kristobalite
Eglise Sant-Climent de Taüll
Eglise romane Sant-Climent ; commune de Taüll, comarque de l'Alta Ribagorça, province de Lleida (Lérida), Catalogne, Espagne
Elle fut consacrée le 10 décembre 1123 et correspond au type basilical parfait, avec ses trois nefs à toiture de bois, séparées par des colonnes et terminées par trois absides. Les nefs convergent légèrement vers le chevet, divisées par des colonnes qui soutiennent les quatre arcades semi-circulaires. La structure rustique des murs en blocs non polis, l'absence absolue de fenêtres dans ceux-ci, le fait qu'il n'y ait pas d'autres ouvertures que la porte méridionale en arc en douelles, en plus d'une autre porte, postérieure, sur le mur occidental, et de celle qui communique avec le clocher, tout cela - la simplicité même - est aussi inexpressif qu'un hangar de montagne au toit d'ardoise à deux versants. Quelques-unes des colonnes cylindriques jaillissent directement du sol. Les autres reposent sur une base lisse. Toutes sont formées non de blocs monolithes mais de petites pierres, et s'ornent dans leur partie supérieure d'un petit collier en dents d'engrenage, élément décoratif propre aux frises et aux archivoltes. Ces colonnes n'ont pas de chapiteaux et sont surmontées de simples tailloirs aux angles inférieurs arrondis qui leur permettent de s'emboîter dans la colonne et de donner naissance aux arcs. Sur ces derniers s'élève le mur, d'une hauteur suffisante pour recevoir les deux versants de la couverture. La méthode employée pour la construction de cette couverture est des plus primitives et des plus rustiques : les poutres superposées, tendues d'un mur à l'autre, forment l'armature centrale dans laquelle sont distribuées les poutres de soutien de la toiture, selon l'inclinaison des versants.
Le chevet triabsidal est d'une structure différente et plus soignée que celle des nefs. Il forme contraste avec celles-ci par ses voûtes, et bien qu'à première vue les murs paraissent identiques par la coupe et la taille des pierres, dans les éléments constituant les arcatures et les fenêtres du chevet prédomine un travail plus fignolé. A l'intérieur les absidioles lisses se développent derrière l'arc qui perfore le mur. L'abside centrale, par contre, est précédée d'un court espace, sorte de prolongation de la nef, plus basse que celle-ci et possédant sa toiture propre à deux versants. Les absidioles sont décorées à l'extérieur par des groupes de trois arcatures séparés par des demi-colonnes rustiques, alors que sur l'abside les groupes sont de quatre arcatures. Au-dessus s'étend une frise en dents d'engrenage comme les petits colliers des colonnes et des frises qui soulignent chaque étage du clocher. C'est le type lombard caractéristique. Certes il lui manque la spontanéité de ses meilleures œuvres et l'émouvant assemblage des pierres qui caractérise les époques antérieures, mais par contre un grand soin est apporte à la taille des arcs monolithes, de section en double saillie, qui apparaissent aussi dans les rares fenêtres à double ébrasement, situées les unes au fond de chaque abside, les autres au-dessus des absidioles, en plus des œils-de-boeuf circulaires placés dans l'abside centrale et au-dessus de celle-ci. Ce sont les uniques ouvertures destinées à l'éclairage, toutes concentrées au chevet afin que par elles la lumière soit projetée du sanctuaire vers l'intérieur du temple.
La tour carrée du clocher se dresse isolée, près de l'angle du mur du Midi et toute proche des absides. Elle est haute et svelte avec ses cinq étages, le socle de sa base et sa couverture en pyramide. Les quatre étages supérieurs émergent au-dessus du niveau de l'église. Sur toutes les faces se répète la structure de chaque étage dont le mur est encadré à chaque angle par un pilier et se termine à la partie supérieure par cinq arcatures qui, dans les trois derniers étages, sont délimitées par des frises en dents d'engrenage. La gradation d'ouvertures en arcs jumelés est brisée au troisième étage par des arcs triples, et, sur le socle, par une simple fenêtre. Les fines colonnettes sont surmontées d'un tailloir qui réunit les arcs. Par sa forme et par son expression ce clocher s'éloigne des tours lombardes caractéristiques du XIe siècle, plus massives et plus sévères, et se rapproche de ses contemporaines italiennes dont elle essaie d'imiter les incrustations de céramique et le coloris des cercles de pierre dans la frise supérieure, ainsi que l'application, sur les arcatures et les dents de scie, de la couleur ocre rouge qui s'harmonise avec la teinte de la terre.
