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30 L’extension de Bagnols sur CEZE - CONSTRUCTION CMF
30 GARD Bagnols Sur Ceze Une construction de la CMF @ Le regard sur les opérations de logement collectif à grande échelle en France a changé et il semble bien que certains architectes y aient pris une part active qu’il convient d’évaluer. Né à Bakou en 1913, Georges Candilis gagna la Grèce à douze ans et poursuivit ses études d’architecte-ingénieur à l’École polytechnique d’Athènes de 1932 à 1936. En archi-1945 il obtint une bourse du gouvernement français et se rendit à Paris où il travailla chez André Lurçat puis chez Le Corbusier (de 1946 à 1951) pour qui il suivra, avec Shadrach Woods (Yonkers, N.Y. 1923-New York 1973) le chantier de l’Unité d’Habitation de Marseille. À partir de 1951, Georges Candilis et Shadrach Woods dirigèrent au Maroc le bureau africain de l’ATBAT (Atelier des Bâtisseurs) structure créée en 1947 par Le Corbusier, Vladimir Bodiansky et André Wogensky. Ils se servirent de cet outil de travail pour construire des logements collectifs pour la population musulmane à Casablanca (Carrières Centrales 1953) puis pour la population européenne à Oran (1954-1955) en s’appuyant sur leur expérience et sur des typologies de projets d’architectes constructivistes russes des années 1920. Ces réalisations seront présentées au 9e Congrès des CIAM d’Aix-en-Provence en 1953. Pour Georges Candilis, l’habitat est le lieu de l’universel et du contingent. Habiter c’est répondre, d’une part, aux besoins universels de se réunir et de s’isoler, et, d’autre part, aux conditions particulières du lieu. « Inventer des logements simples, véritablement économiques, qui possèdent la qualité du respect, ce n’était pas de la grande architecture, mais cela représentait autant de difficultés, et demandait plus d’imagination et de sensibilité que de construire des palais »1.
2De retour à Paris en 1955, Georges Candilis et Shadrach Woods s’associent avec l’architecte yougoslave Alexis Josic (Becej, Serbie, 1921). L’équipe propose une réflexion architecturale nouvelle centrée sur l’habitat, proche des recherches sur l’habitat minimal menées par les architectes allemands des années 1920. L’évolution de cette réflexion concerne l’organisation urbaine et en particulier l’intégration du logement dans l’espace public : la continuité urbaine va être inventée ou réinventée jusqu’à la constitution de nappes continues. Cette évolution va amener l’équipe à contester la charte d’Athènes avec le groupe Team X (Alison et Peter Smithson, Jaap Bakema, Aldo van Eyck, Giancarlo de Carlo, Georges Candilis, Alexis Josic, Shadrach Woods…). Avec le concours « Million » (campagne du gouvernement français pour susciter la production massive de logements à bon marché) dont ils sont lauréats, l’équipe Candilis-Josic-Woods élabore des modèles standards applicables à la solution du problème posé en évitant les défauts de la production de masse du logement, à savoir uniformité, répétition et alignement. Après la construction de près de 3 000 logements en région parisienne : logements collectifs à Ivry, Cité Emmaüs à Blanc-Mesnil (1955-1957), Bobigny (1956-1962) et Gennevilliers (1955-1956) l’équipe est chargée du projet d’extension de la ville de Bagnols-sur-Cèze. La diversité des types d’habitation et la qualité de l’articulation recherchée avec la ville ancienne vaudra à cette réalisation le Grand Prix National d’Urbanisme en 1959. Dans le même temps, l’équipe construira deux opérations à Nîmes, l’ensemble Tour de l’Évêque et Clos d’Orville (1958-1964).
3Quelques données sur l’opération de Bagnols-sur-Cèze : le maître d’ouvrage est l’Office Départemental d’HLM du Gard et la Société d’Économie Mixte de Bagnols-sur-Cèze (SEMIB), les architectes sont Georges Candilis, Alexis Josic, Shadrach Woods associés à Paul Dony, architecte-ingénieur et Henri Piot, Ingénieur conseil, J.-P. Agniel, J. Devèze, M. Chausse, sont les architectes d’opération. L’urbaniste en chef est Raymond Coquerel, l’urbaniste régional est Charles Delfante. Pour les entreprises, on trouve : La Construction Moderne Française, CMF (Chamarande, Essonne), béton armé : Société des Grands travaux Métropolitains, planchers : Association Thermique Industrielle et Commerciale, chauffage : Entreprise A.D Mischler SARL (Besançon), Entreprise Poumerol (Nîmes).
Les conditions de la commande
4Le début de la construction en 1954 de la première usine de production d’énergie nucléaire de la rive droite du Rhône à Marcoule (Gard) posait la question de l’habitat des nombreux ouvriers, techniciens et cadres amenés à travailler sur le site. Le Commissariat à l’Énergie Atomique (CEA) et le Ministère de la Construction décidèrent la création d’un « véritable et nouveau centre urbain » sur la commune de Bagnols-sur-Cèze, à une dizaine de kilomètres de Marcoule qui voit sa population passer de 5 000 habitants (en 1956) à plus de 18 000 habitants. Bagnols-sur-Cèze est une ville romaine située sur un carrefour de la route Nîmes-Lyon, c’est une cité médiévale fortifiée, une ville d’eaux et de bains. C’est un carrefour routier important et également le centre commercial et administratif d’une région agricole (vins, légumes, fruits).
Figure 1 – Schéma indiquant les caractéristiques du site de Bagnols-sur-Cèze
Figure 1 – Schéma indiquant les caractéristiques du site de Bagnols-sur-Cèze
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Tiré de : Oscar Newman New Frontiers in Architecture, Krämer Verlag, Stuttgart, 1961, p. 122. (Archives famille Candilis).
5En 1956, Auguste Mionne, directeur de l’entreprise CMF est mandaté par le CEA pour la construction de logements pour les ouvriers, cadres et techniciens amenés à travailler à Marcoule. Il contacte Georges Candilis (qu’il connaît depuis la construction de l’Unité d’Habitation de Le Corbusier à Marseille) et lui demande dans un premier temps de construire 80 logements en six mois.
Le site
6La topographie et le climat avec les crues de la Cèze et le mistral au nord, la route nationale à l’ouest et la voie ferrée à l’est ont pratiquement imposé l’extension de la ville vers le sud.
Figure 2 – Schémas et axonométrie de l’extension de la ville au sud
Figure 2 – Schémas et axonométrie de l’extension de la ville au sud
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Tiré de : Oscar Newman, New Frontiers in Architecture, p. 120.
2 Candilis G., ibid, p. 214.
7À cela sont venues s’ajouter des données plus précises sur la nature des terrains disponibles, augmentées des principes de préservation des traces historiques du paysage : arbres, anciens puits, ancienne muraille, un théâtre de plein air et le vallonnement naturel, « la présence des vestiges d’un ancien théâtre romain nous incita à favoriser cette percée nouvelle vers le sud. C’est dans cette direction que nous avons envisagé les prolongements de la cité »2.
La composition
3 Voir la brochure Urbanisme en France du Ministère de la Construction « Bagnols-sur-Cèze ».
8Le premier acte a été la création d’un élément de liaison entre la vieille ville et la nouvelle : il fallait éviter la ségrégation entre anciens habitants et nouveaux arrivants en réservant une proportion de nouveaux logements pour les Bagnolais d’origine et en positionnant le centre commercial et le centre culturel à la croisée des deux villes. La nouvelle ville a été directement inspirée de l’ancienne, ainsi les rues ne sont pas à angle droit et les unités de logements projetées forment des redents évitant ainsi l’alignement en ligne droite. De même, trois points dominent Bagnols-sur-Cèze et servent de repères : une tour romane et deux clochers gothiques. L’extension nouvelle reprend « en contrepoint le thème de ces trois pôles et implante résolument parmi des bâtiments de un ou cinq niveaux, six (deux fois trois) tours de quinze niveaux »3. Cette disposition qui offre de nombreuses variations de perspectives et la diversité des logements bénéficiant d’une double orientation font de cette opération un exemple qui obtiendra le prix national d’urbanisme en 1959.
9Il convient de distinguer quatre entités :
le Quartier de la Coronnelle est le premier quartier réalisé dans l’urgence ;
le Quartier de la Citadelle qui comprend 370 logements, un centre commercial et une école de quartier, construits en onze mois, période permettant l’étude de l’extension de la ville ;
le Quartier des Escanaux, qui constitue la principale extension de la ville avec la construction de 1 200 logements ;
la cité-jardin « Le Bosquet » est un ensemble de 30 villas réservées aux ingénieurs supérieurs de l’Énergie Atomique.
Figure 3 – Superposition photographie aérienne / plan de masse
Figure 3 – Superposition photographie aérienne / plan de masse
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Tiré de AA, no 91-92, Panorama 1960, septembre-novembre 1960.
Figure 4 – Plan de masse de l’extension de Bagnols-sur-Cèze
Figure 4 – Plan de masse de l’extension de Bagnols-sur-Cèze
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Tiré de AA, no 91-92, Panorama 1960, septembre-novembre 1960.
4 Newman O., New Frontiers in Architecture, op. cit.
10Cette opération est très remarquée lors de sa réalisation, largement publiée en France et la plupart des documents présentés dans cet article sont issus de la publication d’Oscar Newman4 au Congrès CIAM 59 à Otterlo où Georges Candilis présenta cette opération en cours de construction.
Le programme du Quartier des Escanaux
Figure 5 – Plans et élévations des tours du quartier des Escanaux à Bagnols-sur-Cèze
Figure 5 – Plans et élévations des tours du quartier des Escanaux à Bagnols-sur-Cèze
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Tiré de : Oscar Newman New Frontiers in Architecture, p. 127.
11Il s’agit de construire la principale extension de la ville de Bagnols-sur-Cèze avec plus de 1 200 logements environ, accompagnée de la construction d’un centre scolaire, d’un centre sportif (stade, gymnase, piscine), d’un centre culturel (théâtre, cinéma, concert, exposition, salle de réunions), d’un centre commercial (place, magasin, marché) et de commerces avec l’équipement complet de la nouvelle ville en réseaux (égouts, gaz, électricité).
12Pour les logements deux volumétries structurent le plan de masse : des immeubles bas (R+4) à redents et six tours de R+14 avec la prise en compte des normes (primes Logecos, HLM A et 😎. Des séries de types d’immeubles différents par leurs orientations mais avec les mêmes caractéristiques de conception s’articulent pour créer des micro-ensembles autour d’un ancien parc privé qui a été préservé constituant l’espace vert central. Le quartier des Escanaux est construit juste après La Citadelle et avant la Cité Jardin du Bosquet. Sa réalisation s’échelonne entre 1956 et 1962. L’utilisation des équipements et la mixité de population s’avèrent un succès dès 1964. L’office départemental des HLM du Gard est toujours propriétaire des logements depuis la construction du quartier. Il n’y a pas eu de modifications des logements, cependant des travaux de maintenance et d’entretien vont avoir des conséquences sur l’architecture comme le changement de la chaudière collective qui passe du fioul au gaz et l’isolation par l’extérieur des tours en 1980. Dix années plus tard, en 1990, est lancée une campagne de réhabilitation lourde avec changement des menuiseries extérieures en bois pour des menuiseries PVC, la suppression des petits balcons et des séchoirs au profit de l’agrandissement des cuisines ainsi que la suppression des vide-ordures. Puis, en 1998, des travaux sont engagés sur certains espaces extérieurs et partiellement sur les VRD. Des subventions sont obtenues par un montage avec 66 % à la charge de l’office départemental des HLM du Gard (propriétaire des espaces verts) et 33 % à la charge de la municipalité de Bagnols-sur-Cèze. En contrepartie, les espaces verts sont rétrocédés à la municipalité par convention. Il n’y a pas eu de prise en compte globale du patrimoine immobilier et architectural mais des réhabilitations ponctuelles par divers architectes locaux : Jean-Louis Fulcrand (Nîmes), Patrick Lecourbe (Bagnols-sur-Cèze) ou Jean Malliet (Uzès), la politique d’intervention dépendant essentiellement des orientations de l’office départemental des HLM du Gard dont les responsables successifs n’ont pas eu conscience de la valeur d’exemple de l’opération. Plusieurs enquêtes sociologiques axées sur les données démographiques et les mouvements de population ont été menées depuis la construction jusqu’à nos jours. Des propositions ont été faites notamment dans le cadre de l’opération Banlieues 89 qui souhaitaient consolider le lien entre centre ancien et ville nouvelle et plus récemment sur les espaces extérieurs dans le même dessein par une équipe dirigée par le paysagiste Alain Marguerit dans les années 1990, sans résultat.
