mémoire2cité Vol 12
42 - Saint-Etienne le groupe Beaulieu/Marandiniére/Montchovet - Loire -
mémoire2cité - le 17 janvier 2019 - Montchovet et l'ANRU2 Le secteur Loti, dans le quartier de Montchovet à Saint-Etienne le long de la RN88, va bénéficier d’un réaménagement global marqué par la démolition du centre commercial de la Palle et la création d’une zone d’activité. C'est une nouvelle zone d'activité, située entre Montplaisir et le boulevard de la Palle, qui est en cours de création dans le secteur Loti. Cette zone d’activité de 10 000 m2, portée conjointement par la Ville de Saint-Étienne et Saint-Étienne Métropole, s’inscrit dans le projet global de transformation urbaine de ce quartier. Pensée pour s’insérer parfaitement dans le tissu urbain, elle devrait accueillir dès 2019 ses premiers occupants avec une extension du pôle motos. 2 démolitions d'ici 2020 pour Montplaisir , 2 autres pour la Fausse Marandiniere, ainsi que le centre commerçial de l'ARC EN CIEL coté Marandiniere. çe qui porte à 5 démolitions futur d'içi à 2020/2022 pour le secteur sud-est. Ce pour créer de nouveaux espaces économique, quatre immeubles de Métropole Habitat vont être démolis en 2020/22. Le bailleur social, en lien avec la Ville et Saint-Étienne Métropole, diligentera dès 2018 une enquête sociale auprès des 60 familles concernées afin de leur proposer des solutions de relogement en adéquation avec leurs attentes. La disparition du petit square, devant ces immeubles, sera compensée par l’amélioration des abords du centre nautique Yves Nayme et la mise en place d’un espace de détente. La rue Loti redessinée Autre modification importante du paysage urbain du secteur : le remodelage de la rue Loti. Créée à l’origine pour un quartier résidentiel, avec des courbes importantes sur sa partie nord, elle a été entièrement redessinée pour permettre la desserte de la future zone d’activité. Plus large, plus droite, la nouvelle rue Loti prendra racine au nord dans l’axe de la rue des Villas, avec la mise en place d’un carrefour sécurisé et se connectera au même endroit qu’aujourd’hui, boulevard de la Palle. Les travaux démarreront début 2018, après l’enquête publique que mènera SaintÉtienne Métropole. www.zoomdici.fr/actualite/Saint-Etienne-de-gros-travaux-e... - l'Opération de Beaulieu 1 2 3 4 à Saint-Etienne, par Rachid Kaddour. Deux dates symboliques : l’année de sa livraison (1956), & l’obtention de son label Patrimoine du XXe siècle (en 2003). Ce label inscrit Beaulieu dans un processus de valorisation patrimoniale par l’architecture, et le place ainsi en terrain laboratoire pour une réflexion sur la patrimonialisation des grands ensembles Cette labellisation n’est toutefois pas la seule démarche de valorisation patrimoniale et mémorielle conduite pour Beaulieu et les grands ensembles voisins : les années 2000 voient s’y multiplier les entreprises visant à identifier et valoriser d’une part les singularités architecturales et urbaines de Beaulieu, et d’autre part les récits de vie contrastés de différents groupes d’habitants des grands ensembles. La somme de ces entreprises patrimoniales et mémorielles, près d’une dizaine, conforte l’idée d’exemplarité des Quartiers sud-est de Saint-Étienne. D’autant plus que, dans l’histoire des grands ensembles français, ces Quartiers sont particulièrement précurseurs : Beaulieu est l’un des plus vieux de France, tandis que son voisin Montchovet est un pionnier de la politique de la Ville, puis de la rénovation urbaine et des travaux de deuil par le recueil de mémoires qui accompagnent cette dernière.Si l’on se place dans une perspective d’analyse des jeux d’acteurs, représentations et stratégies conditionnant les processus de fabrication du patrimoine, suivant en cela les approches traditionnellement menées par la géographie sociale (Gravari-Barbas, 2002 ; Veschambre, 2007 ; Hertzog, 2011), il est possible de s’interroger ici plus spécifiquement sur la place laissés aux mémoires plurielles d’habitants dans la définition et la valorisation de ce qui fait patrimoine dans les grands ensembles du sud-est de Saint-Étienne. La particularité de cette réflexion réside dans le fait de la placer au cœur de la rénovation urbaine qui fait l’actualité des grands ensembles.Les informations analysées ici ont été recueillies par une recherche documentaire (revue de presse, consultation d’archives administratives et de documents techniques), par la réalisation d’entretiens avec des représentants des différentes institutions et associations impliquées (directeurs successifs de l’organisme d’HLM, techniciens du service Urbanisme de la Ville, travailleurs sociaux et enseignants) ainsi qu’avec des habitants, et par des observations sur site (transformations spatiales).Un retour sur la livraison et l’évolution des Quartiers sud-est permettra dans un premier temps de donner la contextualisation nécessaire à la compréhension de ce qui se joue aujourd’hui. Cet historique permettra d’insérer ensuite dans l’épaisseur et la dynamique du temps long un inventaire espéré exhaustif des initiatives réalisées depuis le lancement de la rénovation urbaine par les différents acteurs institutionnels et associatifs. Cet inventaire est réalisé à partir d’une définition large de la notion de patrimoine, prise dans ses différentes acceptions notariale, immobilière et culturelle. Ces éléments contextuels et factuels collectés, il s’agira enfin, dans le dernier tiers de cette présentation, de les confronter et de les mettre en cohérence afin de proposer une interprétation sur ce qui fait patrimoine dans les grands ensembles du sud-est de Saint-Etienne. Cela permettra une réflexion sur la place que les mémoires plurielles d’habitants y tiennent.Quartiers sud-est de Saint-Étienne : des grands ensembles contrastés, des habitants divers
6Cette première partie a pour objet de présenter les grands ensembles du sud-est de Saint-Étienne. Pour cela, il est nécessaire de prendre le temps d’en faire un historique. Il s’agit notamment, en plus de donner les éléments urbains et économiques propres à l’agglomération stéphanoise dans la grande région lyonnaise, de s’intéresser aux acteurs de la vie de ces grands ensembles depuis leur construction, en présentant les principales actions menées par les institutions gestionnaires, et en identifiant les principales catégories sociales d’habitants ayant successivement occupé les lieux. Au niveau des sources, cet historique s’appuie sur les travaux existants, complétés par des études techniques (dont le dossier de candidature au Grand projet de ville - GPV), une revue de presse et des entretiens avec les gestionnaires.L’expression est tirée du film La crise du logement, 1954, réalisation Roger Montéran, Maryse Barbu (...)angers (677 logements), Boulogne-Billancourt (800 logements), Bron-Parilly ( (...)
Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la ville de Saint-Étienne se voit surnommée Capitale des taudis en raison des taux élevés de surpeuplement et d’insalubrité de son parc de logements. Cette crise du logement débute avec l’important développement industriel du XIXe siècle et la fulgurante croissance démographique qui l’accompagne : de 25 000 personnes après la Révolution française, la population stéphanoise passe à plus de 190 000 dans les années 1930. Or, la construction d’habitations par le patronat ne suit pas, les compagnies minières et métallurgiques se contentant de laisser les ouvriers se loger dans l’existant et les immeubles des artisans. Comme dans nombre de villes françaises, c’est la construction de grands ensembles au début des années 1950 qui permet de porter un coup décisif à cette crise tenace. La ville présente la particularité d’abriter l’un des six premiers grands ensembles de France : imaginé à partir de 1949, Beaulieu est construit entre 1953 et 1955 dans le cadre du plan national dit Courant2, et compte 1 262 logements HLM modernes et confortables. Il n’est que la première opération d’un plan plus vaste qui, pour ce qui concerne le seul sud-est de la ville, amène à la production de plus de 6 000 logements, dans les grands ensembles de Beaulieu II - Marandinière (1957-1959), Beaulieu III - Montchovet (1962-1965), Beaulieu IV - la Palle (1967-1970) et dans celui de la Métare en copropriété (1962-1974, voir illustr) C’est plus particulièrement sur les grands ensembles de Beaulieu et Montchovet, mitoyens, que l’attention va ici porter. Leurs formes divergent, puisque le premier compte 19 barres et une tour formant un ensemble urbain particulièrement soigné (illustration 2), alors que le second (1 266 logements) est composé de huit barres, certaines très imposantes, implantées simplement parallèlement ou perpendiculairement les unes aux autres.
Auteur : R. Kaddour.
Montchovet présente simplement une population plus jeune, du fait de plus grands appartements ; il (...)
9Leurs occupations initiales (Vant, 1974 ; Blanc, Bonilla, Tomas, 2003) sont par contre significativement proches, puisqu’ils accueillent tous deux très majoritairement des ouvriers de l’industrie (principalement qualifiés) et des fonctionnaires, soit des catégories sociales que l’on qualifierait aujourd’hui de moyennes (illustration 3)3. La crise du logement est en effet telle à Saint-Étienne que les demandes d’HLM émanent de catégories sociales très variées, et, pour les grands ensembles, l’office municipal gestionnaire sélectionne les locataires suivant leur solvabilité. Les plus pauvres des demandeurs de logements HLM, ainsi que les immigrés et familles originaires du Maghreb, quand ils sont accueillis, le sont dans des opérations de taille plus réduite, formant un habitat spécifique (Logements de première nécessité, Programmes sociaux de relogement, opération Million…). Autrement, ils occupent le parc de logements vieilli, insalubre ou précaire de la ville.En 1979, 46 % des nouveaux arrivants sont étrangers. Les chefs de ménages étrangers représentent à (...)
5 L’acuité du questionnement local se voit par ailleurs accru par le contexte national puisque, paral (...)
6 « L’office doit conserver un caractère social mais néanmoins, il ne peut pas accueillir n’importe q (...)
7 « Quand la Muraille de Chine s’éveillera », Hebdo, 2 novembre 1983.
10Cette occupation sociale des grands ensembles du sud-est de Saint-Étienne dure jusque dans la deuxième moitié des années 1970, à partir de laquelle Montchovet voit sa population se paupériser, suivant des mécanismes connus (Dubet F., Lapeyronnie D., 1992 ; Blanc J.-N., Bonilla M., Tomas F., 2003) : les catégories les plus aisées commencent à quitter Montchovet dès le milieu des années 1970, la suite de leur parcours résidentiel les menant vers l’achat d’un nouveau logement (ailleurs dans la ville puis dans le périurbain qui se développe) ; une partie des ménages restant sur place se voit quant à elle petit à petit frappée par la crise socio-économique et le chômage qui touchent durement l’agglomération. Le cas stéphanois présente toutefois la particularité de connaître un processus exacerbé, avec une politique ethnique affichée sans détour. À partir du milieu des années 1970, Montchovet accueillent en effet quelques ménages d’origine étrangère, venant du logement spécifique ou des quartiers insalubres du centre-ville en voie de résorption4. Un choix s’impose alors aux gestionnaires de Montchovet (Ville et office) : encourager le mouvement de paupérisation et d’« ethnicisation » ou le freiner5. La municipalité d’union de la gauche (1977-1983) tente de résister à ces évolutions en préparant avec les associations d’habitants une réhabilitation de Montchovet, retenue par l’État dans le cadre de la procédure Développement social des quartiers (DSQ, François Mitterand se rendant même lui-même à Montchovet pour une visite express), visant à maintenir les catégories moyennes dans le grand ensemble6. Mais la municipalité RPR-UDF élue à la suite (1983) réoriente le projet, avec d’une part un volet bâti axé non plus principalement sur les logements mais sur une réhabilitation lourde des façades (isolation colorée, percées et démolition très partielle), et d’autre par un volet social expérimentant une gestion ségrégative de la ville. Montchovet se voit en effet attribuer une fonction d’accueil de familles d’origine maghrébine et aux revenus peu élevés. Le maire affirme : « au risque de choquer, je dirais que vouloir l’intégration à tout prix est un non-sens car personne ne la veut d’un côté comme de l’autre […]. En revanche, je crois que vouloir faciliter les petits regroupements par ethnie serait préférable »7. La paupérisation de la population de Montchovet va grandissant tout au long des années 1980 et 1990, avec pour corollaire les problèmes sociaux et de gestion qui en font un « quartier sensible », le plus dur de la ville : précarité (98,3 % d’allocataires en 1996, taux de chômage de 34,3 %), échec scolaire, multiplication des actes d’incivilité et de délinquance (incendies nombreux de véhicules, agressions dont l’une tourne au drame), forte vacance de logements (68 % d’occupation totale en 1996).La dévalorisation de Montchovet est telle qu’en 1995, à peine plus de dix ans après la signature de la convention DSQ, le maire fraîchement élu (Parti radical), ex-adjoint à l’urbanisme du maire précédent, fait de la démolition de l’immeuble symbole du quartier la première grande décision de son mandat. Cette barre, le bâtiment A surnommé Muraille de Chine du fait de ses 250 mètres de long environ, de ses seize niveaux dans sa partie la plus haute et de ses 526 logements à sa livraison, est démolie le 27 mai 2000 Le maire justifie cette démolition par un triple argumentaire : le rejet de l’immeuble par les Stéphanois (qu’il lit dans la vacance), la déconcentration des populations en difficulté (même si environ 70 % des locataires sont in fine relogés dans le grand ensemble et ses voisins) et l’échec des réhabilitations menées jusqu’ici. L’évènement est fortement médiatisé, à l’échelle locale mais aussi nationale, puisque le ministre de la Ville Claude Bartolone vient à Montchovet tenir un discours signifiant que cette démolition par implosion, la première d’une série ayant lieu en 2000, marque un tournant dans le traitement des grands ensembles, avec passage à la rénovation urbaine. Affirmation basée sur des entretiens avec le personnel de l’organisme d’hlm, les responsables de l’ (...)« Beaulieu – le Rond-Point. Une importante opération de réhabilitation », La Tribune-Le Progrès, 15 (...)Pendant que Montchovet glisse dans les difficultés, le grand ensemble voisin de Beaulieu connaît une évolution discrète et tranquille, voyant simplement sa population vieillir mais garder un caractère assez mixte. Et au moment même où la Muraille de Chine est démolie s’achève à Beaulieu une réhabilitation (façade, parties communes, implantation d’ascenseurs) qui donne toute satisfaction aux locataires si l’on en croit la presse et le taux de vacance faible.Ainsi, à l’entrée dans le nouveau millénaire et un demi-siècle après leur lancement, le contraste dans l’occupation sociale et les actions entreprises par les gestionnaires entre Beaulieu et Montchovet montre que les grands ensembles du sud-est de Saint-Étienne constituent des héritages alors dans des situations et des perspectives très variées. C’est dans ce contexte qu’au long des années 2000 des opérations de valorisation se développent tous azimuts dans et pour les grands ensembles stéphanois.
Valorisation de patrimoine(s) dans les grands ensembles : processus polyphonique, voire cacophonique.