Du revêtement polychrome qui décora tout l'intérieur de l'église - abside, murs, colonnes -il ne reste plus que les peintures de l'abside centrale et de l'une des absidioles, conservées au Musée d'Art de Barcelone. La décoration de l'abside est peut-être le sommet de l'art pictural roman tant s'y perçoit le souffle du meilleur artiste passant alors par la Catalogne; ce peintre sut se servir du formulaire byzantin tout en lui conférant une vigueur nouvelle, où éclate sa personnalité marquante. En outre, son instinct réaliste lui a permis de donner vie à ses figures tout en respectant le hiératisme grandiose de l'abstrait. L'hémisphère de l'abside, de 4 m. de diamètre, contient la vision du Pantocrator entouré du tétramorphe. Les parties figuratives se détachent sur un fond divisé en trois bandes allant du bleu clair au gris de plomb en passant par l'ocre. A l'intérieur de l'ellipse irisée entourée de perles, apparaît le Créateur, assis sur une bande transversale décorée de feuillage. Ses pieds nus reposent sur une demi-sphère. La figure majestueuse est dressée sur un fond bleuté entre l'Alpha et l'Oméga, suspendus par trois fils, en guise de lampes; elle bénit de la main droite, d'un geste solennel, tandis que, de la gauche, elle soutient sur son genou le livre ouvert où l'on peut lire ego svm lvx mvndi. Les plis réalistes de la tunique grise et du manteau bleuté dans lesquels s'enveloppe le Créateur, trahissent la vitalité de la figure qui se manifeste avec une vigueur extraordinaire dans les détails des pieds et des mains délicatement moulés, et surtout dans l'impressionnante stylisation de la tête, réalisée avec une arabesque aux lignes précises, rehaussée par des glacis qui s'estompent sur le blanc de l'auréole crucifère. Quatre anges présentent les symboles des évangélistes ; deux se trouvent représentés entièrement dans la partie supérieure, l'un faisant allusion à Sanctvs Mathevs, et l'autre portant dans ses mains voilées l'aigle de Sanctvs lohanes ; tous deux ont un mouvement merveilleux : on dirait qu'ils refrènent leur vol impétueux autour de l'apparition. Les deux autres ne sont représentés qu'à mi-corps, dans la zone inférieure, à l'intérieur de cercles. A leurs côtés dans des cercles identiques sont placés le lion de Sanctvs Marchvs Ev et le taureau de Sanctvs Lvchas Ev ; ces cercles évoquent sans doute le tourbillon des roues qui inaugure l'apparition. Deux anges Séraphim complètent cette scène, un à chaque extrémité. Leurs corps sont enveloppés de six ailes recouvertes d'yeux et leurs bras ont une attitude acclamative. La vivacité des figures dans l'enceinte sublime où elles se produisent, contraste avec la zone inférieure où domine le rouge chaud sur un fond bleu. Un portique fantasque de sept arcades surbaissées tracées à vue sur des chapiteaux de feuillage, encadre les figures de la Vierge et de cinq Apôtres, conservées seulement dans leur moitié supérieure, de chaque côté de la fenêtre centrale. La forme rigide des silhouettes asservit davantage le modelé, et les exagérations de certains détails éloignent les figures de l'intensité si bien réussie dans la zone supérieure. La Sainte Vierge S, Maria avec une toque blanche sur un manteau bleu a une attitude de prière et soulève sur sa main gauche, voilée, le plat d'où jaillissent des flammes lumineuses. Les apôtres ...ornas, S. Bartolomee, S. lachobe, S. Fil..., portent le livre sur la poitrine, avec les mains voilées, et seul S. loanes le soulève de sa main droite en un geste d'acclamation.
