Perspective corrigée ?
FR : Fronton de l’entrée principale du château de Saint-Germain en Laye (78)
EN: Pediment of the main entrance of the castle of Saint-Germain en Laye (78)
La question du jour : Corriger une perspective architecturale, est-ce vraiment utile, et est-ce bien raisonnable ?
La réponse du jour : Apprenons, d’abord à lire intelligemment une photo d'architecture ! On se fera ensuite sa propre philosophie !
J’ai réalisé cette photo en pensant aux grands maniaques de la photo d’architecture qui expliquent (avec des arguments toujours défendables) que lorsqu’on photographie un bâtiment en contre-plongée (Ce qui est, en général, la position du photographe "normal", c'est à dire les pieds posés au sol, à moins qu’il ne dispose d’un échafaudage ou d'une nacelle pour se placer perpendiculairement et à hauteur des détails architecturaux) il est impératif de redresser les perspectives verticales des photos, soit avec Photoshop (ou équivalent) soit avec un objectif à décentrement…
La seconde solution est un peu plus professionnelle mais aussi bien plus coûteuse (investissement de 1500 à 2000 euros), et ne présente pas un intérêt fondamental pour l’amateur "lambda" (comme moi !) qui ne vend pas ses photos à un architecte, ou à une maison d'éditions. (Et qui ne vend pas ses photos du tout, de surcroît !)
Ici, j’ai donc utilisé un objectif de focale fixe 85 mm, et me suis placé, du mieux possible, sous le fronton, et à peu près dans son axe (et sans doute pas parfaitement, voir verticale gauche !), afin d’éviter les trop fortes distorsions…
Et ensuite, au post-traitement j’ai rectifié (fortement) la verticalité des colonnes avec la fonction "Perspective" de Photoshop
Et bien que voit-on ? Les deux cercles de l’oeil de bœuf (ouverture extérieure et fenêtre encastrée) qui sont parfaitement alignés sur le même axe horizontal dans la réalité architecturale, ne le sont pas sur la photo, puisque situés sur deux plans verticaux distants…
En conséquence, la prise de vue par dessous ne permet nécessairement pas une vision de la réalité, qui devrait montrer des cercles concentriques, alors que la photo les montre sécants.
Tout cela simplement parce que Photoshop ainsi que tous les objectifs à décentrement, même les plus coûteux, “trichent” en agissant sur la déformation en 2D de l'image, mais sont incapables de le faire sur les 3D de l'espace !
Ce qui donne parfois des images étranges…
C'est juste bêtement géométrique et cette photo est une illusion d'optique !
La photo redressée est même moins réaliste que l’originale, avec ses fuyantes convergentes, qui est finalement plus proche de la vision humaine...
Parenthèse: L’œil humain est assez proche d’une optique 50mm, avec un bon post-traitement des contrastes grâce au cerveau, mais il est hélas épouvantablement vigneté ! Donc, si Dieu a créé l’œil, il a un peu raté son coup, car un bon zoom Nikkor est bien meilleur que lui !
On notera par ailleurs que le désastreux système nerveux de l’homo sapiens n’est pas surpris de constater que les rails de chemin de fer se rejoignent à l’horizon… Et pourtant, personne n’a jamais eu l’idée de les redresser en photo, dans le seul but inutile de recréer artificiellement la réalité géométrique… À méditer !
Conclusion 1 : Apprenons à être vigilants et à traquer les illusions d’optique et préférons parfois la réalité naturellement déformée aux mirages “photoshopiques” reconstruits !
Conclusion 2 : L'avenir de la photo d'architecture réaliste, c'est le drone et la numérisation des bâtiments !
Certaines entreprises (je pense en particulier à Iconem) l’ont vite compris… Mais on sort de la photo et on bascule vers le plan architectural 3D et le déploiement de gros matériels de digitalisation.
Nota : Relire "De pictura" du génie Leon Battista Alberti, maître incontesté de la perspective architecturale et picturale de la Renaissance italienne, et qui a changé le cours de l’histoire de l’art occidental en théorisant, entre autres, en 1436, la notion de point de fuite (ou plutôt “Punto de fuga”)
Ces principes géométriques “Albertiens” ont encore aujourd’hui une influence fondamentale dans notre vision “culturelle” de l’image (perspective conique, avec verticales et point de fuite) et ils nous poussent intuitivement à redresser toutes les verticales…
En Asie, la notion de perspective dans l’art est beaucoup moins présente (voir gravures ottomanes ou estampes japonaises ou chinoises, y compris contemporaines)
Conclusion : Sur ma photo, Alberti aurait donc non seulement redressé les verticales (ce que j’ai fait) mais aussi rendu concentriques les cercles de l’œil de bœuf (ce que la photo ne sait pas faire)
Ce qui a probablement sauvé Alberti du naufrage, c’est qu’il ne connaissait, ni Nikon, ni Photoshop, ni Flickr !
Quelle chance pour lui ! 😄
Perspective corrigée ?