Figure 6 a et b – Photographies montrant l’opération en construction
Figure 6 a et b – Photographies montrant l’opération en construction
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Tiré de : Oscar Newman New Frontiers in Architecture, p. 124.
Analyse du projet originel
Les influences de l’équipe menée par Georges Candilis sur le programme
13L’équipe proposa pour le quartier des Escanaux un plan de masse sur une trame sensiblement orthogonale qui articule des immeubles bas (R+4) à redents et des tours de quatorze étages. Deux lignes « bordent » la composition à partir desquelles se développent parallèlement ou perpendiculairement les immeubles bas. Chaque ligne contient trois tours. Comme le montrent les photographies de la maquette ou de la réalisation, cette disposition donne une échelle différente de celle des « grands ensembles » en rompant l’uniformité et en donnant un caractère spécifique à chaque sous-ensemble, le centre étant occupé par le vide que constitue le stade.
Figure 7 – Photographies montrant l’opération réalisée
Figure 7 – Photographies montrant l’opération réalisée
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Tiré de AA, no 91-92, Panorama 1960, septembre-novembre 1960.
5 Monnier G. (dir.), L’architecture moderne en France, tome 2. Du chaos à la croissance. 1940-1966, (...)
14Il n’y a aucune analogie urbaine avec la ville ancienne et la liaison avec cette dernière est produite par une place qui sert de parking et certains jours de marché. Cette opération, avec celles du Blanc-Mesnil (1955-1957) et de Bobigny (1957-1962) « témoignent d’un intérêt nouveau pour la notion de continuité »5 et constitue une étape dans la réflexion de l’équipe Candilis-Josic-Woods sur la forme urbaine et les modes d’assemblages, amorçant les recherches ultérieures sur les notions de « stem » et de « web » développées dans les réponses aux concours des années qui vont suivrent.
Figure 8 – Photographies montrant l’opération réalisée avec la piscine, le stade et le centre culturel
Figure 8 – Photographies montrant l’opération réalisée avec la piscine, le stade et le centre culturel
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Tiré de : « La vie de la construction moderne française », no 7, 1965, Fonds 236 IFA : Candilis Georges.
Les typologies de logements
15Avec Sadrach Woods et Alexis Josic, Georges Candilis tente de transcrire dans des typologies modernes les qualités fonctionnelles d’un « habitat méditerranéen » sur lequel ils ont déjà travaillé, notamment au Maroc, à Casablanca avec les immeubles Sémiramis et Nid d’Abeilles où l’espace du logement, principalement traversant, se prolonge à l’extérieur avec loggia, balcon ou terrasse séchoir permettant d’éclairer les salles de bains. Ainsi pour le quartier des Escanaux les ensembles d’immeubles de logements à cinq niveaux sont organisés par assemblage dont l’articulation est l’escalier autour duquel sont constitués symétriquement les logements.
6 Bois Y.-A., « L’idée De Stijl », dans collectif, De Stijl et l’architecture en France, Bruxelles, (...)
7 Colli L. M., « Vers une polychromie architecturale », 1987, Le Corbusier une encyclopédie, Paris, (...)
16Les espaces communs sont réduits au minimum. La trame porteuse est constituée de voiles de béton de 18 cm d’épaisseur disposés tous les trois mètres. On trouve deux logements par niveau, organisés autour de la chaudière située au centre de chaque logement. L’organisation intérieure des 3/4 pièces, 4 pièces, 5 pièces et 6 pièces tous traversants reprend les critères énoncés ci-dessus. Il est à noter que ces logements sont destinés aux ouvriers. Sur les façades de ces immeubles on observe une polychromie sur certains panneaux avec des couleurs primaires : bleu outremer, ocre rouge et ocre jaune. Cette utilisation par panneaux rejoint sur certains points les recherches du groupe De Stijl6 et en particulier les compositions de Piet Mondrian mais aussi la polychromie architecturale de Le Corbusier7.
Figure 9 – Photographies montrant une tour aujourd’hui réhabilitée
Figure 9 – Photographies montrant une tour aujourd’hui réhabilitée
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Cliché Laurent Duport.
17En ce qui concerne les tours, les typologies sont plus variées, on observe :
18La typologie en « hélice » héritée de l’immeuble-tour d’Ivry conçu par l’équipe pour :
la Tour des célibataires : 14 étages, 104 logements de 1 et 2 pièces ;
la Tour de 104 logements HLM A de 2 et 3 pièces avec 7 logements par niveau ;
la typologie en 2 bandes parallèles séparées par la circulation verticale ;
deux tours de 14 étages avec 87 logements HLM B avec 6 logements par niveau du 2 pièces au 5 pièces dont 4 à double orientation8.
19Le modèle compact :
9 Voir façades et plan en annexe.
20- deux tours de 14 étages9, les logements des tours étant destinés aux techniciens supérieurs. Le quartier des Escanaux constitue la grande réussite de l’opération, les logements de la Citadelle étant aujourd’hui pour la plupart vacants et les villas de la cité-jardin du Bosquet présentant un taux d’occupation en constante diminution.
Analyse d’un projet de transformation, La réhabilitation de Jean-Louis Fulcrand
10 Il s’agit des opérations du Clos d’Orville et Tour de l’Évêque.
21L’architecte Jean-Louis Fulcrand, à l’issue d’un concours en loge organisé par l’OPDHLM, obtint la commande de la réhabilitation de 47 logements. Il s’agit, avec un budget limité autour de 65 000 francs (10 000 euros) par logement, d’intervenir sur ces logements selon cinq points : la mise aux normes des réseaux d’électricité et de ventilation, l’installation d’un chauffage individuel au gaz, le remplacement des menuiseries extérieures, l’isolation des façades par l’extérieur et l’amélioration des halls et des cages d’escalier. Jean-Louis Fulcrand connaît la valeur architecturale de l’opération de Bagnols-sur-Cèze et l’obtention du Grand Prix d’Urbanisme. Selon lui il y a des opérations de Georges Candilis à Nîmes10 qui sont plus réussies. Il est cependant très attentif à cette architecture qu’il respecte et il va chercher à obtenir des renseignements auprès d’un des architectes d’opération et se procurer les plans et façades auprès de l’OPDHLM. Ceci est d’autant plus important que l’immeuble sur lequel il doit intervenir se situe en limite du centre-ville, sur un côté de la place qui constitue à la fois la liaison et l’entrée du quartier des Escanaux.
Figures 10 et 11 – Photographies montrant les immeubles bas (R+4) aujourd’hui réhabilités
Figures 10 et 11 – Photographies montrant les immeubles bas (R+4) aujourd’hui réhabilités
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Photo de l’auteur Laurent Duport.
Figure 12 – Élévations sud et nord de l’immeuble Carcaixent Les Escanaux à Bagnols-sur-Cèze
Figure 12 – Élévations sud et nord de l’immeuble Carcaixent Les Escanaux à Bagnols-sur-Cèze
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(Doc. Permis de construire). Source : OPDHLM du Gard.
Figure 13 – Élévations sud et nord de l’immeuble Carcaixent. Les Escanaux à Bagnols-sur-Cèze
Figure 13 – Élévations sud et nord de l’immeuble Carcaixent. Les Escanaux à Bagnols-sur-Cèze
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(Doc. Permis de construire de la réhabilitation). Source : Jean-Louis Fulcrand architecte.
11 Interview de Jean-Louis Fulcrand, Nîmes le 14.03.2002.
22Dans l’ensemble l’opération des Escanaux fonctionne bien selon lui. Il n’y a pas de problèmes sociaux dans le quartier où sont logés essentiellement des employés du CEA qui sont là, pour la plupart, depuis le début. Cependant l’opération a selon lui mangé la ville et il regrette qu’il n’y ait pas de prise en compte globale du projet de Candilis par la Maîtrise d’Ouvrage, ni de réflexions et de décisions sur les espaces extérieurs. La Maîtrise d’Ouvrage n’a pas proposé de solutions pour gérer l’ensemble ou faire évoluer le patrimoine (comme des cessions de logements aux locataires souhaitant devenir propriétaires par exemple). De plus il n’y a pas de prise de conscience de l’unité architecturale d’ensemble et il y a eu beaucoup d’erreurs dans les diverses réhabilitations. « L’Office a raté l’occasion d’engager un travail global, elle a perdu la force du travail de Candilis »11.
23Concernant l’immeuble qu’il a réhabilité, il insiste sur la bonne conception des appartements qui sont fonctionnels, à double orientation et de bonnes dimensions. Il n’y a d’ailleurs pas de demandes de modifications, si ce n’est le vitrage des loggias. La composition en façade lui paraît réussie dans la mesure où elle donne à voir à l’extérieur la typologie des logements. Selon lui c’est une manière moderne de traiter les façades avec des jeux d’aplats de couleurs, les ouvertures et les lignes marquées par les nez de dalles. Mais cette polychromie est pour lui anecdotique. L’alternance des ouvertures en façades permet de s’affranchir des questions de réglementations incendie (C+D) en conservant des allèges vitrées. Cependant les parties communes (halls, cages d’escalier) sont trop petites, mal éclairées, inconfortables (vent), du fait de leur orientation au nord. L’immeuble a donc besoin d’une mise aux normes et d’un rafraîchissement des peintures. Au moment du concours Jean-Louis Fulcrand proposait d’intervenir sur les parties communes, offrant de la générosité dans les espaces collectifs en éclairant les cages d’escalier par des restructurations importantes, en sacrifiant par exemple un logement pour agrandir les paliers et créer des espaces éclairés naturellement, propice aux rencontres. Mais les financements n’autoriseront qu’un travail beaucoup plus modeste. L’architecte va minimiser les interventions en façade avec une isolation par l’extérieur des façades nord, est et ouest. La façade sud plus intéressante en ce qui concerne les modénatures (lignes formées par les nez de dalles, ouvertures, polychromie…) ne sera pas isolée.
12 Voir planche photographique de détail.
13 Modèle PVC à lames orientables type Llambi, voir détail en annexe.
14 Voir façades avant/après.
15 Voir détail en annexe.
24Il choisit une couleur unique le blanc en référence à la Méditerranée, simple et neutre. Pour lui la couleur doit provenir de l’intérieur12. Il transpose une logique par niveau et à chaque étage il applique une couleur sur les cages d’escalier, les portes palières, les radiateurs, les portes de placards et les murs intérieurs des loggias. Sur la façade nord, les entrées sont marquées par un rectangle de couleur bleue. La fermeture des loggias constituait une forte demande de la part des locataires. Jean-Louis Fulcrand a proposé de les fermer avec des persiennes orientables13, plus respectueuses de l’architecture et plus performantes en termes de confort thermique. Seuls les grands appartements en ont bénéficié, toutes les autres loggias ont été fermées par des châssis coulissants14. Les autres travaux ont concerné la mise aux normes des réseaux d’électricité et de ventilation, l’installation d’un chauffage individuel au gaz, le remplacement des menuiseries extérieures15, l’amélioration des halls par la pose de faïence sur les murs et la peinture des cages d’escaliers.