Sur la clé de l'arc triomphal est représenté l'Agneau à tête nimbée de l'auréole crucifère et pourvue de sept yeux selon la vision apocalyptique. Dans la clé de l'autre arc, la main divine bénissante, d'une majestueuse grandeur, émerge du cercle qui l'entoure. Du reste de la décoration de ces arcs, sous une zone comportant des indices de figures d'anges, ne sont conservées que la figure assise du patriarche Jacob et celle de Lazare, étendu devant la porte du mauvais riche et accompagné d'un chien qui lèche ses plaies.
La vigoureuse impétuosité atteinte par le maître de cette œuvre - à qui l'on attribue également la décoration conservée dans une abside de l'ancienne église de Rodes, siège de l'évêque Raymond qui consacra Taüll - trahit le génie d'un artiste très bien formé qui, employant des couleurs pures et dominant profondément son art, sut vitaliser les formules iconographiques en usage, sans sortir toutefois des traits conventionnels, mais en leur imprimant un souffle incomparable qui le mène à fuir la symétrie et à préciser ainsi avec plus de force le contenu humain des figurations. L'effet est obtenu par le chromatisme et l'expression intense, capable d'accorder la vision d'un monde transcendant avec une traduction humanisée et sensible.
Ce peintre est très différent de celui qui continua son œuvre dans le reste de l'église et que l'on ne peut juger d'ailleurs que d'après la partie précédant l'une des absidioles. Le sujet, constitué par six anges sur un fond divisé en zones de différentes couleurs, est bien inférieur de par sa qualité artistique et de par son coloris. Les caractéristiques du style de cet artiste apparaissent plus nettement dans la décoration de l'église Santa Maria où se manifeste la hardiesse de son caractère. Des peintures qui revêtirent les murs intérieurs il ne reste que le remarquable fragment provenant de l'une des colonnes où est inscrite la date de la consécration de l'église à la manière lapidaire.
(extrait de : Catalogne romane" ; Mgr. Edouard Junyent ; Ed. Zodiaque, Coll. La nuit des temps, pp.175-185)
Eglise Sant-Climent de Taüll
Eglise romane Sant-Climent ; commune de Taüll, comarque de l'Alta Ribagorça, province de Lleida (Lérida), Catalogne, Espagne
Elle fut consacrée le 10 décembre 1123 et correspond au type basilical parfait, avec ses trois nefs à toiture de bois, séparées par des colonnes et terminées par trois absides. Les nefs convergent légèrement vers le chevet, divisées par des colonnes qui soutiennent les quatre arcades semi-circulaires. La structure rustique des murs en blocs non polis, l'absence absolue de fenêtres dans ceux-ci, le fait qu'il n'y ait pas d'autres ouvertures que la porte méridionale en arc en douelles, en plus d'une autre porte, postérieure, sur le mur occidental, et de celle qui communique avec le clocher, tout cela - la simplicité même - est aussi inexpressif qu'un hangar de montagne au toit d'ardoise à deux versants. Quelques-unes des colonnes cylindriques jaillissent directement du sol. Les autres reposent sur une base lisse. Toutes sont formées non de blocs monolithes mais de petites pierres, et s'ornent dans leur partie supérieure d'un petit collier en dents d'engrenage, élément décoratif propre aux frises et aux archivoltes. Ces colonnes n'ont pas de chapiteaux et sont surmontées de simples tailloirs aux angles inférieurs arrondis qui leur permettent de s'emboîter dans la colonne et de donner naissance aux arcs. Sur ces derniers s'élève le mur, d'une hauteur suffisante pour recevoir les deux versants de la couverture. La méthode employée pour la construction de cette couverture est des plus primitives et des plus rustiques : les poutres superposées, tendues d'un mur à l'autre, forment l'armature centrale dans laquelle sont distribuées les poutres de soutien de la toiture, selon l'inclinaison des versants.
