La Cheminée (Bonnard - D 884)
Huile sur toile, 1916 (D 884).
Autres noms du tableau : Femme à sa toilete, Torse de femme vu dans un miroir, Femme nue à mi-corps se regardant dans une glace.
Si le tableau placé au dessus de la cheminée est bien de H Matisse, il n'est cependant pas répertorié dans ses oeuvres. la femme sculpturale du tableau est Renée Monchaty (modèle dès 1916, puis amante de l'artiste, après Lucienne Dupuy ayant rompu avec lui en 1919, et avant sa mort par suicide en 1925 du à son désespoir amoureux). Discret sur le sujet, P Bonnard devant qui était alors évoqué sa situation matrimoniale disait : "Vous savez, je ne suis pas très courageux".
Cette quête de soi dans le miroir engendre chez Bonnard la mise en œuvre de dispositifs extrêmement intéressants et parfois troublants. Renée Monchaty est ici représentée de face, dans le miroir encadré de bleu, et simultanément de dos, dans un deuxième miroir, plus petit mais éloigné (une sorte de psyché laissant apparaître le bas de son dos), dans une installation rigoureuse, rectiligne et frontale. Si l'on s'aventure à tracer les diagonales de ce tableau, on arrive tout en haut de ce petit miroir, au creux des reins de cette jeune femme à mi-corps (environ 30 ans de moins que l'artiste), quasiment au vallonnement de la colonne vertébrale, à l'exact point où l'on devrait voir apparaître le reflet du peintre. Mais celui-ci a disparu.
Cette tache un peu sombre, arrondie, dans le coin inférieur droit du miroir, coincée entre le bouquet de fleur et la bordure bleue du cadre de ce miroir, est peut être la tête de Marthe (apparaissant souvent dans les coins), la future femme du peintre (momentanément en train de sortir de sa vie et également du miroir). L'emboîtement de ces miroirs multiples nous indique probablement qu'à cette époque de sa vie les choses étaient compliquées pour le peintre. Il avait en effet rencontré Marthe, plus d'une vingtaine d'années auparavant, avec qui il finira par se marier, le 15 août 1925 (Renée, devenue entretemps amoureuse du peintre se suicide, le 9 septembre de la même année).
Sur cette cheminée, Renée est formidablement rayonnante et Marthe a priori discrètement éclipsée dans un angle de ce miroir menteur, Bonnard, ayant connu des périodes de doute profond et de tourment existentiel, s’est naturellement tourné vers les miroirs, par naïveté, croyant qu'ils peuvent être des outils efficaces dans la quête du réel. Mais représenter, tenter de figurer l’absence, ce n’est pas seulement évoquer. La vie brisée de la jeune femme du tableau incite en effet à la regarder autrement, non plus comme un modèle, mais tout simplement pour elle-même, celle qui n'a pu surmonter l'épreuve de ces miroirs, dont son image nous trouble encore et nous envahit de tristesse.
Marthe quant à elle ne s'y était pas trompée, la vraie maîtresse de Pierre Bonnard étant la peinture. Elle le savait implicitement pour être celle qui depuis leur rencontre de 1893 a été indissociablement liée à lui. Pour le meilleur, quand elle incarnait son émerveillement, et pour le pire, quand il supportait toutes ses phobies. Après sa mort cependant, intervenue en 1942, le peintre reprend en 1945-1946 la toile Femmes au jardin (D 1103), composée en 1921-1923, à savoir un autre portrait rayonnant de Renée (voir ci-dessous), l'un de ceux qui étaient insupportables à Marthe, comme aussi celui de 1925 La Nappe Blanche où elles sont toutes deux diamètralement opposées (voir aussi ci-dessous). "J’espère que ma peinture tiendra, sans craquelures. Je voudrais arriver devant les jeunes peintres de l’an 2000 avec des ailes de papillon" disait le peintre en 1946 à juste titre, ces craquelures ayant par contre déjà eu lieu dans sa vie (cf. holbein.free.fr, lessoireesdeparis.com, F Cloarec l'indolente") :
www.flickr.com/photos/7208148@N02/25754123348/in/album-72...
www.flickr.com/photos/7208148@N02/27848994969/in/album-72...
Pour voir l'étude préalable du tabeau :
www.flickr.com/photos/7208148@N02/38915920984/in/album-72...