FR : Fronton de l’entrée principale du château de Saint-Germain en Laye (78)
EN: Pediment of the main entrance of the castle of Saint-Germain en Laye (78)
La question du jour : Corriger une perspective architecturale, est-ce vraiment utile, et est-ce bien raisonnable ?
La réponse du jour : Apprenons, d’abord à lire intelligemment une photo d'architecture ! On se fera ensuite sa propre philosophie !
J’ai réalisé cette photo en pensant aux grands maniaques de la photo d’architecture qui expliquent (avec des arguments toujours défendables) que lorsqu’on photographie un bâtiment en contre-plongée (Ce qui est, en général, la position du photographe "normal", c'est à dire les pieds posés au sol, à moins qu’il ne dispose d’un échafaudage ou d'une nacelle pour se placer perpendiculairement et à hauteur des détails architecturaux) il est impératif de redresser les perspectives verticales des photos, soit avec Photoshop (ou équivalent) soit avec un objectif à décentrement…
La seconde solution est un peu plus professionnelle mais aussi bien plus coûteuse (investissement de 1500 à 2000 euros), et ne présente pas un intérêt fondamental pour l’amateur "lambda" (comme moi !) qui ne vend pas ses photos à un architecte, ou à une maison d'éditions. (Et qui ne vend pas ses photos du tout, de surcroît !)
Ici, j’ai donc utilisé un objectif de focale fixe 85 mm, et me suis placé, du mieux possible, sous le fronton, et à peu près dans son axe (et sans doute pas parfaitement, voir verticale gauche !), afin d’éviter les trop fortes distorsions…
Et ensuite, au post-traitement j’ai rectifié (fortement) la verticalité des colonnes avec la fonction "Perspective" de Photoshop
Et bien que voit-on ? Les deux cercles de l’oeil de bœuf (ouverture extérieure et fenêtre encastrée) qui sont parfaitement alignés sur le même axe horizontal dans la réalité architecturale, ne le sont pas sur la photo, puisque situés sur deux plans verticaux distants…
En conséquence, la prise de vue par dessous ne permet nécessairement pas une vision de la réalité, qui devrait montrer des cercles concentriques, alors que la photo les montre sécants.
Tout cela simplement parce que Photoshop ainsi que tous les objectifs à décentrement, même les plus coûteux, “trichent” en agissant sur la déformation en 2D de l'image, mais sont incapables de le faire sur les 3D de l'espace !
Ce qui donne parfois des images étranges…
C'est juste bêtement géométrique et cette photo est une illusion d'optique !
La photo redressée est même moins réaliste que l’originale, avec ses fuyantes convergentes, qui est finalement plus proche de la vision humaine...
Parenthèse: L’œil humain est assez proche d’une optique 50mm, avec un bon post-traitement des contrastes grâce au cerveau, mais il est hélas épouvantablement vigneté ! Donc, si Dieu a créé l’œil, il a un peu raté son coup, car un bon zoom Nikkor est bien meilleur que lui !
On notera par ailleurs que le désastreux système nerveux de l’homo sapiens n’est pas surpris de constater que les rails de chemin de fer se rejoignent à l’horizon… Et pourtant, personne n’a jamais eu l’idée de les redresser en photo, dans le seul but inutile de recréer artificiellement la réalité géométrique… À méditer !
Conclusion 1 : Apprenons à être vigilants et à traquer les illusions d’optique et préférons parfois la réalité naturellement déformée aux mirages “photoshopiques” reconstruits !
Conclusion 2 : L'avenir de la photo d'architecture réaliste, c'est le drone et la numérisation des bâtiments !
Certaines entreprises (je pense en particulier à Iconem) l’ont vite compris… Mais on sort de la photo et on bascule vers le plan architectural 3D et le déploiement de gros matériels de digitalisation.
Nota : Relire "De pictura" du génie Leon Battista Alberti, maître incontesté de la perspective architecturale et picturale de la Renaissance italienne, et qui a changé le cours de l’histoire de l’art occidental en théorisant, entre autres, en 1436, la notion de point de fuite (ou plutôt “Punto de fuga”)
Ces principes géométriques “Albertiens” ont encore aujourd’hui une influence fondamentale dans notre vision “culturelle” de l’image (perspective conique, avec verticales et point de fuite) et ils nous poussent intuitivement à redresser toutes les verticales…
En Asie, la notion de perspective dans l’art est beaucoup moins présente (voir gravures ottomanes ou estampes japonaises ou chinoises, y compris contemporaines)
Conclusion : Sur ma photo, Alberti aurait donc non seulement redressé les verticales (ce que j’ai fait) mais aussi rendu concentriques les cercles de l’œil de bœuf (ce que la photo ne sait pas faire)
Ce qui a probablement sauvé Alberti du naufrage, c’est qu’il ne connaissait, ni Nikon, ni Photoshop, ni Flickr !
Quelle chance pour lui ! 😄