec trois panneaux en raison de sa plus grande longueur due au prolongement vers l'Ouest; dans le premier panneau de gauche se trouve une fenêtre semblable à celles déjà décrites. Les lésènes portent de minces chapiteaux moulurés, sur lesquels prennent appui les écoinçons des arceaux ; les vous­sures sont faites de claveaux moulurés. On remarquera, sur les arceaux qui naissent des pilastres d'angle le typique cintre outrepassé, visible aussi a l'Ouest où s'ouvre la porte à linteau en bâtière. L'arcature est réalisée en choisissant spécialement les pierres. Au transept, sur l'appareil monochrome se détachent les sommiers en pierre verdâtre et les voussures bicolores avec en alternance des segments en trachyte, tandis que les écoinçons sont en grès. A l'abside et sur la nef, l'effet de couleur est différent car les voussures sont en grès, en contraste avec sommiers et écoinçons en trachyte noir. Dans le premier cas on est en face de motifs empruntés à Santa Giusta ou directement à la cathédrale de Pise, comme l'arc outrepassé ; dans le second les modèles semblent être du genre de Saint-Pierre de Sorres (1170-1180). En effet les parties hautes de la nef, de l'abside et de la façade doivent être attribuées à des équipes de la Sardaigne du Nord, qui en 1200-1225 terminèrent l'église de Milis. Tenant compte des indications données par ce qui était déjà construit, on respecta le rythme de deux arceaux par panneau; là où on se trouvait libre de ces contraintes, spécialement dans l'arcature serrée paral­lèle aux rampants du pignon Est, on adopta des motifs plus au goût du jour, comme les arceaux à voussure interne en plein cintre et externe en cintre brisé, sur d'étroits modillons allongés. La façade de Saint-Paul a connu une réplique à San Palmerio de Ghilarza (1200-1225) mais il faut écarter l'opinion selon laquelle le modèle ait été pris à Sainte-Marie de Bonarcado, car les pilastres offrent à Milis une saillie bien moindre et les arcs, non pas à arête vive mais chanfreinés, sont marqués au départ par de minces chapiteaux. Ainsi se trouve définie une division qui, découpant la zone médiane d'une façade qui serait en trois parties selon la règle romane, y rassemble les trois arcs ailleurs répartis à raison d'un par zone. Dans les détails apparaît la sensibilité pisane qui caractérise la façade de San Lussorio de Selargius, à laquelle renvoie aussi la présence d'un losange en gradins dans les panneaux latéraux. Faute de pouvoir repérer les maillons intermédiaires entre San Lussorio de Selargius (XIIe siècle ) et la façade de Saint-Paul du XIIIe, il ne nous reste qu'à admettre une hypothétique reprise de modèles archaïques.

 

(extrait de : Sardaigne romane ; Renata Serra, Ed. du Zodiaque, Coll. La Nuit des Temps, 1979, pp. 204-205)

 

Descriptif de l'édifice en italien (avec coordonnées GPS) : "Carta e Guida alle Chiese Romaniche della Sardegna" ; Sando Mezzolani, Collana NATURA e ARCHEOLOGIA, Alpha Editoriale, 2. éd. 2007

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Uploaded on August 10, 2011
Taken on June 6, 2011