Figure 14 – Photographies de l’immeuble Carcaixent Les Escanaux à Bagnols-sur-Cèze réhabilité
Figure 14 – Photographies de l’immeuble Carcaixent Les Escanaux à Bagnols-sur-Cèze réhabilité
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Photo de l’auteur Laurent Duport.
16 Alison Smithson Team 10 Meetings : 1953-1984, New York, Rizzoli, 1991.
17 Document Fondation Le Corbusier.
18 Taylor B.B., « Team 10+20 », L’Architecture d’Aujourd’hui, no 177, janvier-février 1975. 1 ; CANDI (...)
25Enfin et surtout, la ville de Bagnols-sur-Cèze fut le lieu d’une des toutes premières réunions du Team X organisée par Georges Candilis en août 1960 comme en témoignent des photographies16 et une carte postale envoyée par les nombreux participants à Le Corbusier17. Cela montre avec force que ces réunions du Team X « [où] l’ambiance de confrontation critique sur des œuvres et des thèmes contemporains (…) qui contribua à troubler l’euphorie des CIAM d’après-guerre »18 méritent une actualisation et de nouveaux points de vue.
BIBLIOGRAPHIE
Bibliographie
Documents
Fonds 236 IFA : Candilis Georges (1913-1995).
CANGE/E/56/2 : 1956-1962. Quartier « Les Escanaux », Bagnols-sur-Cèze.
Carnet de détail menuiseries et persiennes, source Jean Louis Fulcrand.
« Les cimaises de l’architecte », document du Fonds Candilis, IFA.
Lettre du Ministère de la Construction datée du 13 juin 1960, Fonds Candilis, IFA.
Planche photographique de la réalisation, source Jean-Louis Fulcrand :
Façades Nord et Sud, avant/après, sources : archives de l’OPDHLM du Gard et Jean-Louis Fulcrand.
Plans d’un niveau, Tour des célibataires, source : Immeuble-tour à Evry AA no 74, novembre 1957, plans d’un niveau, tour plan en hélice et plan en H, source : AA no 80, octobre 1958, plan et façades immeuble tour de 14 étages, source : Fonds Candilis, IFA.
« Urbanisme en France » du Ministère de la Construction « Bagnols-sur-Cèze », document du Fonds Candilis, IFA.
Dessins et photographies
Diverses vues du Quartier des Escanaux, photographies couleur, source : La vie de la construction moderne française, no 7, 1965 et AA, no 91-92, Panorama 1960, septembre-novembre 1960.
« La tour des célibataires », photographies couleur & Noir et Blanc, source : La vie de la construction moderne française, no 7, 1965.
Plan de masse, dessins, sources : AA, no 80, octobre 1958 et AA, no 91-92, Panorama 1960, septembre-novembre 1960.
Plan de masse, superposition sur photographie aérienne, source : Fonds G. Candilis, IFA.
Ouvrages généraux
Benevolo Léonardo, Histoire de l’architecture moderne. Les conflits de l’après-guerre, Paris, Bordas, 1980.
Bois Yves-Alain, « L’idée De Stijl », dans collectif, De Stijl et l’architecture en France, Bruxelles, Pierre Mardaga, 1985.
Candilis Georges, Bâtir la vie, un architecte témoin de son temps, Paris, Stock, 1977.
Candilis Georges, Josic Alexis, Woods Shadrach, « Continuité de la recherche » dans Le Livre d’Or de l’architecture et de l’urbanisme, Paris, L’Inconnu, 1966.
Candilis Georges, Josic Alexis, Woods Shadrach, Une décennie d’architecture, Paris, Eyrolles, 1968.
Colli Luisa Martina « Vers une polychromie architecturale », dans Le Corbusier une encyclopédie, Paris, Éd. centre G. Pompidou, 1987.
Lucan Jacques, France Architecture. 1965-1988, Milan, Electa, 1989.
Lucan Jacques, Architecture en France. 1940-2000, Paris, Le Moniteur, 2001.
Monnier Gérard (dir.), L’architecture moderne en France, tome 2. Du chaos à la croissance. 1940-1966, Joseph Abram, Paris, Picard, 1999.
Newman Oscar, New Frontiers in Architecture, Stuttgart, Krämer Verlag, 1961.
Revues
Architecture d’Aujourd’hui (AA), no 74, novembre 1957 (Immeuble-tour à 4 branches à Ivry).
AA, no 80, octobre-novembre 1958.
AA, no 91-92, Panorama 1960, septembre-novembre 1960, p. 124-127.
AA, no 116, septembre-novembre 1964.
AA, no 144, juillet 1969.
AA, no 177, Team 10+20, janvier-février 1975, p. 44.
AMC, no 11, 1950-1980, Trente ans d’architecture française, avril 1986, p. 2.
La vie de la construction moderne française, no 7, 1965.
NOTES
1 Candilis G., Bâtir la vie, un architecte témoin de son temps, Paris, Stock, 1977, p. 185.
2 Candilis G., ibid, p. 214.
3 Voir la brochure Urbanisme en France du Ministère de la Construction « Bagnols-sur-Cèze ».
4 Newman O., New Frontiers in Architecture, op. cit.
5 Monnier G. (dir.), L’architecture moderne en France, tome 2. Du chaos à la croissance. 1940-1966, Joseph Abram, Paris, Picard, 1999, p. 109.
6 Bois Y.-A., « L’idée De Stijl », dans collectif, De Stijl et l’architecture en France, Bruxelles, Pierre Mardaga, 1985, p. 16.
7 Colli L. M., « Vers une polychromie architecturale », 1987, Le Corbusier une encyclopédie, Paris, Éd. centre G. Pompidou, 1987, p. 107.
8 Voir plan en annexe.
9 Voir façades et plan en annexe.
10 Il s’agit des opérations du Clos d’Orville et Tour de l’Évêque.
11 Interview de Jean-Louis Fulcrand, Nîmes le 14.03.2002.
12 Voir planche photographique de détail.
13 Modèle PVC à lames orientables type Llambi, voir détail en annexe.
14 Voir façades avant/après.
15 Voir détail en annexe.
16 Alison Smithson Team 10 Meetings : 1953-1984, New York, Rizzoli, 1991.
17 Document Fondation Le Corbusier.
18 Taylor B.B., « Team 10+20 », L’Architecture d’Aujourd’hui, no 177, janvier-février 1975. 1 ; CANDILIS G., Bâtir la vie, un architecte témoin de son temps, Paris, Stock, 1977, p. 185.
L’extension de Bagnols-sur-Cèze Les Escanaux @ L’opération n’est pas banale : une ville qui va voir tripler sa population par l’implantation d’un nouveau centre urbain à construire et une cité romaine à préserver. Nous sommes en 1956 et Georges Candilis est contacté par Auguste Mionne1 le directeur de la Construction Moderne française, mandaté par le Commissariat à l’énergie atomique pour la construction de logements pour les ouvriers, cadres et techniciens supérieurs qui vont travailler à Marcoule où vient d’être édifié l’un des premiers sites nucléaires de France. Ce dernier a vu le jeune Candilis à l’œuvre quelques années plus tôt, quand Le Corbusier lui faisait suivre à Marseille le chantier de l’Unité d’habitation.
2 Georges Candilis est contacté en 1956 par Auguste Mionne, directeur de la Construction Moderne Fran (...)
3 Bagnols-sur-Cèze est une ville romaine située sur un carrefour de la route Nîmes – Lyon.
2C’est ce défi urbain qui vaudra quatre ans plus tard le premier grand prix national d’urbanisme à Georges Candilis, Alexis Josic et Shadrach Woods2 associés aux urbanistes Raymond Coquerel et Charles Delfante. La tâche qui s’annonce à Bagnols-Sur-Cèze est ardue [ill. 1]. L’équipe va devoir donner forme aux attentes d’une maîtrise d’ouvrage constituée d’une des premières sociétés d’économie mixte, la SEMIB, de l’office HLM du Gard et de la municipalité de Bagnols-sur-Cèze qui veut voir s’élever au final quelques 1 500 logements aux côtés d’une ville médiévale Quant aux « contraintes » du site, elles sont nombreuses avec le Mistral au Nord, les crues de la Cèze, une topographie capricieuse à proximité d’un bourg marqué par ses rues étroites et sinueuses...
4 ATBAT, Atelier des Batisseurs.
4Il faudra aux architectes toute l’expérience accumulée depuis plusieurs années pour répondre à ce programme. Heureusement, de l’expérience ils n’en manquent pas. Celle acquise à l’ATBAT4 par Georges Candilis et Shadrach Woods en construisant des logements « dignes » pour différents types de population (européennes, musulmanes, israélites) notamment au Maroc leur sera précieuse. Ils y ont expérimenté des assemblages astucieux sur quatre ou cinq niveaux, y ont compris comment densifier intelligemment, ont appris à construire en tenant compte d’une culture locale et savent varier leurs propositions. L’immeuble « nid d’abeilles » aux superpositions simples et idéalement éclairées puis l’immeuble « Sémiramis » partagé en deux pour suivre la topographie ont rompu les architectes à ce genre de problématiques [ill. 2]. À cela s’ajoute l’expérience du concours dont ils sont lauréats en 1955 avec Alexis Josic qui les a rejoints. L’équipe propose une réflexion architecturale avec l’opération Million, campagne du gouvernement français pour abaisser le coût de construction d’un logement de 3 pièces de 1,5 à 1 million de francs de l’époque en élaborant des modèles standards applicables immédiatement.
5Ainsi vont être construits près de 3 000 logements en région parisienne : logements collectifs à Ivry, Cité Emmaüs au Blanc-Mesnil (1955-1957), à Bobigny (1956-1962) et Gennevilliers (1955-1956) ainsi que l’extension de la Ville de Bagnols-sur-Cèze.
6Cette extension est constituée de quatre entités. Une opération parmi celles-ci a principalement marqué les esprits, c’est bien évidemment la construction du quartier des Escanaux. Avant cette phase, Candilis, Josic et Woods ont dû urgemment construire le quartier de la Coronelle (80 logements) puis le quartier de la Citadelle (370 logements, un centre commercial et une école de quartier construits en onze mois). La dernière entité sera un ensemble de 30 villas dans la cité-jardin « Le Bosquet ». Au milieu de ces trois opérations, on trouve « les Escanaux » et la parfaite mise en application des principes de l’équipe. Ce quartier constitue la principale extension de Bagnols-Sur-Cèze. Au total, ce sont 1 200 logements, un centre scolaire, un centre sportif (stade, gymnase, piscine) un centre culturel (théâtre, cinéma, salle de concert, espace d’exposition, salle de réunions), un centre commercial (place, magasin, marché), des commerces et des équipements. C’est un nouveau morceau de ville, auquel il faut donner tout ce dont il a besoin pour vivre harmonieusement.
8Les Escanaux n’ayant jamais fait l’objet d’une prise en compte globale de son patrimoine, il faut faire preuve d’imagination pour avoir conscience de la valeur d’exemple de l’opération. Pourtant cela en vaut la peine et l’analyse du projet originel nous livre aujourd’hui encore de précieux enseignements [ill. 3].
9Prenons de la hauteur et survolons l’Unité de voisinage des Escanaux : un plan orthogonal, des immeubles bas en R + 4 et des tours de 14 étages. Présenté de cette manière, on imagine une cité comme il en existe partout. Pourtant, et c’est là la force de Candillis, Josic et Woods, on ne ressent pas les défauts de la production de masse. C’est que l’articulation est loin d’être banale. Tout d’abord, il y a du rythme : on trouve six types d’immeubles différents avec notamment les immeubles bas à redents qui rompent l’uniformité en dessinant des angles. À cela se conjugue l’alignement fluide des six tours suivant deux axes qui bordent la composition. Ainsi l’extension de Bagnols-Sur-Cèze fait déjà apparaître les prémices du stem – ce « centre linéaire d’activité » qui sera la marque du trio – et donne à voir un développement équilibré qui alterne harmonieusement parallélisme et perpendicularité suivant une ligne continue. Cette disposition donne une échelle différente de celle des « grands ensembles » en donnant un caractère spécifique à chaque sous-ensemble, le centre étant occupé par le vide que constitue le stade. Cette opération, « témoigne d’un intérêt nouveau pour la notion de continuité »5 comme le souligne Joseph Abram.