Cette deuxième partie a pour objet d’inventorier et de présenter les différentes initiatives de valorisation de patrimoines dans les grands ensembles du sud-est de Saint-Etienne, plus finement que cela n’a été fait en introduction. Deux éléments qualifient cet inventaire. D’une part, la notion de patrimoine est ici prise dans ses différentes acceptions, afin de viser l’exhaustivité. D’autre part, une attention particulière est bien sûr portée aux démarches à l’initiative d’habitants, ou en impliquant. Des entretiens avec les instigateurs des différentes démarches ont été conduits afin de saisir leurs tenants et aboutissants.La démolition de la Muraille de Chine ouvre la voie à un projet plus large encore. Soucieux d’enrayer le processus de dévalorisation de Montchovet, qui commence à s’étendre à certains immeubles des grands ensembles voisins (la Marandinière et la Palle), l’organisme d’HLM propriétaire, avec le soutien financier de la Ville, confie dès 2000 à l’urbaniste Loïc Josse la mission de définir un schéma directeur pour une intervention sur la totalité des grands ensembles HLM du sud-est (soit les grands ensembles HLM de Montchovet, Beaulieu, la Marandinière et la Palle). Les moyens de conduire cette intervention sur ce qui sera dénommé désormais les Quartiers sud-est sont trouvés d’abord dans un Grand projet de ville (2001), puis dans une convention ANRU (2005).Le schéma prévoit aussi l’implantation d’équipements privés (zone d’activité) et publics (piscine m (...)
Dans le détail et pour la partie habitat10, les travaux mis en œuvre comprennent d’abord la démolition des plus grands immeubles (environ 500 logements, illustration 5), principalement à Montchovet (où il ne reste aujourd’hui plus qu’un sixième des logements initiaux) ; ensuite la reconstruction d’une douzaine d’immeubles de taille plus modeste, de statuts variés (HLM, locatif privé, propriété) et répondant à des demandes actuelles (développement durable, accès des logements sur l’extérieur avec des terrasses, etc.), ainsi que d’un lotissement de maisons mitoyennes ; enfin la réhabilitation des immeubles conservés, avec entretien courant des appartements et parties communes, à Beaulieu notamment.La stratégie d’intervention sur le spatial est à ranger du côté de la communication, puisqu’il s’agit de changer l’image des grands ensembles via un remodelage profond. L’objectif, quant à lui, se situe du côté du peuplement, avec trois dimensions. Il s’agit d’abord de déconcentrer les familles en difficulté (Montchovet). Des efforts sont aussi déployés pour maintenir sur place les habitants les plus aisés restés à Beaulieu ou ailleurs, avec notamment des travaux d’adaptation des logements au vieillissement des populations. Il s’agit enfin de tenter d’attirer dans des logements neufs des populations de profils sociaux plus élevés que ceux d’une partie des familles en place, soit les plus aisés des demandeurs HLM en termes de revenus, ainsi que des catégories moyennes (dans les logements privés). En espérant ensuite qu’une osmose s’opère entre immeubles anciens et les immeubles nouveaux, et populations anciennes et populations nouvelles. Le programme stéphanois est de ce point de vue exemplaire de ce qui se passe dans d’autres grands ensembles en France (Stébé, 2010 ; Donzelot, 2012).Ce programme est inscrit dans le Plan stratégique de patrimoine de l’organisme, soit un document qui, pour l’ensemble du parc, prévoit les interventions à mener dans le cadre d’une gestion pour les années voire les décennies à venir. Le terme de patrimoine est ainsi utilisé ici par l’organisme dans un sens immobilier et notarial : l’organisme fait in fine de la valorisation de patrimoine.Mais si l’on prend le terme dans son sens culturel, d’autres opérations de valorisation de patrimoine(s) sont menées durant la même décennie, selon trois étapes. Celles-ci impliquent toutes, d’une façon ou d’une autre, des habitants.Ricoeur P., 2000. La mémoire, l’histoire, l’oubli. Paris, Le Seuil, p. 577.
12 Passages en italiques extraits d’un entretien avec l’ex-directeur de l’école primaire de Montchovet (...)
École Montchovet et collège Jean-Dasté Saint-Etienne, 1999. Murmures de Muraille. Imprimerie Sud-Of (...)
Les textes sont trop longs pour être reproduits ici, et il est difficile d’en extraire des parties (...)
Tout d’abord, l’annonce de la démolition de la Muraille de Chine engendre une série d’initiatives à ranger du côté du « travail de deuil, par lequel nous nous détachons des objets perdus de l'amour et de la haine ». Ce sont en premier lieu l’école primaire et le collège situés tout à côté de la Muraille qui, constatant le malaise suscité chez les enfants par la démolition à venir, conduisent un travail de photographie, de dessin et d’écriture afin de permettre de « mettre des mots sur des maux », les enseignants instigateurs ayant identifiés des « traumatismes » causés par l’annonce de la démolition. Les dessins, poèmes et récits réalisés, publiés en 1999 dans le livre Murmures de Muraille13 grâce aux moyens du Réseau d’éducation prioritaire, content principalement la douleur de voir l’immeuble disparaître, la crainte qu’inspire aux enfants la perte à venir des repères et habitudes, et une colère envers les décideurs engageant la démolition14.
« En 1971, […] dans ce quartier, j’habitais un appartement de 5 pièces, plus la cuisine ; un logeme (...)« Je me souviens du lieu de prière avec les hommes tous en djellabas blanches, qui se pressaient po (...)
« C’est de la rancœur et de la haine que j’éprouve en écrivant ces quelques lignes. Montchovet rest (...)
Présentation du film sur la pochette du DVD.
le 27 mai 2000, 13h : démolition d’un immeuble moderne baptisé Muraille de Chine, 2002, réalisation Je (...)Entretien avec l’ex-directeur de l’image du film, 16 février 2010 Le maire refuse d’être interviewé.
Quelques semaines avant la démolition de l’immeuble, c’est cette fois-ci avec des adultes qu’un travail similaire est mené, sans moyen, à l’initiative des associations et structures socioculturelles. Dans le cadre d’une « fête » de quartier, les désormais anciens locataires sont invités à présenter et partager leurs souvenirs, notamment en les inscrivant sur de larges feuilles apposées sur les murs de l’école primaire. Ces feuilles ont été depuis perdues, mais en 2008, un dispositif semblable est reconduit, à l’occasion de la démolition d’un autre immeuble dans le même secteur. Aux dires des habitants présents lors des deux manifestations, les propos formulés sont sensiblement les mêmes. Ils sont cette fois-ci consignés par le centre social et reproduit dans un petit dossier papier 14 juin 2008, rue Pierre-Loti, 40 ans de souvenirs. Ils portent surtout sur le vivre-ensemble dans ce grand ensemble depuis l’uniformisation de la population, avec des récits de faits, pour certains anecdotiques, jugés positifs (la découverte du confort dans ces immeubles, l’entraide entre voisins amis, les jeux d’enfants, les festivités et rites musulmans) ou négatifs (la délinquance, le sentiment d’abandon par les pouvoirs publics, le traumatisme de la rénovation urbaine dans le quartier). En somme, comme dans le cas de Murmures de Muraille, ces témoignages consignés et diffusés sont des éléments visibles d’une mémoire partagée d’un vivre-ensemble (communautaire), et d’une mémoire de difficultés quotidiennes et de luttes. Ces mémoires constituent un patrimoine immatériel. Enfin, quelques années après la démolition de l’immeuble, la mémoire d’anciens locataires est à nouveau sollicitée lorsque l’Opéra-Théâtre de la Ville de Saint-Étienne, qui dispose d’une Unité de production audiovisuelle, prend l’initiative de réaliser un film documentaire de 32 minutes sur « la réussite de la construction, l’échec de la restauration » et les raisons de la démolition de la Muraille de Chine. L’équipe est animée par une double volonté de « garder une trace, puisque c’était un immeuble très singulier de Saint-Étienne » et de « traiter du ressenti de cette perte chez ses habitants ». Le film prend le parti de s’appuyer très majoritairement sur des interviews. Les témoins sont toutefois principalement des locataires de la première heure21, si bien que ce sont donc surtout les premières années qui sont contées, avec la modernité de l’immeuble et la découverte du confort. Une place est toutefois laissée aussi à des récits de la lutte pour l’équipement du quartier (à sa livraison, pendant le DSQ) et contre sa relégation (pendant les années les plus difficiles).Ensuite, après ce travail de deuil, de recueil de témoignages et de valorisation de mémoires, une autre forme de valorisation de patrimoine culturel survient en 2003, avec la labellisation Patrimoine du XXe siècle de Beaulieu par le ministère de la Culture et de la Communication, en raison de ses spécificités bâties (forme organique de la composition, adaptation au relief, travail sur les parcs et jardins) et historiques (caractère pionnier, apport au quotidien domestique). Celles-ci sont identifiées depuis la fin des années 1980 par des travaux de l’École d’architecture et de l’Université de Saint-Étienne.
Direction des Affaires culturelles de la Ville de Saint-Étienne.Enfin, deux ans après, à l’occasion du cinquantenaire du grand ensemble (2005), Saint-Étienne Ville d’art et d’histoire, chargé de la valorisation et l’animation du patrimoine stéphanois, réalise un projet intitulé Beaulieu, patrimoine urbain du XXe siècle, comprenant, outre la pose de la plaque-label, la pose d’une signalétique patrimoniale, l’édition d’un ouvrage sur l’histoire et les spécificités bâties du site et la reconstitution d’un appartement des années 1950 proposé à la visite. Ce dernier est réalisé avec l’aide d’habitants installés depuis l’origine : ils donnent ou prêtent la quasi-totalité des objets exposés, et font part de souvenirs qui permettent d’en concevoir le discours de visite. Celui-ci porte sur la découverte du confort moderne permise par les grands ensembles, sur le quotidien domestique dans les années 1950 (activités féminines, masculines, des enfants), mais également sur l’architecture et l’urbanisme des Trente glorieuses. L’école primaire de Beaulieu participe quant à elle à ce cinquantenaire, avec la réalisation d’un petit film documentaire et d’animation sur la naissance du quartier. Le propos porte sur la crise du logement et la forme bâtie originale de Beaulieu.Une plaquette d’information produite par la Ville (n.d.) associe d’ailleurs ces deux aspects : à cô (...)
Ainsi, le lien établi entre les différentes acceptions du terme de patrimoine (culturelle et notariale-immobilière) permet de conforter le constat fait en introduction d’une « patrimonialisation » des grands ensembles du sud-est de Saint-Étienne. Ce processus de « patrimonialisation » est complexe, car polyphonique : les nombreuses actions croisées, émanent d’acteurs très variés, de la puissance publique (État, Ville) aux associations d’habitants, en passant par des institutions comme l’organisme d’HLM, les écoles ou les équipements socioculturels de quartier. Mais le processus est aussi assez cacophonique. En effet, pour chacun de ces acteurs, les motivations sont variables et le patrimoine à valoriser ne recouvre pas les mêmes éléments. Ces éléments peuvent même être contradictoires voire hermétiques les uns par rapport aux autres. Par exemple, les mémoires des premiers locataires ayant connu la mixité sociale diffèrent de celles des derniers locataires de Montchovet ayant connu le « ghetto ». De même, les locataires sont globalement peu sensibles au patrimoine architectural tel que le valorisent la DRAC et Saint-Étienne Ville d’art et d’histoire (si l’on en croit le profil des visiteurs – majoritairement des Stéphanois d’autres quartiers, et des scolaires).
La complexité du processus global de « patrimonialisation » comme les contradictions entre les démarches), n’est pas problématique en elle-même, et tendrait plutôt à être une richesse. Mais elle ne permet pas de comprendre au premier abord les tenants et aboutissants de la « patrimonialisation ». C’est donc à l’identification de ceux-ci que les lignes suivantes vont s’attacher, dans le but de mieux cerner la place et le rôle que les démarches habitantes tiennent et jouent dans la patrimonialisation.Récupération, instrumentalisation et délaissement des paroles des locataires : mémoire du mouvement HLM contre mémoires d’habitants
27La contextualisation historique, la présentation des acteurs et enjeux des démarches de valorisation de patrimoines et le recueil de matériaux réalisés permettent à présent, dans cette dernière partie, de donner du sens à cette association cacophonique entre grand ensemble et patrimoine, en en fournissant des clés d’explication. L’image peut être celle d’un « système » complexe (la « patrimonialisation »), dont les composantes (acteurs, motivations, initiatives) ont été démontées plus haut, et qu’il s’agit à présent de remonter pour en comprendre la logique d’ensemble. Puisqu’il s’agit d’un processus global de (re)valorisation, donc d’un bénéfice espéré, on peut se demander à qui profitent la « patrimonialisation » et les différentes démarches de valorisation qui la compose, dans leur cohérence d’ensemble éventuelle ? La réflexion doit porter en particulier sur la « patrimonialisation » de Beaulieu, puisque Montchovet n’existe presque plus.Dans une logique chère à la géographie sociale, celle du « renversement de l’ordre des facteurs » (Rochefort, 1982), c’est plus particulièrement autour de la question du peuplement (Morel-Journel, Sala-Pala, 2011) qu’une interprétation va être ici proposée, puisque, comme montré précedement, cette question est au cœur de l’histoire et de l’actualité des grands ensembles, et donc au cœur de leur « patrimonialisation ».Lire à ce sujet : Collectif, 2010. 1945-1975. Une histoire de l’habitat. 40 ensembles « Patrimoine (...)
Etoiles de Jean Renaudie à Villetaneuse, Serpentin d’Emile Aillaud à Pantin, cité de l’Etoile de Ge (...)
Toutes les citations de ce paragraphe sont des propos du directeur de l’organisme d’HLM propriétair (...)
Ce qui, l’histoire le montre, peut être un effet de certaines politiques et lois.