Le chevet triabsidal est d'une structure différente et plus soignée que celle des nefs. Il forme contraste avec celles-ci par ses voûtes, et bien qu'à première vue les murs paraissent identiques par la coupe et la taille des pierres, dans les éléments constituant les arcatures et les fenêtres du chevet prédomine un travail plus fignolé. A l'intérieur les absidioles lisses se développent derrière l'arc qui perfore le mur. L'abside centrale, par contre, est précédée d'un court espace, sorte de prolongation de la nef, plus basse que celle-ci et possédant sa toiture propre à deux versants. Les absidioles sont décorées à l'extérieur par des groupes de trois arcatures séparés par des demi-colonnes rustiques, alors que sur l'abside les groupes sont de quatre arcatures. Au-dessus s'étend une frise en dents d'engrenage comme les petits colliers des colonnes et des frises qui soulignent chaque étage du clocher. C'est le type lombard caractéristique. Certes il lui manque la spontanéité de ses meilleures œuvres et l'émouvant assemblage des pierres qui caractérise les époques antérieures, mais par contre un grand soin est apporte à la taille des arcs monolithes, de section en double saillie, qui apparaissent aussi dans les rares fenêtres à double ébrasement, situées les unes au fond de chaque abside, les autres au-dessus des absidioles, en plus des œils-de-boeuf circulaires placés dans l'abside centrale et au-dessus de celle-ci. Ce sont les uniques ouvertures destinées à l'éclairage, toutes concentrées au chevet afin que par elles la lumière soit projetée du sanctuaire vers l'intérieur du temple.
La tour carrée du clocher se dresse isolée, près de l'angle du mur du Midi et toute proche des absides. Elle est haute et svelte avec ses cinq étages, le socle de sa base et sa couverture en pyramide. Les quatre étages supérieurs émergent au-dessus du niveau de l'église. Sur toutes les faces se répète la structure de chaque étage dont le mur est encadré à chaque angle par un pilier et se termine à la partie supérieure par cinq arcatures qui, dans les trois derniers étages, sont délimitées par des frises en dents d'engrenage. La gradation d'ouvertures en arcs jumelés est brisée au troisième étage par des arcs triples, et, sur le socle, par une simple fenêtre. Les fines colonnettes sont surmontées d'un tailloir qui réunit les arcs. Par sa forme et par son expression ce clocher s'éloigne des tours lombardes caractéristiques du XIe siècle, plus massives et plus sévères, et se rapproche de ses contemporaines italiennes dont elle essaie d'imiter les incrustations de céramique et le coloris des cercles de pierre dans la frise supérieure, ainsi que l'application, sur les arcatures et les dents de scie, de la couleur ocre rouge qui s'harmonise avec la teinte de la terre.
Du revêtement polychrome qui décora tout l'intérieur de l'église - abside, murs, colonnes -il ne reste plus que les peintures de l'abside centrale et de l'une des absidioles, conservées au Musée d'Art de Barcelone. La décoration de l'abside est peut-être le sommet de l'art pictural roman tant s'y perçoit le souffle du meilleur artiste passant alors par la Catalogne; ce peintre sut se servir du formulaire byzantin tout en lui conférant une vigueur nouvelle, où éclate sa personnalité marquante. En outre, son instinct réaliste lui a permis de donner vie à ses figures tout en respectant le hiératisme grandiose de l'abstrait. L'hémisphère de l'abside, de 4 m. de diamètre, contient la vision du Pantocrator entouré du tétramorphe. Les parties figuratives se détachent sur un fond divisé en trois bandes allant du bleu clair au gris de plomb en passant par l'ocre. A l'intérieur de l'ellipse irisée entourée de perles, apparaît le Créateur, assis sur une bande transversale décorée de feuillage. Ses pieds nus reposent sur une demi-sphère. La figure majestueuse est dressée sur un fond bleuté entre l'Alpha et l'Oméga, suspendus par trois fils, en guise de lampes; elle bénit de la main droite, d'un geste solennel, tandis que, de la gauche, elle soutient sur son genou le livre ouvert où l'on peut lire ego svm lvx mvndi. Les plis réalistes de la tunique grise et du manteau bleuté dans lesquels