11Approchons-nous à présent des logements et considérons leur typologie. L’expérience de Casablanca trouve un écho méditerranéen dans cette architecture fonctionnelle et idéalement éclairée. Commençons par les immeubles bas destinés aux ouvriers : chaque niveau qui comprend deux logements s’assemble et s’articule autour d’un escalier, les espaces communs sont réduits au minimum et des voiles de béton de 18 cm d’épaisseur disposés tous les trois mètres, constituent la trame porteuse. Poussons la porte : l’espace y est privilégié et les appartements « traversants » s’étendent vers les loggias, balcons et terrasses séchoirs qui apportent la lumière jusque dans les salles de bain. Les façades quant à elles évoquent Piet Mondrian et ses grands aplats de couleur primaire. Ces panneaux polychromes, dont la conception revient à Alexis Josic, qui s’offrent au regard, ne sont pas sans rappeler les jeux de couleur qui ponctuent l’architecture de Le Corbusier. Les tours proposent quant à elles plusieurs typologies avec deux tours à quatre branches en « svastika » pour célibataires et couples avec un enfant, deux tours de grands logements plus compactes et deux tours à deux branches ou « tours jumelles » [ill. 4].
6 La Construction Moderne Française fascicule, 1965, CAP Fonds Candilis.
12La réception de cette opération est quasiment sans précédent avec des publications dans L’Architecture d’Aujourd’hui à de nombreuses reprises ainsi que dans Architectural Design. La Construction Moderne Française [ill. 5] publie elle aussi un fascicule qui vante les mérites de l’opération avec des photos de la réalisation et dans laquelle Georges Candilis rappelle que « le plan est la conséquence d’une étude extrêmement minutieuse pour arriver au maximum d’économie et au maximum d’habitabilité »6. De nombreuses photos sont prises pendant le chantier. Mais c’est surtout l’occasion pour l’équipe et en particulier pour Georges Candilis de montrer cette opération en train de se construire au 10e et dernier congrès des CIAM à Otterlo en 1959. Il retrouve là le rôle qu’il avait déjà joué à la présentation de l’Unité d’habitation, à la demande de Le Corbusier, au 7e congrès des CIAM à Bergame en 1949, soit dix années auparavant.
13En 1960, le Ministère de la Reconstruction et de l’Urbanisme célèbre au CNIT l’exposition qui montre les opérations de logements réalisées par l’État dans le cadre du développement industriel du territoire. C’est à cette occasion que l’opération, dont on peut voir la maquette sur le stand de l’office HLM du Gard, obtient le premier grand prix d’urbanisme décerné en France [ill. 6].
7 Team Ten est la réunion de plusieurs architectes en réaction aux CIAM.
14Ainsi Bagnols-Sur-Cèze, par ce projet d’extension, devient la ville où la concrétisation du projet s’apprête à bouleverser les idées en place. C’est en effet dans cette ville du Gard qu’aura lieu la première réunion de Team Ten en 19607, organisée par Candilis. Les participants y débattent, s’y prennent en photo, envoient une carte postale à Le Corbusier et continuent les discussions entamées à Otterlo l’année précédente. Cette réunion qui a lieu du 25 au 30 juillet 1960 réunit une vingtaine d’architectes incluant outre le trio Candilis/Josic/Woods les architectes Giancarlo de Carlo, Aldo Van Eyck, Alison & Peter Smithson, Jaap Bakema mais aussi Fuhimiko Maki, Juan Busquets, Oskar Hansen et Ralph Erskine. C’est la première réunion d’une série de 12 qui se terminera en 1977 à Bonnieux, la maison de campagne de Candilis.
15À l’unité de voisinage des Escanaux l’utilisation des équipements et la mixité de population s’avère un succès dès 1964. L’office départemental des HLM du Gard est toujours propriétaire des logements depuis la construction du quartier, en charge de son entretien et de sa maintenance. Vingt-cinq ans après sa construction un nouveau regard est porté sur les Escanaux dans le cadre de l’opération Banlieues 89. Ainsi sous la mandature de Georges Benedetti en 1984, parmi les 220 présentés un projet est proposé dans la thématique – réparer – qui prévoyait de « construire parmi les tours et les barres et les espaces verts : organiser un lieu plus urbain », il est abandonné en 1985 et ne sera donc jamais subventionné.
16Aujourd’hui, il n’est pas évident de saisir la qualité de cette opération réalisée entre 1956 et 1962.
17Sans compter que les réhabilitations ou plus exactement les interventions successives n’ont pas su prendre en compte le patrimoine que représentaient les Escanaux. Cependant aucun immeuble ne sera détruit en 50 ans, un équipement (grande salle) viendra compléter le quartier. Il n’y a pas eu de modifications de l’intérieur des logements, mais des travaux de maintenance et d’entretien vont avoir des conséquences sur l’architecture comme le changement de la chaudière collective qui passe du fioul au gaz et l’isolation par l’extérieur des six tours en 1980. Une vêture est apposée sur les façades entraînant la perte de la force plastique et l’effacement des couleurs initiales, rendant les tours méconnaissables. Les mêmes interventions produiront les mêmes effets sur la tour à quatre branches du Clos d’Orville à Nîmes. Dix années plus tard, en 1990, est lancée une campagne de réhabilitation lourde avec changement des menuiseries extérieures en bois pour des menuiseries PVC plus épaisses et monochromes. Ceci a accompagné le nivellement des façades par l’ablation des balcons et séchoirs au profit de l’agrandissement des cuisines ainsi que la suppression des vide-ordures inutilisés. Puis en 1998 des travaux sont engagés sur certains espaces extérieurs et partiellement sur les VRD. Des subventions sont obtenues par un montage avec 66 % à la charge de l’office départemental des HLM du Gard (propriétaire des espaces verts) et 33 % à la charge de la municipalité de Bagnols-sur-Cèze. En contrepartie, les espaces verts sont rétrocédés à la municipalité par convention. Dans le même temps des aménagements sur les espaces extérieurs ont été proposés dans le même dessein que celui de l’opération Banlieues 89 qui souhaitait consolider le lien entre centre ancien et ville nouvelle par une équipe dirigée par le paysagiste Alain Marguerit, sans résultat.
19Ainsi il n’y a pas eu de prise en compte globale du patrimoine immobilier et architectural, mais des réhabilitations ponctuelles par divers architectes locaux : Jean-Louis Fulcrand (Nîmes), Patrick Lecourbe (Bagnols-sur-Cèze) ou Jean Malliet (Uzès), la politique d’intervention dépendant essentiellement des orientations de l’office départemental des HLM du Gard dont les responsables successifs n’ont pas conscience et ne mesurent pas la valeur d’exemple de l’opération. Plusieurs enquêtes sociologiques axées sur les données démographiques et les mouvements de population ont été menées depuis la construction jusqu’à nos jours sans pour autant, là aussi en tirer des enseignements.
20Cependant le quartier des Escanaux a fait l’objet d’un certain nombre d’attentions. Ainsi le quartier s’inscrit dans le cadre étatique de la politique de la ville depuis son classement en ZUS (zone urbaine sensible) le 26 décembre 1996. Les 1 250 logements sociaux des Escanaux sont gérés par le bailleur Habitat du Gard et représentent 47 % du parc social bagnolais. Ce classement s’est accompagné d’une opération contrat de ville signée le 11 décembre 2000 pour la période 2000‑2006 entre l’État, la ville le Département, l’office HLM et la SA Vaucluse Logement. Un contrat urbain de cohésion sociale (CUCS) a été signé en 2007 et l’année 2009 a été l’occasion de célébrer par la ville l’anniversaire des 50 ans. Cette commémoration, qui s’est déroulée du 7 au 26 septembre 2009 s’est traduite par une série de manifestations dont la municipalité souhaitait qu’elles constituent un temps fort de sa programmation culturelle. Au début de l’année, plusieurs appels à la population ont été lancés par voie de presse ou dans le support de communication municipal pour la réalisation de l’exposition commémorative. Plusieurs rencontres ont été organisées au printemps 2009 par le service des archives municipales et la médiathèque où une quinzaine de personnes seniors qui ont vécu ou vivent encore aux Escanaux ont témoigné sur l’intégration, le cadre de vie, les activités du quartier à travers les générations. Au mois de juillet, un film a été réalisé par le centre social Passerelles sur Cèze consistant en un échange/discussion sur la vie aux Escanaux dans un décor des années 60 reconstitué. Des ateliers d’été en juillet et en août dirigés par une association avec l’implantation d’une yourte au cœur du quartier ont réuni quatre artistes européens et des jeunes de 11 à 18 ans pour partager leurs compétences et leurs passions autour d’ateliers d’initiation à la vidéo et à la photographie.
21L’exposition rétrospective « Des canaux aux SKNO » proposée par les archives municipales à partir de documents d’archives et de témoignages de bagnolais a été présentée tout le mois de septembre au centre d’art rhodanien où nous avons animé une conférence sur Candilis et Team X et dialogué en présence de Takis Candilis et de Jovan Josic, les fils de Georges Candilis et d’Alexis Josic.
22Les manifestations se sont poursuivies par des visites guidées du quartier, un spectacle de son et lumière et un grand bal à l’école Jules Ferry sur le thème des années 60.
23Par la suite un workshop a été organisé en novembre 2009 avec une trentaine d’étudiants de 2e et 3e année de l’École Nationale Supérieure d’Architecture de Montpellier sur la thématique du patrimoine contemporain avec le questionnement sur sa labellisation au « Patrimoine du XXe siècle ». À ce titre les étudiants ont été amenés à répondre à cette interrogation au travers d’un regard porté sur la conception, la réception et l’actualisation des points de vue sur ce quartier.
24Même si certaines opérations comme la cité des Arlequins à Grenoble ou l’immeuble le Moustoir à Lorient ont été labellisées au Patrimoine du XXe siècle, le label est difficile à appréhender par la municipalité, les habitants et les néophytes en architecture tant le quartier des Escanaux a perdu au fil des années de son authenticité originelle.
BIBLIOGRAPHIE
Abram, 1999 : J. Abram, 1999, L’architecture moderne en France, tome 2, p. 109.
La Construction Moderne Française, fascicule, 1965, CAP Fonds Candilis.
NOTES
1 Auguste Mione (1898-1962) est un entrepreneur de la Modernité qui crée en 1936 la Construction Moderne française, une Société coopérative ouvrière de production anonyme à capital et personnel variables qui sera en charge de l’Unité d’habitation de Marseille (arch. Le Corbusier), des opérations à Bagnols-sur-Cèze, Nîmes, Marseille, Béziers (arch. Candilis/Josic/Woods) ainsi que d’autres en région parisienne et notamment dans l’Essone à Chamarande, ville dont l’entrepreneur sera membre du conseil municipal de 1965 à 1971 et maire jusqu’en 1973.
2 Georges Candilis est contacté en 1956 par Auguste Mionne, directeur de la Construction Moderne Française, mandaté pour la construction de logements pour l’Énergie Atomique (G. Candilis, Bâtir la vie, Stock, 1977, p. 211).