La « patrimonialisation » des ensembles de logements sociaux est généralement associée à des initiatives de préservation du bâti, principalement en raison de son exemplarité architecturale. Mais ces initiatives apparaissent souvent aux organismes d’HLM comme discordantes avec les logiques de gestion, en particulier l’adaptation du bâti à la vie qui continue (évolutions sociales, vieillissement du cadre physique, etc.). Des cas nombreux, en région parisienne notamment, montrent que les organismes ne souhaitent en effet généralement pas voir leurs immeubles mis « sous cloche ». Toutefois, cette réticence à la « muséification » ne signifie pas insensibilité à l’architecture et aux spécificités du bâti. Au contraire, dans le cas de Beaulieu à Saint-Étienne, l’organisme paye même la pose de la plaque-label Patrimoine du XXe siècle (label sans incidence juridique ni exigence de restauration), et affirme avoir tenu à « faire des greffes qui vont dans le sens initial » lors des réhabilitations de 2000 et 2006 (matériaux, couleurs et modénatures des façades et des ascenseurs et passerelles construits, références aux années 1950 dans les fresques peintes). Mais ce respect de l’architecture moderne tient plus au fait que cette dernière a été l’outil, le signe et la matérialisation d’un projet sociopolitique lui-même moderne. Via ce que l’on nomme le « mouvement HLM », il s’agissait d’offrir un logement décent et confortable au plus grand nombre. Beaulieu, groupe HLM parmi les plus anciens produits sur le territoire stéphanois, est pour l’organisme propriétaire un symbole de l’institution et de ses missions. Occupé aujourd’hui encore par une population relativement mixte, il représente plus précisément un emblème et la mémoire de l’idée initiale d’un habitat social pour tous, et non pour les seuls démunis comme a pu le devenir Montchovet par exemple.Mais la démarche de valorisation des spécificités de Beaulieu par l’organisme va plus loin encore. D’une part son architecture adaptée à la colline sert de modèle pour la reconstruction (en cours) du grand ensemble de la Marandinière (200 logements) situé sur la colline voisine (jeu de symétrie inversée, illustration 7), et d’autre part une imitation de sa relative mixité sociale est tentée avec le découpage de cette nouvelle opération en statuts variés (locatif privé et public, accession sociale à la propriété). Beaulieu est ainsi un point d’appui, y compris donc au sens topographique, pour la « reconquête » du reste du parc de grands ensembles qui a connu une paupérisation de sa population. Ce grand ensemble est ainsi pour l’organisme et la Ville un modèle refondateur pour les Quartiers sud-est remodelés et reconstruits.En somme, un retour aux origines du mouvement HLM est tenté. Ce sont ce rapport au passé et cette sollicitation d’une « identité » du mouvement HLM qui donnent du corps à l’idée de patrimoine. Ainsi replacée dans la perspective des logiques de gestion par l’organisme HLM et ses partenaires institutionnels, la « patrimonialisation » des Quartiers sud-est apparaît donc à la fois comme l’expression des logiques qui ont porté la production de logements sociaux, et le levier de mise en cohérence de stratégies de réhabilitation matérielle et symbolique des grands ensembles du sud-est.Cette démarche de construction et de valorisation d’un patrimoine et d’une mémoire du mouvement HLM se développe contre la construction et la valorisation d’autres patrimoines et mémoires, notamment ceux des habitants. Le terme de « contre » est ici à prendre dans ses deux sens, à commencer par celui de proximité. En effet, cette « patrimonialisation » peut s’alimenter des démarches valorisant les témoignages et mémoires des plus anciens locataires, ceux ayant connu les premières heures des grands ensembles de Beaulieu et Montchovet et l’occupation initiale mixte à laquelle les gestionnaires tentent de revenir. De ce fait, l’organisme est partenaire de toutes les actions renvoyant au contexte de construction de Beaulieu et aux années de sa jeunesse (comme de celle des autres grands ensembles). L’appartement reconstitué des années 1950 avec son mobilier de catégories ouvrières et moyennes et son discours de visite signalant en creux l’occupation mixte initiale en est une bonne illustration : l’organisme met l’appartement à disposition et paye les travaux pour les murs et sols. D’autres actions allant dans le même sens comme l’ouvrage ou les films sur la construction de Beaulieu reçoivent un soutien bienveillant de l’organisme d’HLM. Il est possible de parler ici de récupération, voire en quelque sorte d’instrumentalisation.Le partenariat avec l’organisme, ou son soutien, permettent aux témoignages et mémoires d’habitants de la première heure (principalement locataires de Beaulieu et catégories moyennes et ouvrières) d’être recueillis et valorisés dans des supports soignés, durables et réalisés avec des moyens significatifs : des films, un ouvrage et l’appartement reconstitué des années 1950. Ce qui n’est pas le cas d’autres témoignages et mémoires d’habitants, en particulier ceux des locataires les plus pauvres et arrivés récemment. Car la démarche de valorisation d’une mémoire du mouvement HLM se développe en effet contre les mémoires d’habitants, c’est-à-dire aussi en opposition à ces dernières. Les mémoires qui ne renvoient pas à une occupation mixte ne bénéficient pas ou très peu du soutien de l’organisme d’HLM ou de la Ville, puisque le discours qu’elles produisent est discordant par rapport au discours institutionnel. Les récits de vie communautaire et dans la précarité d’habitants de Montchovet devenu « ghetto », et plus encore les récits de lutte face aux institutions pour l’équipement du quartier ou contre les démolitions, s’expriment alors dans des supports éphémères et réalisés sans moyen : prise de parole lors de « fêtes », impression de paroles sur support papier simple diffusées dans un cercle très restreint. Ces mémoires ne sont alors posées et exposées dans l’espace et le débat publics que de manière très discrète, ce qui ne peut les faire accéder à un statut de patrimoine pour d’autres acteurs que les seuls (ex)locataires concernés.
Foret C., 1993, Valorisation et dévalorisation dans la ville : le musée urbain Tony Garnier ou la r (...)Gay G., 2008, « De Firminy-Vert à Le Corbusier Ville : la construction d’un patrimoine paradoxal », (...)Pour conclure, ce cas stéphanois rappelle que la « patrimonialisation » générale constatée en France touche aussi les marges de la ville. Le mouvement n’est pas neuf et a déjà été analysé pour la cité Tony Garnier à Lyon ou Firminy-Vert (Loire) par exemple. Chacun de ces cas montre à quel point le processus est complexe, avec notamment des acteurs nombreux (gestionnaires, institutions culturelles, habitants plus – Lyon – ou moins – Firminy – moteurs ou considérés…) et des motivations et finalités variées (culturelles, économiques, symboliques, etc.). Saint-Étienne n’échappe pas à cette complexité. Il a donc d’abord fallu s’attacher ici à trouver du sens à la démarche d’ensemble menée dans les Quartiers sud-est. L’analyse dans l’épaisseur historique a permis d’expliciter une entreprise globale portée par l’organisme propriétaire : Beaulieu, emblème de l’idée initiale d’un habitat social pour tous (et non pour les seuls démunis), est consolidé et imposé comme modèle pour la réhabilitation, dans ses aspects matériel et juridique, des grands ensembles paupérisés. C’est cette recherche de l’état initial qui donne le plus de sens à la « patrimonialisation », processus de valorisation tant symbolique que matériel.Une fois ce préalable posé, l’analyse a permis de montrer que cette démarche d’ensemble fait une place inégale aux différentes mémoires : celles des plus anciens locataires, aux profils ouvriers ou de catégories moyennes, sont recueillies et valorisées, alors que celles des habitants les plus précaires sont délaissées. Ainsi, les catégories d’habitants les plus populaires des Quartiers sud-est (pour partie significative d’origine maghrébine), fragilisées par la précarité, contraintes de faire face au relogement (et donc implicitement à la déconsidération de leur habitat par les institutions gestionnaires et l’opinion publique), voient aussi leur place dans la société questionnée dans le domaine symbolique par la thématique patrimoniale. Ces catégories sociales ne laissent pas ou peu de traces, alors que le champ mémoriel et patrimonial est pourtant bel et bien ouvert dans les quartiers populaires. Ce constat formulé à partir du cas stéphanois est partagé par les sociologues et géographes développant des analyses et perspectives de réflexion autour du droit au patrimoine, du caractère socialement sélectif de la construction du patrimoine et de la participation de ce dernier aux systèmes des inégalités (Veschambre, 2007, 2008 ; Pinçon-Charlot, Pinçon, 2007). ------ la ville de St-Etienne & les Quartiers Sud-Est Aujourd'hui :
Proposer de nouveaux logements dans une démarche environnementale forte. Dans la poursuite des opérations engagées depuis 2001 (démolition de la Muraille de Chine en 2000, implantation du CHPL, de l ’AIMV en 2005), une qualité résidentielle s'affirme progressivement au sein des quartiers Sud-Est, grâce à une nouvelle offre d'habitat variée (en forme comme en type de produits). Le dynamisme du quartier s'appuie sur l'accueil et le développement de services, d'activités économiques et d'équipements d'agglomération (centre nautique, Nouveau Théâtre de Beaulieu...) et de proximité (salles de sport, travaux dans les écoles). Les atouts paysagers du site sont pleinement exploités dans une démarche environnementale forte. L'aménagement des espaces libres et la requalification des axes structurants et de desserte renforcent les liaisons internes aux quartiers et les ouvrent sur l'ensemble de la ville. Beaulieu, un patrimoine de qualité, valorisé et adapté à ses occupants
40 logement ont été adaptés au vieillissement de leur occupants (bacs à douche, volets électriques, aménagement des ascenseurs, …). L'amélioration des espaces extérieurs, résidentiels ou publics (rue K.Marx, square Renoir, allée Clémenceau) viendra rendre plus conviviaux ces lieux de vie partagés. Petite Marandinière : une cité jardin qui se rénove en gardant son caractère Sur la Petite Marandinière, 320 logements de Métropole Habitat ont été rénovés. Les bâtiments ont été transformés pour arriver à 32 logements, avec création de T3, T4, et T5 en tenant compte de la rénovation thermique et du confort des logements. 54 logements ont été construits, répartis en 6 bâtiments à l'architecture contemporaine et fonctionnelle (surfaces généreuses, double ou triple orientation, terrasse ou loggia). En parallèle, les espaces publics ont été réaménagés dans une démarche environnementale durable et innovante : résidentialisation et embellissement des espaces extérieurs, traitement paysager d'ensemble, requalification des voiries et des circulations douces adaptées aux usages, gestion optimisée du stationnement et des eaux pluviales...Une nouvelle mixité pour le quartier : les maisons de ville "Jardins Sembat" 22 maisons de ville (du T3 au T5) ont été construites à l’angle de la rue Marcel Sembat et du boulevard de Fraissinette. Conçu et développé par l'équipe XXL-Civita-Spirit, ce projet se caractérise par la qualité de la construction (matériaux durables, aménagement soigné des espaces extérieurs…) et par la mise en valeur paysagère du site, ouvert sur les collines du Pilat. 3 types de maisons ont été proposées en location libre : maisons jumelées le long du boulevard de Fraissinette, maisons en pente en fond de parcelle adossée au talus, maisons patio au cœur de l’îlot. Un nouveau centre nautique sur le secteur Loti Souhaité par les habitants, exemplaire d’une démarche participative de coproduction, le centre nautique Yves Naime a été ouvert à l'été 2013, en remplacement de l'ancienne piscine de la Marandinière. Ce centre nautique comprend un bassin sportif (25m, 6 lignes d'eau), un bassin destiné aux activités ludiques (bains bouillonnants, aquagym...), une pataugoire et des plages extérieures.Grande Marandinière : un secteur d'habitat en développement . Après la démolition de la barre Sisley et celle en cours de la barre Féguide, c'est un nouveau quartier qui se dessine sur ce secteur. La reconfiguration de la rue Sisley en voie de promenade avec des vues en belvédère et l'aménagement d'une « coulée verte » ont profondément modifié le paysage urbain du secteur. Ce nouvel environnement a permis à Métropole Habitat de réaliser un programme immobilier de 27 logements locatifs. Dans ce bâtiment collectif moderne et fonctionnel, chaque logement comporte un espace extérieur privatif, balcon ou terrasse. Au rez-de-chaussée, des locaux d'activités (centre social espace-loisirs) ou de services sont déployés le long de la nouvelle rue Sisley. La Palle : des résidentialisations de qualité
La résidentialisation des immeubles du boulevard de la Palle apporte aux habitants de nouvelles terrasses privatives en rez-de-chaussée, des espaces en cœur d’îlots plus agréables, et de nouveaux parcours piétonniers avec aires de jeux. Elle s’accompagne de la réhabilitation des immeubles (réfection des façades, changement des garde-corps…). Des opérations de résidentialisation ont été menées immeuble par immeuble de 2006 à 2009. Elles permettent de définir les limites entre les parties publiques ouvertes à tous, et les parties privées. Des petits jardins privatifs sont ainsi aménagés pour chaque logement de rez-de-chaussée. Le Pont Aven : du logement social à haute performance environnementale
Développé par Métropole Habitat, le Pont-Aven est un exemple en matière de construction écologique. Il accueille 20 logements sociaux du T2 au T5. L’ensemble de la conception du bâtiment intègre des critères environnementaux : parois extérieures en brique mono-mur, eau chaude solaire, chauffage collectif au gaz naturel, ventilation intérieure à double flux pour une meilleure circulation de l’air, équipements électriques et sanitaires économes en énergie. La toiture végétalisée permet quant à elle une meilleure conservation de la fraîcheur en été, les auvents du toit protègent les fenêtres du soleil et les eaux de pluie seront récupérées pour arroser les espaces extérieurs…Résultat : une diminution des rejets en CO2 et une baisse significative des charges de chauffage pour les locataires. Favoriser l'accessibilité et les relations inter-quartiers Le réaménagement du boulevard de la Palle a favorisé une meilleure desserte du quartier en transports en commun. Une station de taxis, des pistes cyclables et des pelouses ont été aménagées le long du boulevard, sécurisant ainsi la traversée piétonne entre les terrasses Roinat et le centre hospitalier. A l'intérieur du quartier, la trame piétonnière a été développée dans le principe d'une continuité paysagère entre les différents secteurs. Initiée avec l’aménagement des terrasses Roinat, une coulée verte, nouveau poumon vert du quartier, facilitant la circulation des piétons et des cyclistes, relie désormais le boulevard de la Palle, et plus loin le bois d'Avaize, au Parc de l'Europe. - Après la seconde guerre mondiale, un immense chantier s'ouvre en France dans le but de loger massivement une population démunie, les réalisations des HLM en France et la lutte contre l'habitat indigne insalubre , le film parle de St-Etienne entre autre avec les Cités du soleil 1958 de Jean-Claude Sée : www.dailymotion.com/video/xgj74q . Jusqu'au milieu des années 1970, cette période dite des « Trente Glorieuses l'après guerre et montre la plupart des grandes réalisations de 1945 à 1960. A travers les exemples de la région parisienne et de quelques grandes villes françaises sont posé les problèmes de la diversité architecturale, de l'esthétique et de l'harmonie entre le passé et l'avenir. Les images montrent les grands ensembles de Beaulieu, la Marandiniére, à Saint-Etienne, la cité le Haut du Lièvre à Nancy, des cités à Sarcelles, Asnières, Bron-Parilly, Epinay, Pantin, Bobigny, la cité radieuse de Le Corbusier à Marseille, le front de mer à Royan, la video de l'Année 1962, une réalisation de Philippe Brunet içi www.dailymotion.com/video/xgj2zz » fut le terrain de nombreuses expérimentations architecturales et urbanistiques, fondées notamment sur les idées émises plus tôt dans le siècle par le Mouvement moderne.Aujourd'hui, ces ensembles bâtis sont au cœur d'une autre actualité, liée à leur adaptation à l'évolution des modes de vie de notre société contemporaine. Cette question qui se posa dès la fin des années 1970 apparaît sous un jour nouveau, avec les premières démolitions dans les années 1980 et, plus récemment, le vaste programme de réhabilitation mis en place dans le cadre de la loi Solidarité et Renouvellement Urbain.
