Bella au col blanc (Chagall)
Huile sur toile de lin, 149 x 72 cm, 1917, centre Pompidou, Paris.
Chagall a épousé Bella Rosenfeld au cours de l'été 1915. Le père et la fille, minuscules, sont dans un jardin au pied d'une immense frondaison verte que domine en plein ciel une Bella attendrie aux airs de Madone. La monumentalité du tableau impressionne, avec sa hauteur de deux fois la largeur, son motif inférieur occupant un tiers de la toile et le corps de Bella dans les deux tiers restant presque toute la largeur.
Cette Madone semble en pleine Assomption, mais avec une absence d'extase, une froideur distante et une puissance physique, la dureté écrasante de cette femme émergeant de bois touffus, son regard portant vers la terre et non vers le ciel. Tout cela renvoie aux légendes germaniques peuplées de divinités sylvestres surgissant de l'épaisse forêt originelle. Ces divinités, sortes de Brünhilde, sont dangereuses pour les hommes qu'elles maintiennent aux lisières de leurs territoires et maintenus à l'écart au premier plan.
Cette femme peu rassurante ne correspond pas à la délicate fiancée juive, mais traduit aussi une perception plus secrète que Chagall a de son épouse, une divinité protectrice qui exercera une grande influence sur son art. Bella fut en effet l'inspiratrice, la nouvelle mère, Chagall ayant toujours été très proche de celle-ci. Son père toujours fatigué par son travail était plutôt triste, mais sa mère l'avait soutenu quand il avait décidé d'être un artiste plutôt qu'un employé de bureau, ce qui aurait été une assurance financière pour sa famille
Elle avait discuté avec lui de sa peinture alors qu'ayant neuf enfants et tenant une petite épicerie elle n'avait aucune formation. Chagall était un homme fragile qui se donnait entièrement à son art et trouvait dans l'amour de Bella une force qui lui était nécessaire en ces années troubles. Grâce au frère de Bella, il avait trouvé une place dans un bureau de Saint Petersbourg, ce qui lui avait donné la chance de n'être pas enrôlé par la guerre, et de profiter de sa jeune femme et de leur petite fille Ida, née en mai 1916.
En 1917, la Révolution russe laissait croire qu'en pourrait sortir une société plus juste que celle sur laquelle avait régné le tsar. Le fils d'ouvrier avait choisi son camp et le juif se réjouissait de se voir reconnaître des droits égaux à ceux des autres citoyens. C'est cependant plus tard, avec Lénine, qu'aura lieu le grand changement.
Bella jusqu'à sa mort en 1944 fut le grand amour de Chagall. Abandonnant tout projet de carrière personnelle, elle fit en sorte qu'il n'ait à se soucier que de son œuvre. Après la Révolution d'Octobre elle freina son mari pour qu'il ne s'implique pas trop politiquement et parvint à lui faire refuser la direction des Beaux-Arts au ministère de la culture, mais il voulut se lancer dans une action culturelle de grande envergure à Vitebsk, ce qu'il regretta. Bella au col blanc, par son gigantisme et son aspect hiératique, est comme ces statues qui évoquent la Liberté ou la République (cf. kerdonis).
Bella au col blanc (Chagall)
Huile sur toile de lin, 149 x 72 cm, 1917, centre Pompidou, Paris.
Chagall a épousé Bella Rosenfeld au cours de l'été 1915. Le père et la fille, minuscules, sont dans un jardin au pied d'une immense frondaison verte que domine en plein ciel une Bella attendrie aux airs de Madone. La monumentalité du tableau impressionne, avec sa hauteur de deux fois la largeur, son motif inférieur occupant un tiers de la toile et le corps de Bella dans les deux tiers restant presque toute la largeur.
Cette Madone semble en pleine Assomption, mais avec une absence d'extase, une froideur distante et une puissance physique, la dureté écrasante de cette femme émergeant de bois touffus, son regard portant vers la terre et non vers le ciel. Tout cela renvoie aux légendes germaniques peuplées de divinités sylvestres surgissant de l'épaisse forêt originelle. Ces divinités, sortes de Brünhilde, sont dangereuses pour les hommes qu'elles maintiennent aux lisières de leurs territoires et maintenus à l'écart au premier plan.
Cette femme peu rassurante ne correspond pas à la délicate fiancée juive, mais traduit aussi une perception plus secrète que Chagall a de son épouse, une divinité protectrice qui exercera une grande influence sur son art. Bella fut en effet l'inspiratrice, la nouvelle mère, Chagall ayant toujours été très proche de celle-ci. Son père toujours fatigué par son travail était plutôt triste, mais sa mère l'avait soutenu quand il avait décidé d'être un artiste plutôt qu'un employé de bureau, ce qui aurait été une assurance financière pour sa famille
Elle avait discuté avec lui de sa peinture alors qu'ayant neuf enfants et tenant une petite épicerie elle n'avait aucune formation. Chagall était un homme fragile qui se donnait entièrement à son art et trouvait dans l'amour de Bella une force qui lui était nécessaire en ces années troubles. Grâce au frère de Bella, il avait trouvé une place dans un bureau de Saint Petersbourg, ce qui lui avait donné la chance de n'être pas enrôlé par la guerre, et de profiter de sa jeune femme et de leur petite fille Ida, née en mai 1916.
En 1917, la Révolution russe laissait croire qu'en pourrait sortir une société plus juste que celle sur laquelle avait régné le tsar. Le fils d'ouvrier avait choisi son camp et le juif se réjouissait de se voir reconnaître des droits égaux à ceux des autres citoyens. C'est cependant plus tard, avec Lénine, qu'aura lieu le grand changement.
Bella jusqu'à sa mort en 1944 fut le grand amour de Chagall. Abandonnant tout projet de carrière personnelle, elle fit en sorte qu'il n'ait à se soucier que de son œuvre. Après la Révolution d'Octobre elle freina son mari pour qu'il ne s'implique pas trop politiquement et parvint à lui faire refuser la direction des Beaux-Arts au ministère de la culture, mais il voulut se lancer dans une action culturelle de grande envergure à Vitebsk, ce qu'il regretta. Bella au col blanc, par son gigantisme et son aspect hiératique, est comme ces statues qui évoquent la Liberté ou la République (cf. kerdonis).