3 Bagnols-sur-Cèze est une ville romaine située sur un carrefour de la route Nîmes – Lyon.
4 ATBAT, Atelier des Batisseurs.
5 Abram, 1999.
6 La Construction Moderne Française fascicule, 1965, CAP Fonds Candilis.
7 Team Ten est la réunion de plusieurs architectes en réaction aux CIAM.
30 L’extension de Bagnols sur CEZE - CONSTRUCTION CMF
30 GARD Bagnols Sur Ceze Une construction de la CMF @ Le regard sur les opérations de logement collectif à grande échelle en France a changé et il semble bien que certains architectes y aient pris une part active qu’il convient d’évaluer. Né à Bakou en 1913, Georges Candilis gagna la Grèce à douze ans et poursuivit ses études d’architecte-ingénieur à l’École polytechnique d’Athènes de 1932 à 1936. En archi-1945 il obtint une bourse du gouvernement français et se rendit à Paris où il travailla chez André Lurçat puis chez Le Corbusier (de 1946 à 1951) pour qui il suivra, avec Shadrach Woods (Yonkers, N.Y. 1923-New York 1973) le chantier de l’Unité d’Habitation de Marseille. À partir de 1951, Georges Candilis et Shadrach Woods dirigèrent au Maroc le bureau africain de l’ATBAT (Atelier des Bâtisseurs) structure créée en 1947 par Le Corbusier, Vladimir Bodiansky et André Wogensky. Ils se servirent de cet outil de travail pour construire des logements collectifs pour la population musulmane à Casablanca (Carrières Centrales 1953) puis pour la population européenne à Oran (1954-1955) en s’appuyant sur leur expérience et sur des typologies de projets d’architectes constructivistes russes des années 1920. Ces réalisations seront présentées au 9e Congrès des CIAM d’Aix-en-Provence en 1953. Pour Georges Candilis, l’habitat est le lieu de l’universel et du contingent. Habiter c’est répondre, d’une part, aux besoins universels de se réunir et de s’isoler, et, d’autre part, aux conditions particulières du lieu. « Inventer des logements simples, véritablement économiques, qui possèdent la qualité du respect, ce n’était pas de la grande architecture, mais cela représentait autant de difficultés, et demandait plus d’imagination et de sensibilité que de construire des palais »1.
2De retour à Paris en 1955, Georges Candilis et Shadrach Woods s’associent avec l’architecte yougoslave Alexis Josic (Becej, Serbie, 1921). L’équipe propose une réflexion architecturale nouvelle centrée sur l’habitat, proche des recherches sur l’habitat minimal menées par les architectes allemands des années 1920. L’évolution de cette réflexion concerne l’organisation urbaine et en particulier l’intégration du logement dans l’espace public : la continuité urbaine va être inventée ou réinventée jusqu’à la constitution de nappes continues. Cette évolution va amener l’équipe à contester la charte d’Athènes avec le groupe Team X (Alison et Peter Smithson, Jaap Bakema, Aldo van Eyck, Giancarlo de Carlo, Georges Candilis, Alexis Josic, Shadrach Woods…). Avec le concours « Million » (campagne du gouvernement français pour susciter la production massive de logements à bon marché) dont ils sont lauréats, l’équipe Candilis-Josic-Woods élabore des modèles standards applicables à la solution du problème posé en évitant les défauts de la production de masse du logement, à savoir uniformité, répétition et alignement. Après la construction de près de 3 000 logements en région parisienne : logements collectifs à Ivry, Cité Emmaüs à Blanc-Mesnil (1955-1957), Bobigny (1956-1962) et Gennevilliers (1955-1956) l’équipe est chargée du projet d’extension de la ville de Bagnols-sur-Cèze. La diversité des types d’habitation et la qualité de l’articulation recherchée avec la ville ancienne vaudra à cette réalisation le Grand Prix National d’Urbanisme en 1959. Dans le même temps, l’équipe construira deux opérations à Nîmes, l’ensemble Tour de l’Évêque et Clos d’Orville (1958-1964).
3Quelques données sur l’opération de Bagnols-sur-Cèze : le maître d’ouvrage est l’Office Départemental d’HLM du Gard et la Société d’Économie Mixte de Bagnols-sur-Cèze (SEMIB), les architectes sont Georges Candilis, Alexis Josic, Shadrach Woods associés à Paul Dony, architecte-ingénieur et Henri Piot, Ingénieur conseil, J.-P. Agniel, J. Devèze, M. Chausse, sont les architectes d’opération. L’urbaniste en chef est Raymond Coquerel, l’urbaniste régional est Charles Delfante. Pour les entreprises, on trouve : La Construction Moderne Française, CMF (Chamarande, Essonne), béton armé : Société des Grands travaux Métropolitains, planchers : Association Thermique Industrielle et Commerciale, chauffage : Entreprise A.D Mischler SARL (Besançon), Entreprise Poumerol (Nîmes).
Les conditions de la commande
4Le début de la construction en 1954 de la première usine de production d’énergie nucléaire de la rive droite du Rhône à Marcoule (Gard) posait la question de l’habitat des nombreux ouvriers, techniciens et cadres amenés à travailler sur le site. Le Commissariat à l’Énergie Atomique (CEA) et le Ministère de la Construction décidèrent la création d’un « véritable et nouveau centre urbain » sur la commune de Bagnols-sur-Cèze, à une dizaine de kilomètres de Marcoule qui voit sa population passer de 5 000 habitants (en 1956) à plus de 18 000 habitants. Bagnols-sur-Cèze est une ville romaine située sur un carrefour de la route Nîmes-Lyon, c’est une cité médiévale fortifiée, une ville d’eaux et de bains. C’est un carrefour routier important et également le centre commercial et administratif d’une région agricole (vins, légumes, fruits).
Figure 1 – Schéma indiquant les caractéristiques du site de Bagnols-sur-Cèze
Figure 1 – Schéma indiquant les caractéristiques du site de Bagnols-sur-Cèze
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Tiré de : Oscar Newman New Frontiers in Architecture, Krämer Verlag, Stuttgart, 1961, p. 122. (Archives famille Candilis).
5En 1956, Auguste Mionne, directeur de l’entreprise CMF est mandaté par le CEA pour la construction de logements pour les ouvriers, cadres et techniciens amenés à travailler à Marcoule. Il contacte Georges Candilis (qu’il connaît depuis la construction de l’Unité d’Habitation de Le Corbusier à Marseille) et lui demande dans un premier temps de construire 80 logements en six mois.
Le site
6La topographie et le climat avec les crues de la Cèze et le mistral au nord, la route nationale à l’ouest et la voie ferrée à l’est ont pratiquement imposé l’extension de la ville vers le sud.
Figure 2 – Schémas et axonométrie de l’extension de la ville au sud
Figure 2 – Schémas et axonométrie de l’extension de la ville au sud
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Tiré de : Oscar Newman, New Frontiers in Architecture, p. 120.
2 Candilis G., ibid, p. 214.
7À cela sont venues s’ajouter des données plus précises sur la nature des terrains disponibles, augmentées des principes de préservation des traces historiques du paysage : arbres, anciens puits, ancienne muraille, un théâtre de plein air et le vallonnement naturel, « la présence des vestiges d’un ancien théâtre romain nous incita à favoriser cette percée nouvelle vers le sud. C’est dans cette direction que nous avons envisagé les prolongements de la cité »2.
La composition
3 Voir la brochure Urbanisme en France du Ministère de la Construction « Bagnols-sur-Cèze ».
8Le premier acte a été la création d’un élément de liaison entre la vieille ville et la nouvelle : il fallait éviter la ségrégation entre anciens habitants et nouveaux arrivants en réservant une proportion de nouveaux logements pour les Bagnolais d’origine et en positionnant le centre commercial et le centre culturel à la croisée des deux villes. La nouvelle ville a été directement inspirée de l’ancienne, ainsi les rues ne sont pas à angle droit et les unités de logements projetées forment des redents évitant ainsi l’alignement en ligne droite. De même, trois points dominent Bagnols-sur-Cèze et servent de repères : une tour romane et deux clochers gothiques. L’extension nouvelle reprend « en contrepoint le thème de ces trois pôles et implante résolument parmi des bâtiments de un ou cinq niveaux, six (deux fois trois) tours de quinze niveaux »3. Cette disposition qui offre de nombreuses variations de perspectives et la diversité des logements bénéficiant d’une double orientation font de cette opération un exemple qui obtiendra le prix national d’urbanisme en 1959.
9Il convient de distinguer quatre entités :
le Quartier de la Coronnelle est le premier quartier réalisé dans l’urgence ;
le Quartier de la Citadelle qui comprend 370 logements, un centre commercial et une école de quartier, construits en onze mois, période permettant l’étude de l’extension de la ville ;
le Quartier des Escanaux, qui constitue la principale extension de la ville avec la construction de 1 200 logements ;
la cité-jardin « Le Bosquet » est un ensemble de 30 villas réservées aux ingénieurs supérieurs de l’Énergie Atomique.
Figure 3 – Superposition photographie aérienne / plan de masse
Figure 3 – Superposition photographie aérienne / plan de masse
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Tiré de AA, no 91-92, Panorama 1960, septembre-novembre 1960.
Figure 4 – Plan de masse de l’extension de Bagnols-sur-Cèze
Figure 4 – Plan de masse de l’extension de Bagnols-sur-Cèze
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Tiré de AA, no 91-92, Panorama 1960, septembre-novembre 1960.
4 Newman O., New Frontiers in Architecture, op. cit.
10Cette opération est très remarquée lors de sa réalisation, largement publiée en France et la plupart des documents présentés dans cet article sont issus de la publication d’Oscar Newman4 au Congrès CIAM 59 à Otterlo où Georges Candilis présenta cette opération en cours de construction.
Le programme du Quartier des Escanaux
Figure 5 – Plans et élévations des tours du quartier des Escanaux à Bagnols-sur-Cèze
Figure 5 – Plans et élévations des tours du quartier des Escanaux à Bagnols-sur-Cèze
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Tiré de : Oscar Newman New Frontiers in Architecture, p. 127.
11Il s’agit de construire la principale extension de la ville de Bagnols-sur-Cèze avec plus de 1 200 logements environ, accompagnée de la construction d’un centre scolaire, d’un centre sportif (stade, gymnase, piscine), d’un centre culturel (théâtre, cinéma, concert, exposition, salle de réunions), d’un centre commercial (place, magasin, marché) et de commerces avec l’équipement complet de la nouvelle ville en réseaux (égouts, gaz, électricité).
12Pour les logements deux volumétries structurent le plan de masse : des immeubles bas (R+4) à redents et six tours de R+14 avec la prise en compte des normes (primes Logecos, HLM A et 😎. Des séries de types d’immeubles différents par leurs orientations mais avec les mêmes caractéristiques de conception s’articulent pour créer des micro-ensembles autour d’un ancien parc privé qui a été préservé constituant l’espace vert central. Le quartier des Escanaux est construit juste après La Citadelle et avant la Cité Jardin du Bosquet. Sa réalisation s’échelonne entre 1956 et 1962. L’utilisation des équipements et la mixité de population s’avèrent un succès dès 1964. L’office départemental des HLM du Gard est toujours propriétaire des logements depuis la construction du quartier. Il n’y a pas eu de modifications des logements, cependant des travaux de maintenance et d’entretien vont avoir des conséquences sur l’architecture comme le changement de la chaudière collective qui passe du fioul au gaz et l’isolation par l’extérieur des tours en 1980. Dix années plus tard, en 1990, est lancée une campagne de réhabilitation lourde avec changement des menuiseries extérieures en bois pour des menuiseries PVC, la suppression des petits balcons et des séchoirs au profit de l’agrandissement des cuisines ainsi que la suppression des vide-ordures. Puis, en 1998, des travaux sont engagés sur certains espaces extérieurs et partiellement sur les VRD. Des subventions sont obtenues par un montage avec 66 % à la charge de l’office départemental des HLM du Gard (propriétaire des espaces verts) et 33 % à la charge de la municipalité de Bagnols-sur-Cèze. En contrepartie, les espaces verts sont rétrocédés à la municipalité par convention. Il n’y a pas eu de prise en compte globale du patrimoine immobilier et architectural mais des réhabilitations ponctuelles par divers architectes locaux : Jean-Louis Fulcrand (Nîmes), Patrick Lecourbe (Bagnols-sur-Cèze) ou Jean Malliet (Uzès), la politique d’intervention dépendant essentiellement des orientations de l’office départemental des HLM du Gard dont les responsables successifs n’ont pas eu conscience de la valeur d’exemple de l’opération. Plusieurs enquêtes sociologiques axées sur les données démographiques et les mouvements de population ont été menées depuis la construction jusqu’à nos jours. Des propositions ont été faites notamment dans le cadre de l’opération Banlieues 89 qui souhaitaient consolider le lien entre centre ancien et ville nouvelle et plus récemment sur les espaces extérieurs dans le même dessein par une équipe dirigée par le paysagiste Alain Marguerit dans les années 1990, sans résultat.