Après Les Grands Ensembles. Une histoire qui continue…, ce nouvel ouvrage, fruit de la collaboration entre l'École Nationale Supérieure d'Architecture de Saint-Étienne et l'Université Jean Monnet, apporte un éclairage nouveau sur cet héritage bâti, mettant au jour simultanément la question de son vécu et celle des acteurs engagés dans son édification. En réunissant quinze auteurs spécialistes de ce domaine, il s'agit de regrouper autant de points de vue, pour comprendre la diversité et la complexité des enjeux liés à la postérité de ce bâti. - « Petite enquête sur Beaulieu – Le Rond-Point », La Tribune du centre et du sud-est, 13 octobre 1955 et « Le chantier de Beaulieu – Le Rond-Point (1ère tranche) sera terminé le 30 juin 1956 très exactement »,La Tribune du centre & du sud-est, 26 juin 1956 -
«St-Etienne, la place des grands ensembles dans l’histoire de l’habitat social français »Saint-Étienne/Beaulieu, au sud-est de l’agglomération, sur le versant sud de la colline de Beaulieu, en forte pente et d’aspect semi-rural, la cité de Beaulieu est mise à l’étude dès 1950. Elle débute en 1953 et comprend 1 221 logements, un groupe scolaire et 35 boutiques. Des parrains prestigieux et l’élite de l’architecture sté- phanoise sont mobilisés pour ce premier grand ensemble local.Tantôt les bâtiments suivent le dessin de la courbe de niveau 600, devenue rue Le Corbusier, tantôt ils s’installent perpendi-culairement à la pente, reliés à la rue par des passerelles ou de grands escaliers. A l’implantation exemplaire des bâtiments répond une maîtrise raffinée du végétal d’accompagnement, décliné selon les modes habituels aux squares urbains, avec une virtuosité étonnante dus aux talents de l’ingénieur des Services techniques de la ville, Jean Marc, associé à l’équipe de concep-tion dès l’origine de l’opération.
Le vocabulaire de l’art des jardins s’adapte au grand ensemble : les espaces sont découpés à partir des courbes de niveau et des allées, et caractérisés par un système de haies et de contre-haies (haies étagées doubles ou triples) constituées de troènes com-muns ou dorés, prunus, berbéris et buffets de laurier, et sont plantés d arbres rythmés et colorés (érables négundo et acacias), ou parfois fastigiés (la gamme d’arbres est d’ailleurs peu riche), selon un dessin géométrique et des alternances de couleurs. Ces espaces verts ne sont réalisés qu’à partir de 1964, après avoir été longtemps laissés en prairies fauchées. Cet état de fait, dû au départ à l’étirement des financements des projets d’espaces exté-rieurs, s’inscrivait aussi dans la logique de conception de notre ingénieur, qui pensait « qu’il était nécessaire de laisser vivre un groupe d’habitations avant de planter » – afin de reprendre notamment les chemins tracés par l’usage.Cette réalisation révèle le décalage entre les réflexions et les savoir-faire architecturaux et paysagers et exprime quelques traits caractéristiques de la pratique paysagiste. Le festonnage des haies qui jalonne les espaces extérieurs rejoint celui des collines boca- gères surplombant les bâtiments. Il rappelle le site environnant et inspirera plus tard l’AUA et Alexandre Chemetoff pour la réhabilitation du quartier de Montreynaud.Relevons que, sans l’action concertée des services de la ville et de l’office d’HLM, qui finança entièrement la réalisation des espaces verts, rien n’aurait été fait à cette époque, compte tenu du désintérêt pour cet aspect du projet des principaux responsables du chantier. « D’ailleurs, à cette époque, les architectes ne jouaient pas au paysagiste… », queleques superbes videos du Ministere de la Cohésion et des Territoires içi : .Naissance d'une banlieue mort d'un village 2000 www.dailymotion.com/video/x1a98izRéalisateur : Sidney Jézéquel Production : Les Films Roger Leenhardt Sujet : la commune de Goussainville (95) -Quatre murs et un toit 1953 www.dailymotion.com/video/xk6xui Scenario et réalisation Pierre Jallaud MRU (ministère de la reconstruction et de l'urbanisme) ----------------Le Bonheur est dans le béton www.dailymotion.com/video/x413amo - 2015 Documentaire réalisé par Lorenz Findeisen produit par Les Films du Tambour de Soie ---------------------Beaulieu par son constructeur la Cimaise :" Entre les années 50 et 60, et suite à la seconde guerre mondiale, la municipalité stéphanoise a vu sa population passée d’un peu moins de 180 000 habitants en 1950 à plus de 200 000 habitants dix ans plus tard en 1960. Cette forte augmentation de la population pouvait s’expliquer par le fort taux de natalité de cette époque (baby-boom), mais aussi par l’afflux de travailleurs de la classe ouvrière venus dans la grande cité stéphanoise pour trouver un travail. De ce fait, la construction d’un logement sain pour chaque ouvrier était devenue une priorité absolue pour les élus qui considéraient à raison que cela était une condition vitale dans le cadre de ce grand développement. Pour ce faire, la ville a lancé dans les années 50 une vaste opération de construction de barres d’habitation dans la zone de Beaulieu, destinée à fournir un logement à une population grandissante.---- Bâtir mieux plus vite et moins cher 1975 l'industrialisation du bâtiment et ses innovations : la préfabrication en usine, le coffrage glissant... www.dailymotion.com/video/xyjudq ---BEAULIEU une barre d’habitation innovante - A l’époque, avec une majorité d’architectes, les appartements modernes construits possédaient des cloisons lourdes empêchant toute modification interne ainsi que des espaces de renvoi sombres et non ventilés ressemblant à des alcôves.Mais à l’inverse, pour certains architectes précurseurs de la région à l’image d’Yves et Henri Gouyon, la modernité reflétait le gout de la clarté, de l’air, et du soleil, avec de larges horizons. Ainsi, ces derniers donnaient la priorité non pas aux façades qu’ils considéraient comme de simples élévations du plan, mais aux cellules d’habitations et à leur orientation. Dans cette optique, le bâtiment proposé par Henri Gouyon, qui était donc un partisan de l’espace ouvert moderne, supprimait les circulations et profitait de ce gain de place pour aménager de nouveaux espaces de vie communes. De plus, dans ces cellules d’habitations, les architectes ont tirés profit au maximum de la double orientation des appartements (ces derniers étaient traversant) avec par exemple l’accolement de balcons. Conception et réalisation d’un quartier entier. Pour le projet de Beaulieu, l’on confia la conception ainsi que la réalisation des interventions aux agences Henri et Yves Gouyon puis Yves Gouyon et associés. Ainsi, dés le milieu des années 50, des études concernant Beaulieu II – La Marandinière furent conduites, suivis de la construction du bâtiment entre 1957 et 1959. S’en suivit Beaulieu III – Montchovet entre 1962 et 1964, surnommé la « Muraille de Chine la plus grande barre d'Europe avec 540 appartements à sa livraison mi 1964, les chantiers de l'OPAC devenu Métropole-Habitat, www.ina.fr/video/LY00001263522 », qui comprenait entre autres, une barre de type HLM haute de 10 à 17 mètres et longue de 270 mètres, avec 560 logements. Suites à ces constructions, l’urbanisation des vallées et collines du sud-est de Saint-Etienne continua jusque dans les années 70 avec les séries de la Métare I, II, et III. Au total, ce sont plus de 8 000 logements, pour l’essentiel de type HLM, qui ont été construits durant cette période. Ces constructions ont également contribué à la création du parc de l’Europe et d’un boulevard circulaire qui servait de jonction entre les différents édifices et le centre-ville de la cité stéphanoise.Un projet pharaoniqueLe centre commercial fut un projet d’une dimension sans précédent pour la ville, plus grand centre commercial intra-urbain de la région Loire-Auvergne, avec 100 magasins, 1500 places de stationnement, 90 000 m² de surface, et sur 3 niveaux (4 niveaux avec la terrasse). Le 2 octobre 1979, CENTRE DEUX ouvre ses portes pour la première fois, et constitue une renaissance et un véritable tournant pour la ville. L’avis de l’architecteDe toutes les constructions de cette époque, Beaulieu est un des ensembles construits qui se porte le mieux si l’on en croit les nombreuses enquêtes menées auprès de la population de ces logements, dont certains l’occupe pratiquement depuis le début. Les arbres atteignent désormais le haut des immeubles, et la rue Le Corbusier adjacente a pris les allures « d’une banlieue des années 30 » avec un niveau d’urbanisme parfaitement acceptable. En conclusion, on peut parler pour cette construction d’un véritable savoir faire architectural et en quelques sortes d’art urbain. Ce projet a été récompensé par un prix d’urbanisme, mettant en valeur le travail en amont du projet. www.cimaise-architectes.com/realisations/divers/construct... cité HLM labellisée Patrimoine du XXeme siecle -"Il faut bien le dire, avant même d’être livré, Beaulieu est l' un des grands-ensembles, parmis 6 autres qui fasçinait en 1954..En effet c'etait le début de la longue & grande histoire des chantiers de l'Office Public de l'Aménagement et de la Construction* içi, ou à Montreynaud, Solaure, Monthieu etc ( l'OPAC l'office public de logements sociaux, devenu plus tard Métropole-Habitat, est la plus importante au niveau National, c'est la plus grosse boite d'HLM). Bref, les habituels promeneurs du coin genre les "Bois du Four (la Metare, le nom ançien, qui par ailleurs appartenait a Mme de Métarie une veuve riche qui légua son domaine soit "la Métare" à la ville, pour un Franc symbolique à l'epoque et aux CHU anciennement les HCL Hospiçes Civils de la Ville comme à Lyon... (on notera qu il y a des tas de logements en centre ville propriété du CHU)..se rendant le dimanche dans le Pilat ou à Rochetaillée et sur les collines* alentours (on en a 7 comme a Rome) font un léger détour par le chantier. Ils constatent alors de visu cet avancement des travaux que la presse qualifie de « belle prouesse ». Le rythme est en effet rapide : « un étage par semaine » pour certaines barres, comme le raconte un témoin. Les « grandes maisons », soient les immeubles de hauteur et nombre de logements importants (IGH), étant alors encore rares dans la ville, les Stéphanois n’y sont pas habitués@ les H.L.M. Beaulieu est la 1ere cité Stéphanoise de toutes,. Les barres de dix-sept et quatorze niveaux gises respectivement rues Gomy Herriot et de Vlaminck, ainsi que la tour de 22 niveaux au 33 rue Le-Corbusier,surprennent donc encore pire pour la plus grande barre d'Europe qui arrvera 7 ans plus tard, la Muraille qui mettront certains certaines à la renverse , le gigantisme à l'état brut, du lourd.... La référence qui vient à l’esprit de beaucoup ajoute à la fascination : l’Amérique. « C’est New-York ! c'est tres joile, tres vert... », se rappelle avoir pensé un habitant de la première harre...Mais plus que les immeubles, ce sont surtout les logements qui emportent l’adhésion des « heureux locataires », comme aime à les appeler la presse tout court. La satisfaction procurée aux habitants par l’hygiène et le confort des logements des Grands-Ensembles soit les quartiers NEUF est une information connue, les études de sciences humaines sur le sujet abondent. Aussi, pour le cas de Beaulieu devenu un cas d'Ecole idem pour Montchovet (Beaulieu3) et les transformations de la Marandiniere (Beaulieu2)...Les entretiens réalisés avec des locataires n’apportent pas sur ce point-ci d’éléments nouveaux :les premiers motifs de satisfaction invoqués sont, comme pour bien d’autres Grands-Ensembles Français, l’eau courante, le chauffage central dont sont pourvus les immeubles les plus hauts, les WC intérieurs et salles de bain, l’ensoleillement et la luminosité permis par l’orientation, la hauteur et la disposition des immeubles, les placards et les tout aussi pratiques balcons à parois séchoirs permettant de faire sécher le linge, hiver compris. Entretien avec François Tomas, géographe, spécialiste de l'aménagement urbain, et enseignant à l'université et à l'école d'architecture de Saint-Etienne. Il est notamment l'auteur des Grands Ensembles, une histoire qui continue (Publications de l'université de Saint-Etienne, 2003). Cet intellectuel a également mis la main à la pâte. Entre 1977 et 1983, il fut adjoint à l'urbanisme du maire communiste de l'époque, Joseph Sanguedolce. Engagé au PC de 1974 à 1985, il a, depuis, rejoint le Parti socialiste «comme militant de base» L"apres guerre...Que prévoit-on pour la reconstruction? Pas grand-chose. A la différence de la refonte spectaculaire du Havre, par exemple, on se contente ici de bâtir de petits immeubles, plus modernes bien sûr, mais sans réelle innovation architecturale ou urbanistique. Est-il vrai que Saint-Etienne, après guerre, traîne une réputation de «capitale des taudis»?C'est exact, et celle-ci n'est pas usurpée. En 1946, 7% seulement des logements sont jugés «confortables», et 17%, «acceptables»; 56% sont médiocres, et 20% peuvent véritablement être qualifiés de taudis: 1 logement sur 5 n'a pas d'eau à l'évier, les deux tiers ne disposent pas de WC, et 95%, de salle d'eau. Mais le problème n'a pas été créé par la guerre. Depuis la fin du XIXe siècle, Saint-Etienne a beaucoup grandi, mais très peu construit. Résultat: la ville a vieilli sur elle-même et se trouve après guerre dans une situation désastreuse, que les bombardements ont simplement aggravée. C'est alors qu'Alexandre de Fraissinette, maire élu en 1947, fixe le logement comme l'une de ses priorités.