La Cheminée (Bonnard - D 884)
Huile sur toile, 1916 (D 884).
Autres noms du tableau : Femme à sa toilete, Torse de femme vu dans un miroir, Femme nue à mi-corps se regardant dans une glace.
Si le tableau placé au dessus de la cheminée est bien de H Matisse, il n'est cependant pas répertorié dans ses oeuvres. la femme sculpturale du tableau est Renée Monchaty (modèle dès 1916, puis amante de l'artiste, après Lucienne Dupuy ayant rompu avec lui en 1919, et avant sa mort par suicide en 1925 du à son désespoir amoureux). Discret sur le sujet, P Bonnard devant qui était alors évoqué sa situation matrimoniale disait : "Vous savez, je ne suis pas très courageux".
Cette quête de soi dans le miroir engendre chez Bonnard la mise en œuvre de dispositifs extrêmement intéressants et parfois troublants. Renée Monchaty est ici représentée de face, dans le miroir encadré de bleu, et simultanément de dos, dans un deuxième miroir, plus petit mais éloigné (une sorte de psyché laissant apparaître le bas de son dos), dans une installation rigoureuse, rectiligne et frontale. Si l'on s'aventure à tracer les diagonales de ce tableau, on arrive tout en haut de ce petit miroir, au creux des reins de cette jeune femme à mi-corps (environ 30 ans de moins que l'artiste), quasiment au vallonnement de la colonne vertébrale, à l'exact point où l'on devrait voir apparaître le reflet du peintre. Mais celui-ci a disparu.
Cette tache un peu sombre, arrondie, dans le coin inférieur droit du miroir, coincée entre le bouquet de fleur et la bordure bleue du cadre de ce miroir, est peut être la tête de Marthe (apparaissant souvent dans les coins), la future femme du peintre (momentanément en train de sortir de sa vie et également du miroir). L'emboîtement de ces miroirs multiples nous indique probablement qu'à cette époque de sa vie les choses étaient compliquées pour le peintre. Il avait en effet rencontré Marthe, plus d'une vingtaine d'années auparavant, avec qui il finira par se marier, le 15 août 1925 (Renée, devenue entretemps amoureuse du peintre se suicide, le 9 septembre de la même année).
Sur cette cheminée, Renée est formidablement rayonnante et Marthe a priori discrètement éclipsée dans un angle de ce miroir menteur, Bonnard, ayant connu des périodes de doute profond et de tourment existentiel, s’est naturellement tourné vers les miroirs, par naïveté, croyant qu'ils peuvent être des outils efficaces dans la quête du réel. Mais représenter, tenter de figurer l’absence, ce n’est pas seulement évoquer. La vie brisée de la jeune femme du tableau incite en effet à la regarder autrement, non plus comme un modèle, mais tout simplement pour elle-même, celle qui n'a pu surmonter l'épreuve de ces miroirs, dont son image nous trouble encore et nous envahit de tristesse.
Marthe quant à elle ne s'y était pas trompée, la vraie maîtresse de Pierre Bonnard étant la peinture. Elle le savait implicitement pour être celle qui depuis leur rencontre de 1893 a été indissociablement liée à lui. Pour le meilleur, quand elle incarnait son émerveillement, et pour le pire, quand il supportait toutes ses phobies. Après sa mort cependant, intervenue en 1942, le peintre reprend en 1945-1946 la toile Femmes au jardin (D 1103), composée en 1921-1923, à savoir un autre portrait rayonnant de Renée (voir ci-dessous), l'un de ceux qui étaient insupportables à Marthe, comme aussi celui de 1925 La Nappe Blanche où elles sont toutes deux diamètralement opposées (voir aussi ci-dessous). "J’espère que ma peinture tiendra, sans craquelures. Je voudrais arriver devant les jeunes peintres de l’an 2000 avec des ailes de papillon" disait le peintre en 1946 à juste titre, ces craquelures ayant par contre déjà eu lieu dans sa vie (cf. holbein.free.fr, lessoireesdeparis.com, F Cloarec l'indolente") :
www.flickr.com/photos/7208148@N02/25754123348/in/album-72...
www.flickr.com/photos/7208148@N02/27848994969/in/album-72...
Pour voir l'étude préalable du tabeau :
www.flickr.com/photos/7208148@N02/38915920984/in/album-72...