Figure 6 a et b – Photographies montrant l’opération en construction
Figure 6 a et b – Photographies montrant l’opération en construction
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Tiré de : Oscar Newman New Frontiers in Architecture, p. 124.
Analyse du projet originel
Les influences de l’équipe menée par Georges Candilis sur le programme
13L’équipe proposa pour le quartier des Escanaux un plan de masse sur une trame sensiblement orthogonale qui articule des immeubles bas (R+4) à redents et des tours de quatorze étages. Deux lignes « bordent » la composition à partir desquelles se développent parallèlement ou perpendiculairement les immeubles bas. Chaque ligne contient trois tours. Comme le montrent les photographies de la maquette ou de la réalisation, cette disposition donne une échelle différente de celle des « grands ensembles » en rompant l’uniformité et en donnant un caractère spécifique à chaque sous-ensemble, le centre étant occupé par le vide que constitue le stade.
Figure 7 – Photographies montrant l’opération réalisée
Figure 7 – Photographies montrant l’opération réalisée
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Tiré de AA, no 91-92, Panorama 1960, septembre-novembre 1960.
5 Monnier G. (dir.), L’architecture moderne en France, tome 2. Du chaos à la croissance. 1940-1966, (...)
14Il n’y a aucune analogie urbaine avec la ville ancienne et la liaison avec cette dernière est produite par une place qui sert de parking et certains jours de marché. Cette opération, avec celles du Blanc-Mesnil (1955-1957) et de Bobigny (1957-1962) « témoignent d’un intérêt nouveau pour la notion de continuité »5 et constitue une étape dans la réflexion de l’équipe Candilis-Josic-Woods sur la forme urbaine et les modes d’assemblages, amorçant les recherches ultérieures sur les notions de « stem » et de « web » développées dans les réponses aux concours des années qui vont suivrent.
Figure 8 – Photographies montrant l’opération réalisée avec la piscine, le stade et le centre culturel
Figure 8 – Photographies montrant l’opération réalisée avec la piscine, le stade et le centre culturel
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Tiré de : « La vie de la construction moderne française », no 7, 1965, Fonds 236 IFA : Candilis Georges.
Les typologies de logements
15Avec Sadrach Woods et Alexis Josic, Georges Candilis tente de transcrire dans des typologies modernes les qualités fonctionnelles d’un « habitat méditerranéen » sur lequel ils ont déjà travaillé, notamment au Maroc, à Casablanca avec les immeubles Sémiramis et Nid d’Abeilles où l’espace du logement, principalement traversant, se prolonge à l’extérieur avec loggia, balcon ou terrasse séchoir permettant d’éclairer les salles de bains. Ainsi pour le quartier des Escanaux les ensembles d’immeubles de logements à cinq niveaux sont organisés par assemblage dont l’articulation est l’escalier autour duquel sont constitués symétriquement les logements.
6 Bois Y.-A., « L’idée De Stijl », dans collectif, De Stijl et l’architecture en France, Bruxelles, (...)
7 Colli L. M., « Vers une polychromie architecturale », 1987, Le Corbusier une encyclopédie, Paris, (...)
16Les espaces communs sont réduits au minimum. La trame porteuse est constituée de voiles de béton de 18 cm d’épaisseur disposés tous les trois mètres. On trouve deux logements par niveau, organisés autour de la chaudière située au centre de chaque logement. L’organisation intérieure des 3/4 pièces, 4 pièces, 5 pièces et 6 pièces tous traversants reprend les critères énoncés ci-dessus. Il est à noter que ces logements sont destinés aux ouvriers. Sur les façades de ces immeubles on observe une polychromie sur certains panneaux avec des couleurs primaires : bleu outremer, ocre rouge et ocre jaune. Cette utilisation par panneaux rejoint sur certains points les recherches du groupe De Stijl6 et en particulier les compositions de Piet Mondrian mais aussi la polychromie architecturale de Le Corbusier7.
Figure 9 – Photographies montrant une tour aujourd’hui réhabilitée
Figure 9 – Photographies montrant une tour aujourd’hui réhabilitée
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Cliché Laurent Duport.
17En ce qui concerne les tours, les typologies sont plus variées, on observe :
18La typologie en « hélice » héritée de l’immeuble-tour d’Ivry conçu par l’équipe pour :
la Tour des célibataires : 14 étages, 104 logements de 1 et 2 pièces ;
la Tour de 104 logements HLM A de 2 et 3 pièces avec 7 logements par niveau ;
la typologie en 2 bandes parallèles séparées par la circulation verticale ;
deux tours de 14 étages avec 87 logements HLM B avec 6 logements par niveau du 2 pièces au 5 pièces dont 4 à double orientation8.
19Le modèle compact :
9 Voir façades et plan en annexe.
20- deux tours de 14 étages9, les logements des tours étant destinés aux techniciens supérieurs. Le quartier des Escanaux constitue la grande réussite de l’opération, les logements de la Citadelle étant aujourd’hui pour la plupart vacants et les villas de la cité-jardin du Bosquet présentant un taux d’occupation en constante diminution.
Analyse d’un projet de transformation, La réhabilitation de Jean-Louis Fulcrand
10 Il s’agit des opérations du Clos d’Orville et Tour de l’Évêque.
21L’architecte Jean-Louis Fulcrand, à l’issue d’un concours en loge organisé par l’OPDHLM, obtint la commande de la réhabilitation de 47 logements. Il s’agit, avec un budget limité autour de 65 000 francs (10 000 euros) par logement, d’intervenir sur ces logements selon cinq points : la mise aux normes des réseaux d’électricité et de ventilation, l’installation d’un chauffage individuel au gaz, le remplacement des menuiseries extérieures, l’isolation des façades par l’extérieur et l’amélioration des halls et des cages d’escalier. Jean-Louis Fulcrand connaît la valeur architecturale de l’opération de Bagnols-sur-Cèze et l’obtention du Grand Prix d’Urbanisme. Selon lui il y a des opérations de Georges Candilis à Nîmes10 qui sont plus réussies. Il est cependant très attentif à cette architecture qu’il respecte et il va chercher à obtenir des renseignements auprès d’un des architectes d’opération et se procurer les plans et façades auprès de l’OPDHLM. Ceci est d’autant plus important que l’immeuble sur lequel il doit intervenir se situe en limite du centre-ville, sur un côté de la place qui constitue à la fois la liaison et l’entrée du quartier des Escanaux.
Figures 10 et 11 – Photographies montrant les immeubles bas (R+4) aujourd’hui réhabilités
Figures 10 et 11 – Photographies montrant les immeubles bas (R+4) aujourd’hui réhabilités
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Photo de l’auteur Laurent Duport.
Figure 12 – Élévations sud et nord de l’immeuble Carcaixent Les Escanaux à Bagnols-sur-Cèze
Figure 12 – Élévations sud et nord de l’immeuble Carcaixent Les Escanaux à Bagnols-sur-Cèze
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(Doc. Permis de construire). Source : OPDHLM du Gard.
Figure 13 – Élévations sud et nord de l’immeuble Carcaixent. Les Escanaux à Bagnols-sur-Cèze
Figure 13 – Élévations sud et nord de l’immeuble Carcaixent. Les Escanaux à Bagnols-sur-Cèze
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(Doc. Permis de construire de la réhabilitation). Source : Jean-Louis Fulcrand architecte.
11 Interview de Jean-Louis Fulcrand, Nîmes le 14.03.2002.
22Dans l’ensemble l’opération des Escanaux fonctionne bien selon lui. Il n’y a pas de problèmes sociaux dans le quartier où sont logés essentiellement des employés du CEA qui sont là, pour la plupart, depuis le début. Cependant l’opération a selon lui mangé la ville et il regrette qu’il n’y ait pas de prise en compte globale du projet de Candilis par la Maîtrise d’Ouvrage, ni de réflexions et de décisions sur les espaces extérieurs. La Maîtrise d’Ouvrage n’a pas proposé de solutions pour gérer l’ensemble ou faire évoluer le patrimoine (comme des cessions de logements aux locataires souhaitant devenir propriétaires par exemple). De plus il n’y a pas de prise de conscience de l’unité architecturale d’ensemble et il y a eu beaucoup d’erreurs dans les diverses réhabilitations. « L’Office a raté l’occasion d’engager un travail global, elle a perdu la force du travail de Candilis »11.
23Concernant l’immeuble qu’il a réhabilité, il insiste sur la bonne conception des appartements qui sont fonctionnels, à double orientation et de bonnes dimensions. Il n’y a d’ailleurs pas de demandes de modifications, si ce n’est le vitrage des loggias. La composition en façade lui paraît réussie dans la mesure où elle donne à voir à l’extérieur la typologie des logements. Selon lui c’est une manière moderne de traiter les façades avec des jeux d’aplats de couleurs, les ouvertures et les lignes marquées par les nez de dalles. Mais cette polychromie est pour lui anecdotique. L’alternance des ouvertures en façades permet de s’affranchir des questions de réglementations incendie (C+D) en conservant des allèges vitrées. Cependant les parties communes (halls, cages d’escalier) sont trop petites, mal éclairées, inconfortables (vent), du fait de leur orientation au nord. L’immeuble a donc besoin d’une mise aux normes et d’un rafraîchissement des peintures. Au moment du concours Jean-Louis Fulcrand proposait d’intervenir sur les parties communes, offrant de la générosité dans les espaces collectifs en éclairant les cages d’escalier par des restructurations importantes, en sacrifiant par exemple un logement pour agrandir les paliers et créer des espaces éclairés naturellement, propice aux rencontres. Mais les financements n’autoriseront qu’un travail beaucoup plus modeste. L’architecte va minimiser les interventions en façade avec une isolation par l’extérieur des façades nord, est et ouest. La façade sud plus intéressante en ce qui concerne les modénatures (lignes formées par les nez de dalles, ouvertures, polychromie…) ne sera pas isolée.
12 Voir planche photographique de détail.
13 Modèle PVC à lames orientables type Llambi, voir détail en annexe.
14 Voir façades avant/après.
15 Voir détail en annexe.
24Il choisit une couleur unique le blanc en référence à la Méditerranée, simple et neutre. Pour lui la couleur doit provenir de l’intérieur12. Il transpose une logique par niveau et à chaque étage il applique une couleur sur les cages d’escalier, les portes palières, les radiateurs, les portes de placards et les murs intérieurs des loggias. Sur la façade nord, les entrées sont marquées par un rectangle de couleur bleue. La fermeture des loggias constituait une forte demande de la part des locataires. Jean-Louis Fulcrand a proposé de les fermer avec des persiennes orientables13, plus respectueuses de l’architecture et plus performantes en termes de confort thermique. Seuls les grands appartements en ont bénéficié, toutes les autres loggias ont été fermées par des châssis coulissants14. Les autres travaux ont concerné la mise aux normes des réseaux d’électricité et de ventilation, l’installation d’un chauffage individuel au gaz, le remplacement des menuiseries extérieures15, l’amélioration des halls par la pose de faïence sur les murs et la peinture des cages d’escaliers.