Oui. Et ce ne sera pas un vain mot. Rendez-vous compte: on passe de 114 logements construits en 1948 à 531 en 1951, 1 085 en 1954, 1 694 en 1957 et même 2 932 en 1959! L'effort est gigantesque. Mais le changement est aussi qualitatif. A la fin des années 1940 et au début des années 1950, la France va connaître une rupture architecturale avec l'apparition des premiers grands ensembles. Saint-Etienne sera l'une des villes symboles de cette rupture. Comment cette nouvelle architecture est-elle accueillie? Très favorablement par les classes moyennes, beaucoup moins par les classes populaires. Cela paraît paradoxal, pour du logement social!Le paradoxe n'est qu'apparent. On l'a oublié aujourd'hui, mais les premiers grands ensembles sont réservés aux familles de moins de trois enfants ayant des revenus corrects, autrement dit aux classes moyennes. Alors que, depuis la guerre, celles-ci devaient se contenter d'une ou de deux pièces mal équipées, elles se voient soudain proposer des logements spacieux, avec de la verdure, de la lumière, une salle d'eau, des WC, le chauffage central. Cela leur paraît merveilleux! Les pauvres, eux, continuent de s'entasser dans de petits appartements sans confort, quand ce ne sont pas des taudis, en particulier à Tarentaize et à Beaubrun, ou des bidonvilles, du côté de Méons, près des puits de mine et des usines sidérurgiques. Ce n'est que plus tard, à partir des années 1970, que les grands ensembles seront prioritairement réservés aux pauvres et aux familles immigrées. Mais, dans les années 1950, les grands ensembles sont encore synonymes de progrès social. Et même au-delà. On est persuadé que ce nouvel habitat va entraîner le recul de la maladie, de la délinquance, voire de la mésentente entre les époux! Il existe ainsi une «commission du bonheur ou des grands ensembles»! On croit rêver...C'était l'ambiance de l'époque, avec ses utopies et ses excès. Pour les architectes, si l'un des repo
42 - Saint-Etienne le groupe Beaulieu/Marandiniére/Montchovet - Loire -
mémoire2cité - le 17 janvier 2019 - Montchovet et l'ANRU2 Le secteur Loti, dans le quartier de Montchovet à Saint-Etienne le long de la RN88, va bénéficier d’un réaménagement global marqué par la démolition du centre commercial de la Palle et la création d’une zone d’activité. C'est une nouvelle zone d'activité, située entre Montplaisir et le boulevard de la Palle, qui est en cours de création dans le secteur Loti. Cette zone d’activité de 10 000 m2, portée conjointement par la Ville de Saint-Étienne et Saint-Étienne Métropole, s’inscrit dans le projet global de transformation urbaine de ce quartier. Pensée pour s’insérer parfaitement dans le tissu urbain, elle devrait accueillir dès 2019 ses premiers occupants avec une extension du pôle motos. 2 démolitions d'ici 2020 pour Montplaisir , 2 autres pour la Fausse Marandiniere, ainsi que le centre commerçial de l'ARC EN CIEL coté Marandiniere. çe qui porte à 5 démolitions futur d'içi à 2020/2022 pour le secteur sud-est. Ce pour créer de nouveaux espaces économique, quatre immeubles de Métropole Habitat vont être démolis en 2020/22. Le bailleur social, en lien avec la Ville et Saint-Étienne Métropole, diligentera dès 2018 une enquête sociale auprès des 60 familles concernées afin de leur proposer des solutions de relogement en adéquation avec leurs attentes. La disparition du petit square, devant ces immeubles, sera compensée par l’amélioration des abords du centre nautique Yves Nayme et la mise en place d’un espace de détente. La rue Loti redessinée Autre modification importante du paysage urbain du secteur : le remodelage de la rue Loti. Créée à l’origine pour un quartier résidentiel, avec des courbes importantes sur sa partie nord, elle a été entièrement redessinée pour permettre la desserte de la future zone d’activité. Plus large, plus droite, la nouvelle rue Loti prendra racine au nord dans l’axe de la rue des Villas, avec la mise en place d’un carrefour sécurisé et se connectera au même endroit qu’aujourd’hui, boulevard de la Palle. Les travaux démarreront début 2018, après l’enquête publique que mènera SaintÉtienne Métropole. www.zoomdici.fr/actualite/Saint-Etienne-de-gros-travaux-e... - l'Opération de Beaulieu 1 2 3 4 à Saint-Etienne, par Rachid Kaddour. Deux dates symboliques : l’année de sa livraison (1956), & l’obtention de son label Patrimoine du XXe siècle (en 2003). Ce label inscrit Beaulieu dans un processus de valorisation patrimoniale par l’architecture, et le place ainsi en terrain laboratoire pour une réflexion sur la patrimonialisation des grands ensembles Cette labellisation n’est toutefois pas la seule démarche de valorisation patrimoniale et mémorielle conduite pour Beaulieu et les grands ensembles voisins : les années 2000 voient s’y multiplier les entreprises visant à identifier et valoriser d’une part les singularités architecturales et urbaines de Beaulieu, et d’autre part les récits de vie contrastés de différents groupes d’habitants des grands ensembles. La somme de ces entreprises patrimoniales et mémorielles, près d’une dizaine, conforte l’idée d’exemplarité des Quartiers sud-est de Saint-Étienne. D’autant plus que, dans l’histoire des grands ensembles français, ces Quartiers sont particulièrement précurseurs : Beaulieu est l’un des plus vieux de France, tandis que son voisin Montchovet est un pionnier de la politique de la Ville, puis de la rénovation urbaine et des travaux de deuil par le recueil de mémoires qui accompagnent cette dernière.Si l’on se place dans une perspective d’analyse des jeux d’acteurs, représentations et stratégies conditionnant les processus de fabrication du patrimoine, suivant en cela les approches traditionnellement menées par la géographie sociale (Gravari-Barbas, 2002 ; Veschambre, 2007 ; Hertzog, 2011), il est possible de s’interroger ici plus spécifiquement sur la place laissés aux mémoires plurielles d’habitants dans la définition et la valorisation de ce qui fait patrimoine dans les grands ensembles du sud-est de Saint-Étienne. La particularité de cette réflexion réside dans le fait de la placer au cœur de la rénovation urbaine qui fait l’actualité des grands ensembles.Les informations analysées ici ont été recueillies par une recherche documentaire (revue de presse, consultation d’archives administratives et de documents techniques), par la réalisation d’entretiens avec des représentants des différentes institutions et associations impliquées (directeurs successifs de l’organisme d’HLM, techniciens du service Urbanisme de la Ville, travailleurs sociaux et enseignants) ainsi qu’avec des habitants, et par des observations sur site (transformations spatiales).Un retour sur la livraison et l’évolution des Quartiers sud-est permettra dans un premier temps de donner la contextualisation nécessaire à la compréhension de ce qui se joue aujourd’hui. Cet historique permettra d’insérer ensuite dans l’épaisseur et la dynamique du temps long un inventaire espéré exhaustif des initiatives réalisées depuis le lancement de la rénovation urbaine par les différents acteurs institutionnels et associatifs. Cet inventaire est réalisé à partir d’une définition large de la notion de patrimoine, prise dans ses différentes acceptions notariale, immobilière et culturelle. Ces éléments contextuels et factuels collectés, il s’agira enfin, dans le dernier tiers de cette présentation, de les confronter et de les mettre en cohérence afin de proposer une interprétation sur ce qui fait patrimoine dans les grands ensembles du sud-est de Saint-Etienne. Cela permettra une réflexion sur la place que les mémoires plurielles d’habitants y tiennent.Quartiers sud-est de Saint-Étienne : des grands ensembles contrastés, des habitants divers
6Cette première partie a pour objet de présenter les grands ensembles du sud-est de Saint-Étienne. Pour cela, il est nécessaire de prendre le temps d’en faire un historique. Il s’agit notamment, en plus de donner les éléments urbains et économiques propres à l’agglomération stéphanoise dans la grande région lyonnaise, de s’intéresser aux acteurs de la vie de ces grands ensembles depuis leur construction, en présentant les principales actions menées par les institutions gestionnaires, et en identifiant les principales catégories sociales d’habitants ayant successivement occupé les lieux. Au niveau des sources, cet historique s’appuie sur les travaux existants, complétés par des études techniques (dont le dossier de candidature au Grand projet de ville - GPV), une revue de presse et des entretiens avec les gestionnaires.L’expression est tirée du film La crise du logement, 1954, réalisation Roger Montéran, Maryse Barbu (...)angers (677 logements), Boulogne-Billancourt (800 logements), Bron-Parilly ( (...)
Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la ville de Saint-Étienne se voit surnommée Capitale des taudis en raison des taux élevés de surpeuplement et d’insalubrité de son parc de logements. Cette crise du logement débute avec l’important développement industriel du XIXe siècle et la fulgurante croissance démographique qui l’accompagne : de 25 000 personnes après la Révolution française, la population stéphanoise passe à plus de 190 000 dans les années 1930. Or, la construction d’habitations par le patronat ne suit pas, les compagnies minières et métallurgiques se contentant de laisser les ouvriers se loger dans l’existant et les immeubles des artisans. Comme dans nombre de villes françaises, c’est la construction de grands ensembles au début des années 1950 qui permet de porter un coup décisif à cette crise tenace. La ville présente la particularité d’abriter l’un des six premiers grands ensembles de France : imaginé à partir de 1949, Beaulieu est construit entre 1953 et 1955 dans le cadre du plan national dit Courant2, et compte 1 262 logements HLM modernes et confortables. Il n’est que la première opération d’un plan plus vaste qui, pour ce qui concerne le seul sud-est de la ville, amène à la production de plus de 6 000 logements, dans les grands ensembles de Beaulieu II - Marandinière (1957-1959), Beaulieu III - Montchovet (1962-1965), Beaulieu IV - la Palle (1967-1970) et dans celui de la Métare en copropriété (1962-1974, voir illustr) C’est plus particulièrement sur les grands ensembles de Beaulieu et Montchovet, mitoyens, que l’attention va ici porter. Leurs formes divergent, puisque le premier compte 19 barres et une tour formant un ensemble urbain particulièrement soigné (illustration 2), alors que le second (1 266 logements) est composé de huit barres, certaines très imposantes, implantées simplement parallèlement ou perpendiculairement les unes aux autres.
Auteur : R. Kaddour.
Montchovet présente simplement une population plus jeune, du fait de plus grands appartements ; il (...)
9Leurs occupations initiales (Vant, 1974 ; Blanc, Bonilla, Tomas, 2003) sont par contre significativement proches, puisqu’ils accueillent tous deux très majoritairement des ouvriers de l’industrie (principalement qualifiés) et des fonctionnaires, soit des catégories sociales que l’on qualifierait aujourd’hui de moyennes (illustration 3)3. La crise du logement est en effet telle à Saint-Étienne que les demandes d’HLM émanent de catégories sociales très variées, et, pour les grands ensembles, l’office municipal gestionnaire sélectionne les locataires suivant leur solvabilité. Les plus pauvres des demandeurs de logements HLM, ainsi que les immigrés et familles originaires du Maghreb, quand ils sont accueillis, le sont dans des opérations de taille plus réduite, formant un habitat spécifique (Logements de première nécessité, Programmes sociaux de relogement, opération Million…). Autrement, ils occupent le parc de logements vieilli, insalubre ou précaire de la ville.En 1979, 46 % des nouveaux arrivants sont étrangers. Les chefs de ménages étrangers représentent à (...)
5 L’acuité du questionnement local se voit par ailleurs accru par le contexte national puisque, paral (...)
6 « L’office doit conserver un caractère social mais néanmoins, il ne peut pas accueillir n’importe q (...)
7 « Quand la Muraille de Chine s’éveillera », Hebdo, 2 novembre 1983.
10Cette occupation sociale des grands ensembles du sud-est de Saint-Étienne dure jusque dans la deuxième moitié des années 1970, à partir de laquelle Montchovet voit sa population se paupériser, suivant des mécanismes connus (Dubet F., Lapeyronnie D., 1992 ; Blanc J.-N., Bonilla M., Tomas F., 2003) : les catégories les plus aisées commencent à quitter Montchovet dès le milieu des années 1970, la suite de leur parcours résidentiel les menant vers l’achat d’un nouveau logement (ailleurs dans la ville puis dans le périurbain qui se développe) ; une partie des ménages restant sur place se voit quant à elle petit à petit frappée par la crise socio-économique et le chômage qui touchent durement l’agglomération. Le cas stéphanois présente toutefois la particularité de connaître un processus exacerbé, avec une politique ethnique affichée sans détour. À partir du milieu des années 1970, Montchovet accueillent en effet quelques ménages d’origine étrangère, venant du logement spécifique ou des quartiers insalubres du centre-ville en voie de résorption4. Un choix s’impose alors aux gestionnaires de Montchovet (Ville et office) : encourager le mouvement de paupérisation et d’« ethnicisation » ou le freiner5. La municipalité d’union de la gauche (1977-1983) tente de résister à ces évolutions en préparant avec les associations d’habitants une réhabilitation de Montchovet, retenue par l’État dans le cadre de la procédure Développement social des quartiers (DSQ, François Mitterand se rendant même lui-même à Montchovet pour une visite express), visant à maintenir les catégories moyennes dans le grand ensemble6. Mais la municipalité RPR-UDF élue à la suite (1983) réoriente le projet, avec d’une part un volet bâti axé non plus principalement sur les logements mais sur une réhabilitation lourde des façades (isolation colorée, percées et démolition très partielle), et d’autre par un volet social expérimentant une gestion ségrégative de la ville. Montchovet se voit en effet attribuer une fonction d’accueil de familles d’origine maghrébine et aux revenus peu élevés. Le maire affirme : « au risque de choquer, je dirais que vouloir l’intégration à tout prix est un non-sens car personne ne la veut d’un côté comme de l’autre […]. En revanche, je crois que vouloir faciliter les petits regroupements par ethnie serait préférable »7. La paupérisation de la population de Montchovet va grandissant tout au long des années 1980 et 1990, avec pour corollaire les problèmes sociaux et de gestion qui en font un « quartier sensible », le plus dur de la ville : précarité (98,3 % d’allocataires en 1996, taux de chômage de 34,3 %), échec scolaire, multiplication des actes d’incivilité et de délinquance (incendies nombreux de véhicules, agressions dont l’une tourne au drame), forte vacance de logements (68 % d’occupation totale en 1996).La dévalorisation de Montchovet est telle qu’en 1995, à peine plus de dix ans après la signature de la convention DSQ, le maire fraîchement élu (Parti radical), ex-adjoint à l’urbanisme du maire précédent, fait de la démolition de l’immeuble symbole du quartier la première grande décision de son mandat. Cette barre, le bâtiment A surnommé Muraille de Chine du fait de ses 250 mètres de long environ, de ses seize niveaux dans sa partie la plus haute et de ses 526 logements à sa livraison, est démolie le 27 mai 2000 Le maire justifie cette démolition par un triple argumentaire : le rejet de l’immeuble par les Stéphanois (qu’il lit dans la vacance), la déconcentration des populations en difficulté (même si environ 70 % des locataires sont in fine relogés dans le grand ensemble et ses voisins) et l’échec des réhabilitations menées jusqu’ici. L’évènement est fortement médiatisé, à l’échelle locale mais aussi nationale, puisque le ministre de la Ville Claude Bartolone vient à Montchovet tenir un discours signifiant que cette démolition par implosion, la première d’une série ayant lieu en 2000, marque un tournant dans le traitement des grands ensembles, avec passage à la rénovation urbaine. Affirmation basée sur des entretiens avec le personnel de l’organisme d’hlm, les responsables de l’ (...)« Beaulieu – le Rond-Point. Une importante opération de réhabilitation », La Tribune-Le Progrès, 15 (...)Pendant que Montchovet glisse dans les difficultés, le grand ensemble voisin de Beaulieu connaît une évolution discrète et tranquille, voyant simplement sa population vieillir mais garder un caractère assez mixte. Et au moment même où la Muraille de Chine est démolie s’achève à Beaulieu une réhabilitation (façade, parties communes, implantation d’ascenseurs) qui donne toute satisfaction aux locataires si l’on en croit la presse et le taux de vacance faible.Ainsi, à l’entrée dans le nouveau millénaire et un demi-siècle après leur lancement, le contraste dans l’occupation sociale et les actions entreprises par les gestionnaires entre Beaulieu et Montchovet montre que les grands ensembles du sud-est de Saint-Étienne constituent des héritages alors dans des situations et des perspectives très variées. C’est dans ce contexte qu’au long des années 2000 des opérations de valorisation se développent tous azimuts dans et pour les grands ensembles stéphanois.
Valorisation de patrimoine(s) dans les grands ensembles : processus polyphonique, voire cacophonique.