s'enveloppe le Créateur, trahissent la vitalité de la figure qui se manifeste avec une vigueur extraordinaire dans les détails des pieds et des mains délicatement moulés, et surtout dans l'impressionnante stylisation de la tête, réalisée avec une arabesque aux lignes précises, rehaussée par des glacis qui s'estompent sur le blanc de l'auréole crucifère. Quatre anges présentent les symboles des évangélistes ; deux se trouvent représentés entièrement dans la partie supérieure, l'un faisant allusion à Sanctvs Mathevs, et l'autre portant dans ses mains voilées l'aigle de Sanctvs lohanes ; tous deux ont un mouvement merveilleux : on dirait qu'ils refrènent leur vol impétueux autour de l'apparition. Les deux autres ne sont représentés qu'à mi-corps, dans la zone inférieure, à l'intérieur de cercles. A leurs côtés dans des cercles identiques sont placés le lion de Sanctvs Marchvs Ev et le taureau de Sanctvs Lvchas Ev ; ces cercles évoquent sans doute le tourbillon des roues qui inaugure l'apparition. Deux anges Séraphim complètent cette scène, un à chaque extrémité. Leurs corps sont enveloppés de six ailes recouvertes d'yeux et leurs bras ont une attitude acclamative. La vivacité des figures dans l'enceinte sublime où elles se produisent, contraste avec la zone inférieure où domine le rouge chaud sur un fond bleu. Un portique fantasque de sept arcades surbaissées tracées à vue sur des chapiteaux de feuillage, encadre les figures de la Vierge et de cinq Apôtres, conservées seulement dans leur moitié supérieure, de chaque côté de la fenêtre centrale. La forme rigide des silhouettes asservit davantage le modelé, et les exagérations de certains détails éloignent les figures de l'intensité si bien réussie dans la zone supérieure. La Sainte Vierge S, Maria avec une toque blanche sur un manteau bleu a une attitude de prière et soulève sur sa main gauche, voilée, le plat d'où jaillissent des flammes lumineuses. Les apôtres ...ornas, S. Bartolomee, S. lachobe, S. Fil..., portent le livre sur la poitrine, avec les mains voilées, et seul S. loanes le soulève de sa main droite en un geste d'acclamation.
Sur la clé de l'arc triomphal est représenté l'Agneau à tête nimbée de l'auréole crucifère et pourvue de sept yeux selon la vision apocalyptique. Dans la clé de l'autre arc, la main divine bénissante, d'une majestueuse grandeur, émerge du cercle qui l'entoure. Du reste de la décoration de ces arcs, sous une zone comportant des indices de figures d'anges, ne sont conservées que la figure assise du patriarche Jacob et celle de Lazare, étendu devant la porte du mauvais riche et accompagné d'un chien qui lèche ses plaies.
La vigoureuse impétuosité atteinte par le maître de cette œuvre - à qui l'on attribue également la décoration conservée dans une abside de l'ancienne église de Rodes, siège de l'évêque Raymond qui consacra Taüll - trahit le génie d'un artiste très bien formé qui, employant des couleurs pures et dominant profondément son art, sut vitaliser les formules iconographiques en usage, sans sortir toutefois des traits conventionnels, mais en leur imprimant un souffle incomparable qui le mène à fuir la symétrie et à préciser ainsi avec plus de force le contenu humain des figurations. L'effet est obtenu par le chromatisme et l'expression intense, capable d'accorder la vision d'un monde transcendant avec une traduction humanisée et sensible.
Ce peintre est très différent de celui qui continua son œuvre dans le reste de l'église et que l'on ne peut juger d'ailleurs que d'après la partie précédant l'une des absidioles. Le sujet, constitué par six anges sur un fond divisé en zones de différentes couleurs, est bien inférieur de par sa qualité artistique et de par son coloris. Les caractéristiques du style de cet artiste apparaissent plus nettement dans la décoration de l'église Santa Maria où se manifeste la hardiesse de son caractère. Des peintures qui revêtirent les murs intérieurs il ne reste que le remarquable fragment provenant de l'une des colonnes où est inscrite la date de la consécration de l'église à la manière lapidaire.
(extrait de : Catalogne romane" ; Mgr. Edouard Junyent ; Ed. Zodiaque, Coll. La nuit des temps, pp.175-185)