Figure 14 – Photographies de l’immeuble Carcaixent Les Escanaux à Bagnols-sur-Cèze réhabilité
Figure 14 – Photographies de l’immeuble Carcaixent Les Escanaux à Bagnols-sur-Cèze réhabilité
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Photo de l’auteur Laurent Duport.
16 Alison Smithson Team 10 Meetings : 1953-1984, New York, Rizzoli, 1991.
17 Document Fondation Le Corbusier.
18 Taylor B.B., « Team 10+20 », L’Architecture d’Aujourd’hui, no 177, janvier-février 1975. 1 ; CANDI (...)
25Enfin et surtout, la ville de Bagnols-sur-Cèze fut le lieu d’une des toutes premières réunions du Team X organisée par Georges Candilis en août 1960 comme en témoignent des photographies16 et une carte postale envoyée par les nombreux participants à Le Corbusier17. Cela montre avec force que ces réunions du Team X « [où] l’ambiance de confrontation critique sur des œuvres et des thèmes contemporains (…) qui contribua à troubler l’euphorie des CIAM d’après-guerre »18 méritent une actualisation et de nouveaux points de vue.
BIBLIOGRAPHIE
Bibliographie
Documents
Fonds 236 IFA : Candilis Georges (1913-1995).
CANGE/E/56/2 : 1956-1962. Quartier « Les Escanaux », Bagnols-sur-Cèze.
Carnet de détail menuiseries et persiennes, source Jean Louis Fulcrand.
« Les cimaises de l’architecte », document du Fonds Candilis, IFA.
Lettre du Ministère de la Construction datée du 13 juin 1960, Fonds Candilis, IFA.
Planche photographique de la réalisation, source Jean-Louis Fulcrand :
Façades Nord et Sud, avant/après, sources : archives de l’OPDHLM du Gard et Jean-Louis Fulcrand.
Plans d’un niveau, Tour des célibataires, source : Immeuble-tour à Evry AA no 74, novembre 1957, plans d’un niveau, tour plan en hélice et plan en H, source : AA no 80, octobre 1958, plan et façades immeuble tour de 14 étages, source : Fonds Candilis, IFA.
« Urbanisme en France » du Ministère de la Construction « Bagnols-sur-Cèze », document du Fonds Candilis, IFA.
Dessins et photographies
Diverses vues du Quartier des Escanaux, photographies couleur, source : La vie de la construction moderne française, no 7, 1965 et AA, no 91-92, Panorama 1960, septembre-novembre 1960.
« La tour des célibataires », photographies couleur & Noir et Blanc, source : La vie de la construction moderne française, no 7, 1965.
Plan de masse, dessins, sources : AA, no 80, octobre 1958 et AA, no 91-92, Panorama 1960, septembre-novembre 1960.
Plan de masse, superposition sur photographie aérienne, source : Fonds G. Candilis, IFA.
Ouvrages généraux
Benevolo Léonardo, Histoire de l’architecture moderne. Les conflits de l’après-guerre, Paris, Bordas, 1980.
Bois Yves-Alain, « L’idée De Stijl », dans collectif, De Stijl et l’architecture en France, Bruxelles, Pierre Mardaga, 1985.
Candilis Georges, Bâtir la vie, un architecte témoin de son temps, Paris, Stock, 1977.
Candilis Georges, Josic Alexis, Woods Shadrach, « Continuité de la recherche » dans Le Livre d’Or de l’architecture et de l’urbanisme, Paris, L’Inconnu, 1966.
Candilis Georges, Josic Alexis, Woods Shadrach, Une décennie d’architecture, Paris, Eyrolles, 1968.
Colli Luisa Martina « Vers une polychromie architecturale », dans Le Corbusier une encyclopédie, Paris, Éd. centre G. Pompidou, 1987.
Lucan Jacques, France Architecture. 1965-1988, Milan, Electa, 1989.
Lucan Jacques, Architecture en France. 1940-2000, Paris, Le Moniteur, 2001.
Monnier Gérard (dir.), L’architecture moderne en France, tome 2. Du chaos à la croissance. 1940-1966, Joseph Abram, Paris, Picard, 1999.
Newman Oscar, New Frontiers in Architecture, Stuttgart, Krämer Verlag, 1961.
Revues
Architecture d’Aujourd’hui (AA), no 74, novembre 1957 (Immeuble-tour à 4 branches à Ivry).
AA, no 80, octobre-novembre 1958.
AA, no 91-92, Panorama 1960, septembre-novembre 1960, p. 124-127.
AA, no 116, septembre-novembre 1964.
AA, no 144, juillet 1969.
AA, no 177, Team 10+20, janvier-février 1975, p. 44.
AMC, no 11, 1950-1980, Trente ans d’architecture française, avril 1986, p. 2.
La vie de la construction moderne française, no 7, 1965.
NOTES
1 Candilis G., Bâtir la vie, un architecte témoin de son temps, Paris, Stock, 1977, p. 185.
2 Candilis G., ibid, p. 214.
3 Voir la brochure Urbanisme en France du Ministère de la Construction « Bagnols-sur-Cèze ».
4 Newman O., New Frontiers in Architecture, op. cit.
5 Monnier G. (dir.), L’architecture moderne en France, tome 2. Du chaos à la croissance. 1940-1966, Joseph Abram, Paris, Picard, 1999, p. 109.
6 Bois Y.-A., « L’idée De Stijl », dans collectif, De Stijl et l’architecture en France, Bruxelles, Pierre Mardaga, 1985, p. 16.
7 Colli L. M., « Vers une polychromie architecturale », 1987, Le Corbusier une encyclopédie, Paris, Éd. centre G. Pompidou, 1987, p. 107.
8 Voir plan en annexe.
9 Voir façades et plan en annexe.
10 Il s’agit des opérations du Clos d’Orville et Tour de l’Évêque.
11 Interview de Jean-Louis Fulcrand, Nîmes le 14.03.2002.
12 Voir planche photographique de détail.
13 Modèle PVC à lames orientables type Llambi, voir détail en annexe.
14 Voir façades avant/après.
15 Voir détail en annexe.
16 Alison Smithson Team 10 Meetings : 1953-1984, New York, Rizzoli, 1991.
17 Document Fondation Le Corbusier.
18 Taylor B.B., « Team 10+20 », L’Architecture d’Aujourd’hui, no 177, janvier-février 1975. 1 ; CANDILIS G., Bâtir la vie, un architecte témoin de son temps, Paris, Stock, 1977, p. 185.
L’extension de Bagnols-sur-Cèze Les Escanaux @ L’opération n’est pas banale : une ville qui va voir tripler sa population par l’implantation d’un nouveau centre urbain à construire et une cité romaine à préserver. Nous sommes en 1956 et Georges Candilis est contacté par Auguste Mionne1 le directeur de la Construction Moderne française, mandaté par le Commissariat à l’énergie atomique pour la construction de logements pour les ouvriers, cadres et techniciens supérieurs qui vont travailler à Marcoule où vient d’être édifié l’un des premiers sites nucléaires de France. Ce dernier a vu le jeune Candilis à l’œuvre quelques années plus tôt, quand Le Corbusier lui faisait suivre à Marseille le chantier de l’Unité d’habitation.
2 Georges Candilis est contacté en 1956 par Auguste Mionne, directeur de la Construction Moderne Fran (...)
3 Bagnols-sur-Cèze est une ville romaine située sur un carrefour de la route Nîmes – Lyon.
2C’est ce défi urbain qui vaudra quatre ans plus tard le premier grand prix national d’urbanisme à Georges Candilis, Alexis Josic et Shadrach Woods2 associés aux urbanistes Raymond Coquerel et Charles Delfante. La tâche qui s’annonce à Bagnols-Sur-Cèze est ardue [ill. 1]. L’équipe va devoir donner forme aux attentes d’une maîtrise d’ouvrage constituée d’une des premières sociétés d’économie mixte, la SEMIB, de l’office HLM du Gard et de la municipalité de Bagnols-sur-Cèze qui veut voir s’élever au final quelques 1 500 logements aux côtés d’une ville médiévale Quant aux « contraintes » du site, elles sont nombreuses avec le Mistral au Nord, les crues de la Cèze, une topographie capricieuse à proximité d’un bourg marqué par ses rues étroites et sinueuses...
4 ATBAT, Atelier des Batisseurs.
4Il faudra aux architectes toute l’expérience accumulée depuis plusieurs années pour répondre à ce programme. Heureusement, de l’expérience ils n’en manquent pas. Celle acquise à l’ATBAT4 par Georges Candilis et Shadrach Woods en construisant des logements « dignes » pour différents types de population (européennes, musulmanes, israélites) notamment au Maroc leur sera précieuse. Ils y ont expérimenté des assemblages astucieux sur quatre ou cinq niveaux, y ont compris comment densifier intelligemment, ont appris à construire en tenant compte d’une culture locale et savent varier leurs propositions. L’immeuble « nid d’abeilles » aux superpositions simples et idéalement éclairées puis l’immeuble « Sémiramis » partagé en deux pour suivre la topographie ont rompu les architectes à ce genre de problématiques [ill. 2]. À cela s’ajoute l’expérience du concours dont ils sont lauréats en 1955 avec Alexis Josic qui les a rejoints. L’équipe propose une réflexion architecturale avec l’opération Million, campagne du gouvernement français pour abaisser le coût de construction d’un logement de 3 pièces de 1,5 à 1 million de francs de l’époque en élaborant des modèles standards applicables immédiatement.
5Ainsi vont être construits près de 3 000 logements en région parisienne : logements collectifs à Ivry, Cité Emmaüs au Blanc-Mesnil (1955-1957), à Bobigny (1956-1962) et Gennevilliers (1955-1956) ainsi que l’extension de la Ville de Bagnols-sur-Cèze.
6Cette extension est constituée de quatre entités. Une opération parmi celles-ci a principalement marqué les esprits, c’est bien évidemment la construction du quartier des Escanaux. Avant cette phase, Candilis, Josic et Woods ont dû urgemment construire le quartier de la Coronelle (80 logements) puis le quartier de la Citadelle (370 logements, un centre commercial et une école de quartier construits en onze mois). La dernière entité sera un ensemble de 30 villas dans la cité-jardin « Le Bosquet ». Au milieu de ces trois opérations, on trouve « les Escanaux » et la parfaite mise en application des principes de l’équipe. Ce quartier constitue la principale extension de Bagnols-Sur-Cèze. Au total, ce sont 1 200 logements, un centre scolaire, un centre sportif (stade, gymnase, piscine) un centre culturel (théâtre, cinéma, salle de concert, espace d’exposition, salle de réunions), un centre commercial (place, magasin, marché), des commerces et des équipements. C’est un nouveau morceau de ville, auquel il faut donner tout ce dont il a besoin pour vivre harmonieusement.
8Les Escanaux n’ayant jamais fait l’objet d’une prise en compte globale de son patrimoine, il faut faire preuve d’imagination pour avoir conscience de la valeur d’exemple de l’opération. Pourtant cela en vaut la peine et l’analyse du projet originel nous livre aujourd’hui encore de précieux enseignements [ill. 3].
9Prenons de la hauteur et survolons l’Unité de voisinage des Escanaux : un plan orthogonal, des immeubles bas en R + 4 et des tours de 14 étages. Présenté de cette manière, on imagine une cité comme il en existe partout. Pourtant, et c’est là la force de Candillis, Josic et Woods, on ne ressent pas les défauts de la production de masse. C’est que l’articulation est loin d’être banale. Tout d’abord, il y a du rythme : on trouve six types d’immeubles différents avec notamment les immeubles bas à redents qui rompent l’uniformité en dessinant des angles. À cela se conjugue l’alignement fluide des six tours suivant deux axes qui bordent la composition. Ainsi l’extension de Bagnols-Sur-Cèze fait déjà apparaître les prémices du stem – ce « centre linéaire d’activité » qui sera la marque du trio – et donne à voir un développement équilibré qui alterne harmonieusement parallélisme et perpendicularité suivant une ligne continue. Cette disposition donne une échelle différente de celle des « grands ensembles » en donnant un caractère spécifique à chaque sous-ensemble, le centre étant occupé par le vide que constitue le stade. Cette opération, « témoigne d’un intérêt nouveau pour la notion de continuité »5 comme le souligne Joseph Abram.