Cette deuxième partie a pour objet d’inventorier et de présenter les différentes initiatives de valorisation de patrimoines dans les grands ensembles du sud-est de Saint-Etienne, plus finement que cela n’a été fait en introduction. Deux éléments qualifient cet inventaire. D’une part, la notion de patrimoine est ici prise dans ses différentes acceptions, afin de viser l’exhaustivité. D’autre part, une attention particulière est bien sûr portée aux démarches à l’initiative d’habitants, ou en impliquant. Des entretiens avec les instigateurs des différentes démarches ont été conduits afin de saisir leurs tenants et aboutissants.La démolition de la Muraille de Chine ouvre la voie à un projet plus large encore. Soucieux d’enrayer le processus de dévalorisation de Montchovet, qui commence à s’étendre à certains immeubles des grands ensembles voisins (la Marandinière et la Palle), l’organisme d’HLM propriétaire, avec le soutien financier de la Ville, confie dès 2000 à l’urbaniste Loïc Josse la mission de définir un schéma directeur pour une intervention sur la totalité des grands ensembles HLM du sud-est (soit les grands ensembles HLM de Montchovet, Beaulieu, la Marandinière et la Palle). Les moyens de conduire cette intervention sur ce qui sera dénommé désormais les Quartiers sud-est sont trouvés d’abord dans un Grand projet de ville (2001), puis dans une convention ANRU (2005).Le schéma prévoit aussi l’implantation d’équipements privés (zone d’activité) et publics (piscine m (...)
Dans le détail et pour la partie habitat10, les travaux mis en œuvre comprennent d’abord la démolition des plus grands immeubles (environ 500 logements, illustration 5), principalement à Montchovet (où il ne reste aujourd’hui plus qu’un sixième des logements initiaux) ; ensuite la reconstruction d’une douzaine d’immeubles de taille plus modeste, de statuts variés (HLM, locatif privé, propriété) et répondant à des demandes actuelles (développement durable, accès des logements sur l’extérieur avec des terrasses, etc.), ainsi que d’un lotissement de maisons mitoyennes ; enfin la réhabilitation des immeubles conservés, avec entretien courant des appartements et parties communes, à Beaulieu notamment.La stratégie d’intervention sur le spatial est à ranger du côté de la communication, puisqu’il s’agit de changer l’image des grands ensembles via un remodelage profond. L’objectif, quant à lui, se situe du côté du peuplement, avec trois dimensions. Il s’agit d’abord de déconcentrer les familles en difficulté (Montchovet). Des efforts sont aussi déployés pour maintenir sur place les habitants les plus aisés restés à Beaulieu ou ailleurs, avec notamment des travaux d’adaptation des logements au vieillissement des populations. Il s’agit enfin de tenter d’attirer dans des logements neufs des populations de profils sociaux plus élevés que ceux d’une partie des familles en place, soit les plus aisés des demandeurs HLM en termes de revenus, ainsi que des catégories moyennes (dans les logements privés). En espérant ensuite qu’une osmose s’opère entre immeubles anciens et les immeubles nouveaux, et populations anciennes et populations nouvelles. Le programme stéphanois est de ce point de vue exemplaire de ce qui se passe dans d’autres grands ensembles en France (Stébé, 2010 ; Donzelot, 2012).Ce programme est inscrit dans le Plan stratégique de patrimoine de l’organisme, soit un document qui, pour l’ensemble du parc, prévoit les interventions à mener dans le cadre d’une gestion pour les années voire les décennies à venir. Le terme de patrimoine est ainsi utilisé ici par l’organisme dans un sens immobilier et notarial : l’organisme fait in fine de la valorisation de patrimoine.Mais si l’on prend le terme dans son sens culturel, d’autres opérations de valorisation de patrimoine(s) sont menées durant la même décennie, selon trois étapes. Celles-ci impliquent toutes, d’une façon ou d’une autre, des habitants.Ricoeur P., 2000. La mémoire, l’histoire, l’oubli. Paris, Le Seuil, p. 577.
12 Passages en italiques extraits d’un entretien avec l’ex-directeur de l’école primaire de Montchovet (...)
École Montchovet et collège Jean-Dasté Saint-Etienne, 1999. Murmures de Muraille. Imprimerie Sud-Of (...)
Les textes sont trop longs pour être reproduits ici, et il est difficile d’en extraire des parties (...)
Tout d’abord, l’annonce de la démolition de la Muraille de Chine engendre une série d’initiatives à ranger du côté du « travail de deuil, par lequel nous nous détachons des objets perdus de l'amour et de la haine ». Ce sont en premier lieu l’école primaire et le collège situés tout à côté de la Muraille qui, constatant le malaise suscité chez les enfants par la démolition à venir, conduisent un travail de photographie, de dessin et d’écriture afin de permettre de « mettre des mots sur des maux », les enseignants instigateurs ayant identifiés des « traumatismes » causés par l’annonce de la démolition. Les dessins, poèmes et récits réalisés, publiés en 1999 dans le livre Murmures de Muraille13 grâce aux moyens du Réseau d’éducation prioritaire, content principalement la douleur de voir l’immeuble disparaître, la crainte qu’inspire aux enfants la perte à venir des repères et habitudes, et une colère envers les décideurs engageant la démolition14.
« En 1971, […] dans ce quartier, j’habitais un appartement de 5 pièces, plus la cuisine ; un logeme (...)« Je me souviens du lieu de prière avec les hommes tous en djellabas blanches, qui se pressaient po (...)
« C’est de la rancœur et de la haine que j’éprouve en écrivant ces quelques lignes. Montchovet rest (...)
Présentation du film sur la pochette du DVD.
le 27 mai 2000, 13h : démolition d’un immeuble moderne baptisé Muraille de Chine, 2002, réalisation Je (...)Entretien avec l’ex-directeur de l’image du film, 16 février 2010 Le maire refuse d’être interviewé.
Quelques semaines avant la démolition de l’immeuble, c’est cette fois-ci avec des adultes qu’un travail similaire est mené, sans moyen, à l’initiative des associations et structures socioculturelles. Dans le cadre d’une « fête » de quartier, les désormais anciens locataires sont invités à présenter et partager leurs souvenirs, notamment en les inscrivant sur de larges feuilles apposées sur les murs de l’école primaire. Ces feuilles ont été depuis perdues, mais en 2008, un dispositif semblable est reconduit, à l’occasion de la démolition d’un autre immeuble dans le même secteur. Aux dires des habitants présents lors des deux manifestations, les propos formulés sont sensiblement les mêmes. Ils sont cette fois-ci consignés par le centre social et reproduit dans un petit dossier papier 14 juin 2008, rue Pierre-Loti, 40 ans de souvenirs. Ils portent surtout sur le vivre-ensemble dans ce grand ensemble depuis l’uniformisation de la population, avec des récits de faits, pour certains anecdotiques, jugés positifs (la découverte du confort dans ces immeubles, l’entraide entre voisins amis, les jeux d’enfants, les festivités et rites musulmans) ou négatifs (la délinquance, le sentiment d’abandon par les pouvoirs publics, le traumatisme de la rénovation urbaine dans le quartier). En somme, comme dans le cas de Murmures de Muraille, ces témoignages consignés et diffusés sont des éléments visibles d’une mémoire partagée d’un vivre-ensemble (communautaire), et d’une mémoire de difficultés quotidiennes et de luttes. Ces mémoires constituent un patrimoine immatériel. Enfin, quelques années après la démolition de l’immeuble, la mémoire d’anciens locataires est à nouveau sollicitée lorsque l’Opéra-Théâtre de la Ville de Saint-Étienne, qui dispose d’une Unité de production audiovisuelle, prend l’initiative de réaliser un film documentaire de 32 minutes sur « la réussite de la construction, l’échec de la restauration » et les raisons de la démolition de la Muraille de Chine. L’équipe est animée par une double volonté de « garder une trace, puisque c’était un immeuble très singulier de Saint-Étienne » et de « traiter du ressenti de cette perte chez ses habitants ». Le film prend le parti de s’appuyer très majoritairement sur des interviews. Les témoins sont toutefois principalement des locataires de la première heure21, si bien que ce sont donc surtout les premières années qui sont contées, avec la modernité de l’immeuble et la découverte du confort. Une place est toutefois laissée aussi à des récits de la lutte pour l’équipement du quartier (à sa livraison, pendant le DSQ) et contre sa relégation (pendant les années les plus difficiles).Ensuite, après ce travail de deuil, de recueil de témoignages et de valorisation de mémoires, une autre forme de valorisation de patrimoine culturel survient en 2003, avec la labellisation Patrimoine du XXe siècle de Beaulieu par le ministère de la Culture et de la Communication, en raison de ses spécificités bâties (forme organique de la composition, adaptation au relief, travail sur les parcs et jardins) et historiques (caractère pionnier, apport au quotidien domestique). Celles-ci sont identifiées depuis la fin des années 1980 par des travaux de l’École d’architecture et de l’Université de Saint-Étienne.
Direction des Affaires culturelles de la Ville de Saint-Étienne.Enfin, deux ans après, à l’occasion du cinquantenaire du grand ensemble (2005), Saint-Étienne Ville d’art et d’histoire, chargé de la valorisation et l’animation du patrimoine stéphanois, réalise un projet intitulé Beaulieu, patrimoine urbain du XXe siècle, comprenant, outre la pose de la plaque-label, la pose d’une signalétique patrimoniale, l’édition d’un ouvrage sur l’histoire et les spécificités bâties du site et la reconstitution d’un appartement des années 1950 proposé à la visite. Ce dernier est réalisé avec l’aide d’habitants installés depuis l’origine : ils donnent ou prêtent la quasi-totalité des objets exposés, et font part de souvenirs qui permettent d’en concevoir le discours de visite. Celui-ci porte sur la découverte du confort moderne permise par les grands ensembles, sur le quotidien domestique dans les années 1950 (activités féminines, masculines, des enfants), mais également sur l’architecture et l’urbanisme des Trente glorieuses. L’école primaire de Beaulieu participe quant à elle à ce cinquantenaire, avec la réalisation d’un petit film documentaire et d’animation sur la naissance du quartier. Le propos porte sur la crise du logement et la forme bâtie originale de Beaulieu.Une plaquette d’information produite par la Ville (n.d.) associe d’ailleurs ces deux aspects : à cô (...)
Ainsi, le lien établi entre les différentes acceptions du terme de patrimoine (culturelle et notariale-immobilière) permet de conforter le constat fait en introduction d’une « patrimonialisation » des grands ensembles du sud-est de Saint-Étienne. Ce processus de « patrimonialisation » est complexe, car polyphonique : les nombreuses actions croisées, émanent d’acteurs très variés, de la puissance publique (État, Ville) aux associations d’habitants, en passant par des institutions comme l’organisme d’HLM, les écoles ou les équipements socioculturels de quartier. Mais le processus est aussi assez cacophonique. En effet, pour chacun de ces acteurs, les motivations sont variables et le patrimoine à valoriser ne recouvre pas les mêmes éléments. Ces éléments peuvent même être contradictoires voire hermétiques les uns par rapport aux autres. Par exemple, les mémoires des premiers locataires ayant connu la mixité sociale diffèrent de celles des derniers locataires de Montchovet ayant connu le « ghetto ». De même, les locataires sont globalement peu sensibles au patrimoine architectural tel que le valorisent la DRAC et Saint-Étienne Ville d’art et d’histoire (si l’on en croit le profil des visiteurs – majoritairement des Stéphanois d’autres quartiers, et des scolaires).
La complexité du processus global de « patrimonialisation » comme les contradictions entre les démarches), n’est pas problématique en elle-même, et tendrait plutôt à être une richesse. Mais elle ne permet pas de comprendre au premier abord les tenants et aboutissants de la « patrimonialisation ». C’est donc à l’identification de ceux-ci que les lignes suivantes vont s’attacher, dans le but de mieux cerner la place et le rôle que les démarches habitantes tiennent et jouent dans la patrimonialisation.Récupération, instrumentalisation et délaissement des paroles des locataires : mémoire du mouvement HLM contre mémoires d’habitants
27La contextualisation historique, la présentation des acteurs et enjeux des démarches de valorisation de patrimoines et le recueil de matériaux réalisés permettent à présent, dans cette dernière partie, de donner du sens à cette association cacophonique entre grand ensemble et patrimoine, en en fournissant des clés d’explication. L’image peut être celle d’un « système » complexe (la « patrimonialisation »), dont les composantes (acteurs, motivations, initiatives) ont été démontées plus haut, et qu’il s’agit à présent de remonter pour en comprendre la logique d’ensemble. Puisqu’il s’agit d’un processus global de (re)valorisation, donc d’un bénéfice espéré, on peut se demander à qui profitent la « patrimonialisation » et les différentes démarches de valorisation qui la compose, dans leur cohérence d’ensemble éventuelle ? La réflexion doit porter en particulier sur la « patrimonialisation » de Beaulieu, puisque Montchovet n’existe presque plus.Dans une logique chère à la géographie sociale, celle du « renversement de l’ordre des facteurs » (Rochefort, 1982), c’est plus particulièrement autour de la question du peuplement (Morel-Journel, Sala-Pala, 2011) qu’une interprétation va être ici proposée, puisque, comme montré précedement, cette question est au cœur de l’histoire et de l’actualité des grands ensembles, et donc au cœur de leur « patrimonialisation ».Lire à ce sujet : Collectif, 2010. 1945-1975. Une histoire de l’habitat. 40 ensembles « Patrimoine (...)
Etoiles de Jean Renaudie à Villetaneuse, Serpentin d’Emile Aillaud à Pantin, cité de l’Etoile de Ge (...)
Toutes les citations de ce paragraphe sont des propos du directeur de l’organisme d’HLM propriétair (...)
Ce qui, l’histoire le montre, peut être un effet de certaines politiques et lois.