11Approchons-nous à présent des logements et considérons leur typologie. L’expérience de Casablanca trouve un écho méditerranéen dans cette architecture fonctionnelle et idéalement éclairée. Commençons par les immeubles bas destinés aux ouvriers : chaque niveau qui comprend deux logements s’assemble et s’articule autour d’un escalier, les espaces communs sont réduits au minimum et des voiles de béton de 18 cm d’épaisseur disposés tous les trois mètres, constituent la trame porteuse. Poussons la porte : l’espace y est privilégié et les appartements « traversants » s’étendent vers les loggias, balcons et terrasses séchoirs qui apportent la lumière jusque dans les salles de bain. Les façades quant à elles évoquent Piet Mondrian et ses grands aplats de couleur primaire. Ces panneaux polychromes, dont la conception revient à Alexis Josic, qui s’offrent au regard, ne sont pas sans rappeler les jeux de couleur qui ponctuent l’architecture de Le Corbusier. Les tours proposent quant à elles plusieurs typologies avec deux tours à quatre branches en « svastika » pour célibataires et couples avec un enfant, deux tours de grands logements plus compactes et deux tours à deux branches ou « tours jumelles » [ill. 4].
6 La Construction Moderne Française fascicule, 1965, CAP Fonds Candilis.
12La réception de cette opération est quasiment sans précédent avec des publications dans L’Architecture d’Aujourd’hui à de nombreuses reprises ainsi que dans Architectural Design. La Construction Moderne Française [ill. 5] publie elle aussi un fascicule qui vante les mérites de l’opération avec des photos de la réalisation et dans laquelle Georges Candilis rappelle que « le plan est la conséquence d’une étude extrêmement minutieuse pour arriver au maximum d’économie et au maximum d’habitabilité »6. De nombreuses photos sont prises pendant le chantier. Mais c’est surtout l’occasion pour l’équipe et en particulier pour Georges Candilis de montrer cette opération en train de se construire au 10e et dernier congrès des CIAM à Otterlo en 1959. Il retrouve là le rôle qu’il avait déjà joué à la présentation de l’Unité d’habitation, à la demande de Le Corbusier, au 7e congrès des CIAM à Bergame en 1949, soit dix années auparavant.
13En 1960, le Ministère de la Reconstruction et de l’Urbanisme célèbre au CNIT l’exposition qui montre les opérations de logements réalisées par l’État dans le cadre du développement industriel du territoire. C’est à cette occasion que l’opération, dont on peut voir la maquette sur le stand de l’office HLM du Gard, obtient le premier grand prix d’urbanisme décerné en France [ill. 6].
7 Team Ten est la réunion de plusieurs architectes en réaction aux CIAM.
14Ainsi Bagnols-Sur-Cèze, par ce projet d’extension, devient la ville où la concrétisation du projet s’apprête à bouleverser les idées en place. C’est en effet dans cette ville du Gard qu’aura lieu la première réunion de Team Ten en 19607, organisée par Candilis. Les participants y débattent, s’y prennent en photo, envoient une carte postale à Le Corbusier et continuent les discussions entamées à Otterlo l’année précédente. Cette réunion qui a lieu du 25 au 30 juillet 1960 réunit une vingtaine d’architectes incluant outre le trio Candilis/Josic/Woods les architectes Giancarlo de Carlo, Aldo Van Eyck, Alison & Peter Smithson, Jaap Bakema mais aussi Fuhimiko Maki, Juan Busquets, Oskar Hansen et Ralph Erskine. C’est la première réunion d’une série de 12 qui se terminera en 1977 à Bonnieux, la maison de campagne de Candilis.
15À l’unité de voisinage des Escanaux l’utilisation des équipements et la mixité de population s’avère un succès dès 1964. L’office départemental des HLM du Gard est toujours propriétaire des logements depuis la construction du quartier, en charge de son entretien et de sa maintenance. Vingt-cinq ans après sa construction un nouveau regard est porté sur les Escanaux dans le cadre de l’opération Banlieues 89. Ainsi sous la mandature de Georges Benedetti en 1984, parmi les 220 présentés un projet est proposé dans la thématique – réparer – qui prévoyait de « construire parmi les tours et les barres et les espaces verts : organiser un lieu plus urbain », il est abandonné en 1985 et ne sera donc jamais subventionné.
16Aujourd’hui, il n’est pas évident de saisir la qualité de cette opération réalisée entre 1956 et 1962.
17Sans compter que les réhabilitations ou plus exactement les interventions successives n’ont pas su prendre en compte le patrimoine que représentaient les Escanaux. Cependant aucun immeuble ne sera détruit en 50 ans, un équipement (grande salle) viendra compléter le quartier. Il n’y a pas eu de modifications de l’intérieur des logements, mais des travaux de maintenance et d’entretien vont avoir des conséquences sur l’architecture comme le changement de la chaudière collective qui passe du fioul au gaz et l’isolation par l’extérieur des six tours en 1980. Une vêture est apposée sur les façades entraînant la perte de la force plastique et l’effacement des couleurs initiales, rendant les tours méconnaissables. Les mêmes interventions produiront les mêmes effets sur la tour à quatre branches du Clos d’Orville à Nîmes. Dix années plus tard, en 1990, est lancée une campagne de réhabilitation lourde avec changement des menuiseries extérieures en bois pour des menuiseries PVC plus épaisses et monochromes. Ceci a accompagné le nivellement des façades par l’ablation des balcons et séchoirs au profit de l’agrandissement des cuisines ainsi que la suppression des vide-ordures inutilisés. Puis en 1998 des travaux sont engagés sur certains espaces extérieurs et partiellement sur les VRD. Des subventions sont obtenues par un montage avec 66 % à la charge de l’office départemental des HLM du Gard (propriétaire des espaces verts) et 33 % à la charge de la municipalité de Bagnols-sur-Cèze. En contrepartie, les espaces verts sont rétrocédés à la municipalité par convention. Dans le même temps des aménagements sur les espaces extérieurs ont été proposés dans le même dessein que celui de l’opération Banlieues 89 qui souhaitait consolider le lien entre centre ancien et ville nouvelle par une équipe dirigée par le paysagiste Alain Marguerit, sans résultat.
19Ainsi il n’y a pas eu de prise en compte globale du patrimoine immobilier et architectural, mais des réhabilitations ponctuelles par divers architectes locaux : Jean-Louis Fulcrand (Nîmes), Patrick Lecourbe (Bagnols-sur-Cèze) ou Jean Malliet (Uzès), la politique d’intervention dépendant essentiellement des orientations de l’office départemental des HLM du Gard dont les responsables successifs n’ont pas conscience et ne mesurent pas la valeur d’exemple de l’opération. Plusieurs enquêtes sociologiques axées sur les données démographiques et les mouvements de population ont été menées depuis la construction jusqu’à nos jours sans pour autant, là aussi en tirer des enseignements.
20Cependant le quartier des Escanaux a fait l’objet d’un certain nombre d’attentions. Ainsi le quartier s’inscrit dans le cadre étatique de la politique de la ville depuis son classement en ZUS (zone urbaine sensible) le 26 décembre 1996. Les 1 250 logements sociaux des Escanaux sont gérés par le bailleur Habitat du Gard et représentent 47 % du parc social bagnolais. Ce classement s’est accompagné d’une opération contrat de ville signée le 11 décembre 2000 pour la période 2000‑2006 entre l’État, la ville le Département, l’office HLM et la SA Vaucluse Logement. Un contrat urbain de cohésion sociale (CUCS) a été signé en 2007 et l’année 2009 a été l’occasion de célébrer par la ville l’anniversaire des 50 ans. Cette commémoration, qui s’est déroulée du 7 au 26 septembre 2009 s’est traduite par une série de manifestations dont la municipalité souhaitait qu’elles constituent un temps fort de sa programmation culturelle. Au début de l’année, plusieurs appels à la population ont été lancés par voie de presse ou dans le support de communication municipal pour la réalisation de l’exposition commémorative. Plusieurs rencontres ont été organisées au printemps 2009 par le service des archives municipales et la médiathèque où une quinzaine de personnes seniors qui ont vécu ou vivent encore aux Escanaux ont témoigné sur l’intégration, le cadre de vie, les activités du quartier à travers les générations. Au mois de juillet, un film a été réalisé par le centre social Passerelles sur Cèze consistant en un échange/discussion sur la vie aux Escanaux dans un décor des années 60 reconstitué. Des ateliers d’été en juillet et en août dirigés par une association avec l’implantation d’une yourte au cœur du quartier ont réuni quatre artistes européens et des jeunes de 11 à 18 ans pour partager leurs compétences et leurs passions autour d’ateliers d’initiation à la vidéo et à la photographie.
21L’exposition rétrospective « Des canaux aux SKNO » proposée par les archives municipales à partir de documents d’archives et de témoignages de bagnolais a été présentée tout le mois de septembre au centre d’art rhodanien où nous avons animé une conférence sur Candilis et Team X et dialogué en présence de Takis Candilis et de Jovan Josic, les fils de Georges Candilis et d’Alexis Josic.
22Les manifestations se sont poursuivies par des visites guidées du quartier, un spectacle de son et lumière et un grand bal à l’école Jules Ferry sur le thème des années 60.
23Par la suite un workshop a été organisé en novembre 2009 avec une trentaine d’étudiants de 2e et 3e année de l’École Nationale Supérieure d’Architecture de Montpellier sur la thématique du patrimoine contemporain avec le questionnement sur sa labellisation au « Patrimoine du XXe siècle ». À ce titre les étudiants ont été amenés à répondre à cette interrogation au travers d’un regard porté sur la conception, la réception et l’actualisation des points de vue sur ce quartier.
24Même si certaines opérations comme la cité des Arlequins à Grenoble ou l’immeuble le Moustoir à Lorient ont été labellisées au Patrimoine du XXe siècle, le label est difficile à appréhender par la municipalité, les habitants et les néophytes en architecture tant le quartier des Escanaux a perdu au fil des années de son authenticité originelle.
BIBLIOGRAPHIE
Abram, 1999 : J. Abram, 1999, L’architecture moderne en France, tome 2, p. 109.
La Construction Moderne Française, fascicule, 1965, CAP Fonds Candilis.
NOTES
1 Auguste Mione (1898-1962) est un entrepreneur de la Modernité qui crée en 1936 la Construction Moderne française, une Société coopérative ouvrière de production anonyme à capital et personnel variables qui sera en charge de l’Unité d’habitation de Marseille (arch. Le Corbusier), des opérations à Bagnols-sur-Cèze, Nîmes, Marseille, Béziers (arch. Candilis/Josic/Woods) ainsi que d’autres en région parisienne et notamment dans l’Essone à Chamarande, ville dont l’entrepreneur sera membre du conseil municipal de 1965 à 1971 et maire jusqu’en 1973.
2 Georges Candilis est contacté en 1956 par Auguste Mionne, directeur de la Construction Moderne Française, mandaté pour la construction de logements pour l’Énergie Atomique (G. Candilis, Bâtir la vie, Stock, 1977, p. 211).
3 Bagnols-sur-Cèze est une ville romaine située sur un carrefour de la route Nîmes – Lyon.
4 ATBAT, Atelier des Batisseurs.
5 Abram, 1999.
6 La Construction Moderne Française fascicule, 1965, CAP Fonds Candilis.
7 Team Ten est la réunion de plusieurs architectes en réaction aux CIAM.