La « patrimonialisation » des ensembles de logements sociaux est généralement associée à des initiatives de préservation du bâti, principalement en raison de son exemplarité architecturale. Mais ces initiatives apparaissent souvent aux organismes d’HLM comme discordantes avec les logiques de gestion, en particulier l’adaptation du bâti à la vie qui continue (évolutions sociales, vieillissement du cadre physique, etc.). Des cas nombreux, en région parisienne notamment, montrent que les organismes ne souhaitent en effet généralement pas voir leurs immeubles mis « sous cloche ». Toutefois, cette réticence à la « muséification » ne signifie pas insensibilité à l’architecture et aux spécificités du bâti. Au contraire, dans le cas de Beaulieu à Saint-Étienne, l’organisme paye même la pose de la plaque-label Patrimoine du XXe siècle (label sans incidence juridique ni exigence de restauration), et affirme avoir tenu à « faire des greffes qui vont dans le sens initial » lors des réhabilitations de 2000 et 2006 (matériaux, couleurs et modénatures des façades et des ascenseurs et passerelles construits, références aux années 1950 dans les fresques peintes). Mais ce respect de l’architecture moderne tient plus au fait que cette dernière a été l’outil, le signe et la matérialisation d’un projet sociopolitique lui-même moderne. Via ce que l’on nomme le « mouvement HLM », il s’agissait d’offrir un logement décent et confortable au plus grand nombre. Beaulieu, groupe HLM parmi les plus anciens produits sur le territoire stéphanois, est pour l’organisme propriétaire un symbole de l’institution et de ses missions. Occupé aujourd’hui encore par une population relativement mixte, il représente plus précisément un emblème et la mémoire de l’idée initiale d’un habitat social pour tous, et non pour les seuls démunis comme a pu le devenir Montchovet par exemple.Mais la démarche de valorisation des spécificités de Beaulieu par l’organisme va plus loin encore. D’une part son architecture adaptée à la colline sert de modèle pour la reconstruction (en cours) du grand ensemble de la Marandinière (200 logements) situé sur la colline voisine (jeu de symétrie inversée, illustration 7), et d’autre part une imitation de sa relative mixité sociale est tentée avec le découpage de cette nouvelle opération en statuts variés (locatif privé et public, accession sociale à la propriété). Beaulieu est ainsi un point d’appui, y compris donc au sens topographique, pour la « reconquête » du reste du parc de grands ensembles qui a connu une paupérisation de sa population. Ce grand ensemble est ainsi pour l’organisme et la Ville un modèle refondateur pour les Quartiers sud-est remodelés et reconstruits.En somme, un retour aux origines du mouvement HLM est tenté. Ce sont ce rapport au passé et cette sollicitation d’une « identité » du mouvement HLM qui donnent du corps à l’idée de patrimoine. Ainsi replacée dans la perspective des logiques de gestion par l’organisme HLM et ses partenaires institutionnels, la « patrimonialisation » des Quartiers sud-est apparaît donc à la fois comme l’expression des logiques qui ont porté la production de logements sociaux, et le levier de mise en cohérence de stratégies de réhabilitation matérielle et symbolique des grands ensembles du sud-est.Cette démarche de construction et de valorisation d’un patrimoine et d’une mémoire du mouvement HLM se développe contre la construction et la valorisation d’autres patrimoines et mémoires, notamment ceux des habitants. Le terme de « contre » est ici à prendre dans ses deux sens, à commencer par celui de proximité. En effet, cette « patrimonialisation » peut s’alimenter des démarches valorisant les témoignages et mémoires des plus anciens locataires, ceux ayant connu les premières heures des grands ensembles de Beaulieu et Montchovet et l’occupation initiale mixte à laquelle les gestionnaires tentent de revenir. De ce fait, l’organisme est partenaire de toutes les actions renvoyant au contexte de construction de Beaulieu et aux années de sa jeunesse (comme de celle des autres grands ensembles). L’appartement reconstitué des années 1950 avec son mobilier de catégories ouvrières et moyennes et son discours de visite signalant en creux l’occupation mixte initiale en est une bonne illustration : l’organisme met l’appartement à disposition et paye les travaux pour les murs et sols. D’autres actions allant dans le même sens comme l’ouvrage ou les films sur la construction de Beaulieu reçoivent un soutien bienveillant de l’organisme d’HLM. Il est possible de parler ici de récupération, voire en quelque sorte d’instrumentalisation.Le partenariat avec l’organisme, ou son soutien, permettent aux témoignages et mémoires d’habitants de la première heure (principalement locataires de Beaulieu et catégories moyennes et ouvrières) d’être recueillis et valorisés dans des supports soignés, durables et réalisés avec des moyens significatifs : des films, un ouvrage et l’appartement reconstitué des années 1950. Ce qui n’est pas le cas d’autres témoignages et mémoires d’habitants, en particulier ceux des locataires les plus pauvres et arrivés récemment. Car la démarche de valorisation d’une mémoire du mouvement HLM se développe en effet contre les mémoires d’habitants, c’est-à-dire aussi en opposition à ces dernières. Les mémoires qui ne renvoient pas à une occupation mixte ne bénéficient pas ou très peu du soutien de l’organisme d’HLM ou de la Ville, puisque le discours qu’elles produisent est discordant par rapport au discours institutionnel. Les récits de vie communautaire et dans la précarité d’habitants de Montchovet devenu « ghetto », et plus encore les récits de lutte face aux institutions pour l’équipement du quartier ou contre les démolitions, s’expriment alors dans des supports éphémères et réalisés sans moyen : prise de parole lors de « fêtes », impression de paroles sur support papier simple diffusées dans un cercle très restreint. Ces mémoires ne sont alors posées et exposées dans l’espace et le débat publics que de manière très discrète, ce qui ne peut les faire accéder à un statut de patrimoine pour d’autres acteurs que les seuls (ex)locataires concernés.
Foret C., 1993, Valorisation et dévalorisation dans la ville : le musée urbain Tony Garnier ou la r (...)Gay G., 2008, « De Firminy-Vert à Le Corbusier Ville : la construction d’un patrimoine paradoxal », (...)Pour conclure, ce cas stéphanois rappelle que la « patrimonialisation » générale constatée en France touche aussi les marges de la ville. Le mouvement n’est pas neuf et a déjà été analysé pour la cité Tony Garnier à Lyon ou Firminy-Vert (Loire) par exemple. Chacun de ces cas montre à quel point le processus est complexe, avec notamment des acteurs nombreux (gestionnaires, institutions culturelles, habitants plus – Lyon – ou moins – Firminy – moteurs ou considérés…) et des motivations et finalités variées (culturelles, économiques, symboliques, etc.). Saint-Étienne n’échappe pas à cette complexité. Il a donc d’abord fallu s’attacher ici à trouver du sens à la démarche d’ensemble menée dans les Quartiers sud-est. L’analyse dans l’épaisseur historique a permis d’expliciter une entreprise globale portée par l’organisme propriétaire : Beaulieu, emblème de l’idée initiale d’un habitat social pour tous (et non pour les seuls démunis), est consolidé et imposé comme modèle pour la réhabilitation, dans ses aspects matériel et juridique, des grands ensembles paupérisés. C’est cette recherche de l’état initial qui donne le plus de sens à la « patrimonialisation », processus de valorisation tant symbolique que matériel.Une fois ce préalable posé, l’analyse a permis de montrer que cette démarche d’ensemble fait une place inégale aux différentes mémoires : celles des plus anciens locataires, aux profils ouvriers ou de catégories moyennes, sont recueillies et valorisées, alors que celles des habitants les plus précaires sont délaissées. Ainsi, les catégories d’habitants les plus populaires des Quartiers sud-est (pour partie significative d’origine maghrébine), fragilisées par la précarité, contraintes de faire face au relogement (et donc implicitement à la déconsidération de leur habitat par les institutions gestionnaires et l’opinion publique), voient aussi leur place dans la société questionnée dans le domaine symbolique par la thématique patrimoniale. Ces catégories sociales ne laissent pas ou peu de traces, alors que le champ mémoriel et patrimonial est pourtant bel et bien ouvert dans les quartiers populaires. Ce constat formulé à partir du cas stéphanois est partagé par les sociologues et géographes développant des analyses et perspectives de réflexion autour du droit au patrimoine, du caractère socialement sélectif de la construction du patrimoine et de la participation de ce dernier aux systèmes des inégalités (Veschambre, 2007, 2008 ; Pinçon-Charlot, Pinçon, 2007). ------ la ville de St-Etienne & les Quartiers Sud-Est Aujourd'hui :
Proposer de nouveaux logements dans une démarche environnementale forte. Dans la poursuite des opérations engagées depuis 2001 (démolition de la Muraille de Chine en 2000, implantation du CHPL, de l ’AIMV en 2005), une qualité résidentielle s'affirme progressivement au sein des quartiers Sud-Est, grâce à une nouvelle offre d'habitat variée (en forme comme en type de produits). Le dynamisme du quartier s'appuie sur l'accueil et le développement de services, d'activités économiques et d'équipements d'agglomération (centre nautique, Nouveau Théâtre de Beaulieu...) et de proximité (salles de sport, travaux dans les écoles). Les atouts paysagers du site sont pleinement exploités dans une démarche environnementale forte. L'aménagement des espaces libres et la requalification des axes structurants et de desserte renforcent les liaisons internes aux quartiers et les ouvrent sur l'ensemble de la ville. Beaulieu, un patrimoine de qualité, valorisé et adapté à ses occupants
40 logement ont été adaptés au vieillissement de leur occupants (bacs à douche, volets électriques, aménagement des ascenseurs, …). L'amélioration des espaces extérieurs, résidentiels ou publics (rue K.Marx, square Renoir, allée Clémenceau) viendra rendre plus conviviaux ces lieux de vie partagés. Petite Marandinière : une cité jardin qui se rénove en gardant son caractère Sur la Petite Marandinière, 320 logements de Métropole Habitat ont été rénovés. Les bâtiments ont été transformés pour arriver à 32 logements, avec création de T3, T4, et T5 en tenant compte de la rénovation thermique et du confort des logements. 54 logements ont été construits, répartis en 6 bâtiments à l'architecture contemporaine et fonctionnelle (surfaces généreuses, double ou triple orientation, terrasse ou loggia). En parallèle, les espaces publics ont été réaménagés dans une démarche environnementale durable et innovante : résidentialisation et embellissement des espaces extérieurs, traitement paysager d'ensemble, requalification des voiries et des circulations douces adaptées aux usages, gestion optimisée du stationnement et des eaux pluviales...Une nouvelle mixité pour le quartier : les maisons de ville "Jardins Sembat" 22 maisons de ville (du T3 au T5) ont été construites à l’angle de la rue Marcel Sembat et du boulevard de Fraissinette. Conçu et développé par l'équipe XXL-Civita-Spirit, ce projet se caractérise par la qualité de la construction (matériaux durables, aménagement soigné des espaces extérieurs…) et par la mise en valeur paysagère du site, ouvert sur les collines du Pilat. 3 types de maisons ont été proposées en location libre : maisons jumelées le long du boulevard de Fraissinette, maisons en pente en fond de parcelle adossée au talus, maisons patio au cœur de l’îlot. Un nouveau centre nautique sur le secteur Loti Souhaité par les habitants, exemplaire d’une démarche participative de coproduction, le centre nautique Yves Naime a été ouvert à l'été 2013, en remplacement de l'ancienne piscine de la Marandinière. Ce centre nautique comprend un bassin sportif (25m, 6 lignes d'eau), un bassin destiné aux activités ludiques (bains bouillonnants, aquagym...), une pataugoire et des plages extérieures.Grande Marandinière : un secteur d'habitat en développement . Après la démolition de la barre Sisley et celle en cours de la barre Féguide, c'est un nouveau quartier qui se dessine sur ce secteur. La reconfiguration de la rue Sisley en voie de promenade avec des vues en belvédère et l'aménagement d'une « coulée verte » ont profondément modifié le paysage urbain du secteur. Ce nouvel environnement a permis à Métropole Habitat de réaliser un programme immobilier de 27 logements locatifs. Dans ce bâtiment collectif moderne et fonctionnel, chaque logement comporte un espace extérieur privatif, balcon ou terrasse. Au rez-de-chaussée, des locaux d'activités (centre social espace-loisirs) ou de services sont déployés le long de la nouvelle rue Sisley. La Palle : des résidentialisations de qualité
La résidentialisation des immeubles du boulevard de la Palle apporte aux habitants de nouvelles terrasses privatives en rez-de-chaussée, des espaces en cœur d’îlots plus agréables, et de nouveaux parcours piétonniers avec aires de jeux. Elle s’accompagne de la réhabilitation des immeubles (réfection des façades, changement des garde-corps…). Des opérations de résidentialisation ont été menées immeuble par immeuble de 2006 à 2009. Elles permettent de définir les limites entre les parties publiques ouvertes à tous, et les parties privées. Des petits jardins privatifs sont ainsi aménagés pour chaque logement de rez-de-chaussée. Le Pont Aven : du logement social à haute performance environnementale
Développé par Métropole Habitat, le Pont-Aven est un exemple en matière de construction écologique. Il accueille 20 logements sociaux du T2 au T5. L’ensemble de la conception du bâtiment intègre des critères environnementaux : parois extérieures en brique mono-mur, eau chaude solaire, chauffage collectif au gaz naturel, ventilation intérieure à double flux pour une meilleure circulation de l’air, équipements électriques et sanitaires économes en énergie. La toiture végétalisée permet quant à elle une meilleure conservation de la fraîcheur en été, les auvents du toit protègent les fenêtres du soleil et les eaux de pluie seront récupérées pour arroser les espaces extérieurs…Résultat : une diminution des rejets en CO2 et une baisse significative des charges de chauffage pour les locataires. Favoriser l'accessibilité et les relations inter-quartiers Le réaménagement du boulevard de la Palle a favorisé une meilleure desserte du quartier en transports en commun. Une station de taxis, des pistes cyclables et des pelouses ont été aménagées le long du boulevard, sécurisant ainsi la traversée piétonne entre les terrasses Roinat et le centre hospitalier. A l'intérieur du quartier, la trame piétonnière a été développée dans le principe d'une continuité paysagère entre les différents secteurs. Initiée avec l’aménagement des terrasses Roinat, une coulée verte, nouveau poumon vert du quartier, facilitant la circulation des piétons et des cyclistes, relie désormais le boulevard de la Palle, et plus loin le bois d'Avaize, au Parc de l'Europe. - Après la seconde guerre mondiale, un immense chantier s'ouvre en France dans le but de loger massivement une population démunie, les réalisations des HLM en France et la lutte contre l'habitat indigne insalubre , le film parle de St-Etienne entre autre avec les Cités du soleil 1958 de Jean-Claude Sée : www.dailymotion.com/video/xgj74q . Jusqu'au milieu des années 1970, cette période dite des « Trente Glorieuses l'après guerre et montre la plupart des grandes réalisations de 1945 à 1960. A travers les exemples de la région parisienne et de quelques grandes villes françaises sont posé les problèmes de la diversité architecturale, de l'esthétique et de l'harmonie entre le passé et l'avenir. Les images montrent les grands ensembles de Beaulieu, la Marandiniére, à Saint-Etienne, la cité le Haut du Lièvre à Nancy, des cités à Sarcelles, Asnières, Bron-Parilly, Epinay, Pantin, Bobigny, la cité radieuse de Le Corbusier à Marseille, le front de mer à Royan, la video de l'Année 1962, une réalisation de Philippe Brunet içi www.dailymotion.com/video/xgj2zz » fut le terrain de nombreuses expérimentations architecturales et urbanistiques, fondées notamment sur les idées émises plus tôt dans le siècle par le Mouvement moderne.Aujourd'hui, ces ensembles bâtis sont au cœur d'une autre actualité, liée à leur adaptation à l'évolution des modes de vie de notre société contemporaine. Cette question qui se posa dès la fin des années 1970 apparaît sous un jour nouveau, avec les premières démolitions dans les années 1980 et, plus récemment, le vaste programme de réhabilitation mis en place dans le cadre de la loi Solidarité et Renouvellement Urbain.
Après Les Grands Ensembles. Une histoire qui continue…, ce nouvel ouvrage, fruit de la collaboration entre l'École Nationale Supérieure d'Architecture de Saint-Étienne et l'Université Jean Monnet, apporte un éclairage nouveau sur cet héritage bâti, mettant au jour simultanément la question de son vécu et celle des acteurs engagés dans son édification. En réunissant quinze auteurs spécialistes de ce domaine, il s'agit de regrouper autant de points de vue, pour comprendre la diversité et la complexité des enjeux liés à la postérité de ce bâti. - « Petite enquête sur Beaulieu – Le Rond-Point », La Tribune du centre et du sud-est, 13 octobre 1955 et « Le chantier de Beaulieu – Le Rond-Point (1ère tranche) sera terminé le 30 juin 1956 très exactement »,La Tribune du centre & du sud-est, 26 juin 1956 -
«St-Etienne, la place des grands ensembles dans l’histoire de l’habitat social français »Saint-Étienne/Beaulieu, au sud-est de l’agglomération, sur le versant sud de la colline de Beaulieu, en forte pente et d’aspect semi-rural, la cité de Beaulieu est mise à l’étude dès 1950. Elle débute en 1953 et comprend 1 221 logements, un groupe scolaire et 35 boutiques. Des parrains prestigieux et l’élite de l’architecture sté- phanoise sont mobilisés pour ce premier grand ensemble local.Tantôt les bâtiments suivent le dessin de la courbe de niveau 600, devenue rue Le Corbusier, tantôt ils s’installent perpendi-culairement à la pente, reliés à la rue par des passerelles ou de grands escaliers. A l’implantation exemplaire des bâtiments répond une maîtrise raffinée du végétal d’accompagnement, décliné selon les modes habituels aux squares urbains, avec une virtuosité étonnante dus aux talents de l’ingénieur des Services techniques de la ville, Jean Marc, associé à l’équipe de concep-tion dès l’origine de l’opération.
Le vocabulaire de l’art des jardins s’adapte au grand ensemble : les espaces sont découpés à partir des courbes de niveau et des allées, et caractérisés par un système de haies et de contre-haies (haies étagées doubles ou triples) constituées de troènes com-muns ou dorés, prunus, berbéris et buffets de laurier, et sont plantés d arbres rythmés et colorés (érables négundo et acacias), ou parfois fastigiés (la gamme d’arbres est d’ailleurs peu riche), selon un dessin géométrique et des alternances de couleurs. Ces espaces verts ne sont réalisés qu’à partir de 1964, après avoir été longtemps laissés en prairies fauchées. Cet état de fait, dû au départ à l’étirement des financements des projets d’espaces exté-rieurs, s’inscrivait aussi dans la logique de conception de notre ingénieur, qui pensait « qu’il était nécessaire de laisser vivre un groupe d’habitations avant de planter » – afin de reprendre notamment les chemins tracés par l’usage.Cette réalisation révèle le décalage entre les réflexions et les savoir-faire architecturaux et paysagers et exprime quelques traits caractéristiques de la pratique paysagiste. Le festonnage des haies qui jalonne les espaces extérieurs rejoint celui des collines boca- gères surplombant les bâtiments. Il rappelle le site environnant et inspirera plus tard l’AUA et Alexandre Chemetoff pour la réhabilitation du quartier de Montreynaud.Relevons que, sans l’action concertée des services de la ville et de l’office d’HLM, qui finança entièrement la réalisation des espaces verts, rien n’aurait été fait à cette époque, compte tenu du désintérêt pour cet aspect du projet des principaux responsables du chantier. « D’ailleurs, à cette époque, les architectes ne jouaient pas au paysagiste… », queleques superbes videos du Ministere de la Cohésion et des Territoires içi : .Naissance d'une banlieue mort d'un village 2000 www.dailymotion.com/video/x1a98izRéalisateur : Sidney Jézéquel Production : Les Films Roger Leenhardt Sujet : la commune de Goussainville (95) -Quatre murs et un toit 1953 www.dailymotion.com/video/xk6xui Scenario et réalisation Pierre Jallaud MRU (ministère de la reconstruction et de l'urbanisme) ----------------Le Bonheur est dans le béton www.dailymotion.com/video/x413amo - 2015 Documentaire réalisé par Lorenz Findeisen produit par Les Films du Tambour de Soie ---------------------Beaulieu par son constructeur la Cimaise :" Entre les années 50 et 60, et suite à la seconde guerre mondiale, la municipalité stéphanoise a vu sa population passée d’un peu moins de 180 000 habitants en 1950 à plus de 200 000 habitants dix ans plus tard en 1960. Cette forte augmentation de la population pouvait s’expliquer par le fort taux de natalité de cette époque (baby-boom), mais aussi par l’afflux de travailleurs de la classe ouvrière venus dans la grande cité stéphanoise pour trouver un travail. De ce fait, la construction d’un logement sain pour chaque ouvrier était devenue une priorité absolue pour les élus qui considéraient à raison que cela était une condition vitale dans le cadre de ce grand développement. Pour ce faire, la ville a lancé dans les années 50 une vaste opération de construction de barres d’habitation dans la zone de Beaulieu, destinée à fournir un logement à une population grandissante.---- Bâtir mieux plus vite et moins cher 1975 l'industrialisation du bâtiment et ses innovations : la préfabrication en usine, le coffrage glissant... www.dailymotion.com/video/xyjudq ---BEAULIEU une barre d’habitation innovante - A l’époque, avec une majorité d’architectes, les appartements modernes construits possédaient des cloisons lourdes empêchant toute modification interne ainsi que des espaces de renvoi sombres et non ventilés ressemblant à des alcôves.Mais à l’inverse, pour certains architectes précurseurs de la région à l’image d’Yves et Henri Gouyon, la modernité reflétait le gout de la clarté, de l’air, et du soleil, avec de larges horizons. Ainsi, ces derniers donnaient la priorité non pas aux façades qu’ils considéraient comme de simples élévations du plan, mais aux cellules d’habitations et à leur orientation. Dans cette optique, le bâtiment proposé par Henri Gouyon, qui était donc un partisan de l’espace ouvert moderne, supprimait les circulations et profitait de ce gain de place pour aménager de nouveaux espaces de vie communes. De plus, dans ces cellules d’habitations, les architectes ont tirés profit au maximum de la double orientation des appartements (ces derniers étaient traversant) avec par exemple l’accolement de balcons. Conception et réalisation d’un quartier entier. Pour le projet de Beaulieu, l’on confia la conception ainsi que la réalisation des interventions aux agences Henri et Yves Gouyon puis Yves Gouyon et associés. Ainsi, dés le milieu des années 50, des études concernant Beaulieu II – La Marandinière furent conduites, suivis de la construction du bâtiment entre 1957 et 1959. S’en suivit Beaulieu III – Montchovet entre 1962 et 1964, surnommé la « Muraille de Chine la plus grande barre d'Europe avec 540 appartements à sa livraison mi 1964, les chantiers de l'OPAC devenu Métropole-Habitat, www.ina.fr/video/LY00001263522 », qui comprenait entre autres, une barre de type HLM haute de 10 à 17 mètres et longue de 270 mètres, avec 560 logements. Suites à ces constructions, l’urbanisation des vallées et collines du sud-est de Saint-Etienne continua jusque dans les années 70 avec les séries de la Métare I, II, et III. Au total, ce sont plus de 8 000 logements, pour l’essentiel de type HLM, qui ont été construits durant cette période. Ces constructions ont également contribué à la création du parc de l’Europe et d’un boulevard circulaire qui servait de jonction entre les différents édifices et le centre-ville de la cité stéphanoise.Un projet pharaoniqueLe centre commercial fut un projet d’une dimension sans précédent pour la ville, plus grand centre commercial intra-urbain de la région Loire-Auvergne, avec 100 magasins, 1500 places de stationnement, 90 000 m² de surface, et sur 3 niveaux (4 niveaux avec la terrasse). Le 2 octobre 1979, CENTRE DEUX ouvre ses portes pour la première fois, et constitue une renaissance et un véritable tournant pour la ville. L’avis de l’architecteDe toutes les constructions de cette époque, Beaulieu est un des ensembles construits qui se porte le mieux si l’on en croit les nombreuses enquêtes menées auprès de la population de ces logements, dont certains l’occupe pratiquement depuis le début. Les arbres atteignent désormais le haut des immeubles, et la rue Le Corbusier adjacente a pris les allures « d’une banlieue des années 30 » avec un niveau d’urbanisme parfaitement acceptable. En conclusion, on peut parler pour cette construction d’un véritable savoir faire architectural et en quelques sortes d’art urbain. Ce projet a été récompensé par un prix d’urbanisme, mettant en valeur le travail en amont du projet. www.cimaise-architectes.com/realisations/divers/construct... cité HLM labellisée Patrimoine du XXeme siecle -"Il faut bien le dire, avant même d’être livré, Beaulieu est l' un des grands-ensembles, parmis 6 autres qui fasçinait en 1954..En effet c'etait le début de la longue & grande histoire des chantiers de l'Office Public de l'Aménagement et de la Construction* içi, ou à Montreynaud, Solaure, Monthieu etc ( l'OPAC l'office public de logements sociaux, devenu plus tard Métropole-Habitat, est la plus importante au niveau National, c'est la plus grosse boite d'HLM). Bref, les habituels promeneurs du coin genre les "Bois du Four (la Metare, le nom ançien, qui par ailleurs appartenait a Mme de Métarie une veuve riche qui légua son domaine soit "la Métare" à la ville, pour un Franc symbolique à l'epoque et aux CHU anciennement les HCL Hospiçes Civils de la Ville comme à Lyon... (on notera qu il y a des tas de logements en centre ville propriété du CHU)..se rendant le dimanche dans le Pilat ou à Rochetaillée et sur les collines* alentours (on en a 7 comme a Rome) font un léger détour par le chantier. Ils constatent alors de visu cet avancement des travaux que la presse qualifie de « belle prouesse ». Le rythme est en effet rapide : « un étage par semaine » pour certaines barres, comme le raconte un témoin. Les « grandes maisons », soient les immeubles de hauteur et nombre de logements importants (IGH), étant alors encore rares dans la ville, les Stéphanois n’y sont pas habitués@ les H.L.M. Beaulieu est la 1ere cité Stéphanoise de toutes,. Les barres de dix-sept et quatorze niveaux gises respectivement rues Gomy Herriot et de Vlaminck, ainsi que la tour de 22 niveaux au 33 rue Le-Corbusier,surprennent donc encore pire pour la plus grande barre d'Europe qui arrvera 7 ans plus tard, la Muraille qui mettront certains certaines à la renverse , le gigantisme à l'état brut, du lourd.... La référence qui vient à l’esprit de beaucoup ajoute à la fascination : l’Amérique. « C’est New-York ! c'est tres joile, tres vert... », se rappelle avoir pensé un habitant de la première harre...Mais plus que les immeubles, ce sont surtout les logements qui emportent l’adhésion des « heureux locataires », comme aime à les appeler la presse tout court. La satisfaction procurée aux habitants par l’hygiène et le confort des logements des Grands-Ensembles soit les quartiers NEUF est une information connue, les études de sciences humaines sur le sujet abondent. Aussi, pour le cas de Beaulieu devenu un cas d'Ecole idem pour Montchovet (Beaulieu3) et les transformations de la Marandiniere (Beaulieu2)...Les entretiens réalisés avec des locataires n’apportent pas sur ce point-ci d’éléments nouveaux :les premiers motifs de satisfaction invoqués sont, comme pour bien d’autres Grands-Ensembles Français, l’eau courante, le chauffage central dont sont pourvus les immeubles les plus hauts, les WC intérieurs et salles de bain, l’ensoleillement et la luminosité permis par l’orientation, la hauteur et la disposition des immeubles, les placards et les tout aussi pratiques balcons à parois séchoirs permettant de faire sécher le linge, hiver compris. Entretien avec François Tomas, géographe, spécialiste de l'aménagement urbain, et enseignant à l'université et à l'école d'architecture de Saint-Etienne. Il est notamment l'auteur des Grands Ensembles, une histoire qui continue (Publications de l'université de Saint-Etienne, 2003). Cet intellectuel a également mis la main à la pâte. Entre 1977 et 1983, il fut adjoint à l'urbanisme du maire communiste de l'époque, Joseph Sanguedolce. Engagé au PC de 1974 à 1985, il a, depuis, rejoint le Parti socialiste «comme militant de base» L"apres guerre...Que prévoit-on pour la reconstruction? Pas grand-chose. A la différence de la refonte spectaculaire du Havre, par exemple, on se contente ici de bâtir de petits immeubles, plus modernes bien sûr, mais sans réelle innovation architecturale ou urbanistique. Est-il vrai que Saint-Etienne, après guerre, traîne une réputation de «capitale des taudis»?C'est exact, et celle-ci n'est pas usurpée. En 1946, 7% seulement des logements sont jugés «confortables», et 17%, «acceptables»; 56% sont médiocres, et 20% peuvent véritablement être qualifiés de taudis: 1 logement sur 5 n'a pas d'eau à l'évier, les deux tiers ne disposent pas de WC, et 95%, de salle d'eau. Mais le problème n'a pas été créé par la guerre. Depuis la fin du XIXe siècle, Saint-Etienne a beaucoup grandi, mais très peu construit. Résultat: la ville a vieilli sur elle-même et se trouve après guerre dans une situation désastreuse, que les bombardements ont simplement aggravée. C'est alors qu'Alexandre de Fraissinette, maire élu en 1947, fixe le logement comme l'une de ses priorités.
Oui. Et ce ne sera pas un vain mot. Rendez-vous compte: on passe de 114 logements construits en 1948 à 531 en 1951, 1 085 en 1954, 1 694 en 1957 et même 2 932 en 1959! L'effort est gigantesque. Mais le changement est aussi qualitatif. A la fin des années 1940 et au début des années 1950, la France va connaître une rupture architecturale avec l'apparition des premiers grands ensembles. Saint-Etienne sera l'une des villes symboles de cette rupture. Comment cette nouvelle architecture est-elle accueillie? Très favorablement par les classes moyennes, beaucoup moins par les classes populaires. Cela paraît paradoxal, pour du logement social!Le paradoxe n'est qu'apparent. On l'a oublié aujourd'hui, mais les premiers grands ensembles sont réservés aux familles de moins de trois enfants ayant des revenus corrects, autrement dit aux classes moyennes. Alors que, depuis la guerre, celles-ci devaient se contenter d'une ou de deux pièces mal équipées, elles se voient soudain proposer des logements spacieux, avec de la verdure, de la lumière, une salle d'eau, des WC, le chauffage central. Cela leur paraît merveilleux! Les pauvres, eux, continuent de s'entasser dans de petits appartements sans confort, quand ce ne sont pas des taudis, en particulier à Tarentaize et à Beaubrun, ou des bidonvilles, du côté de Méons, près des puits de mine et des usines sidérurgiques. Ce n'est que plus tard, à partir des années 1970, que les grands ensembles seront prioritairement réservés aux pauvres et aux familles immigrées. Mais, dans les années 1950, les grands ensembles sont encore synonymes de progrès social. Et même au-delà. On est persuadé que ce nouvel habitat va entraîner le recul de la maladie, de la délinquance, voire de la mésentente entre les époux! Il existe ainsi une «commission du bonheur ou des grands ensembles»! On croit rêver...C'était l'ambiance de l'époque, avec ses utopies et ses excès. Pour les architectes, si l'un des repo