El Salvador
(Scroll down for the english version)
Bon moment pour visiter l''El Salvador. Le gouvernement de Nayib Bukele ayant récemment envoyé en prison près de 63 000 hommes soupçonnés de gangsterisme, la tranquillité semble être maintenant de tous les côtés dans ce pays reconnu comme étant le plus violent d'Amérique latine. En mars, 62 homicides commis par les gangs de rue en une seule journée. Conséquence : la ligne dure ! On enferme à grands coups de fourgons. On vise les suspectés d'affiliation, les tatoués, les ci, les ça, sans appel ni procès. De l'extérieur de la frontière, on a crié au bafouement des droits humains, on a écrit des articles sur ces familles qui ont perdu un fils, un frère, un père, et qui ne peuvent savoir où il est : le gouvernement n'étant pas adepte de transparence dans ce dossier. On ne sait même pas si le cousin disparu est mort ou même dans quelle prison il se trouve.
On est entrés au pays avec cette situation en tête, cette crise, analysée sous l'oeil de nos pays.
Après quelques jours, on se rend compte que l'opinion générale, ici, n'a rien à voir avec celle véhiculée par la presse occidentale. Elle semble assez favorable à Bukele, très même. Le pays est enfin tranquille, qu'on nous dit. Une femme qui nous sert les meilleurs pupusas qu'on ait eu jusqu'à maintenant est catégorique : elle adore le gouvernement en place. “La paix enfin !” Qu'un autre nous confie, un peu penché par en avant, taisant peut-être son opinion devant les autres tablées de ce patio de comida d'Ahuachapán. “Il y a quelque temps, qu'il ajoute, j'aurais des réserves, mais aujourd'hui je vous dis que vous pouvez aller partout où vous le voulez, très sécuritaire.” Partout, ce sera cette même impression de délivrance, comme d'avoir retrouver son air après avoir passé trop de temps sous l'eau, de force. Même que des émigrés reviennent vivre dans les quartiers qui avaient été désertés.
Quand je lis nos journaux, je ne vois pas ce côté des choses. Je ne vois qu'une opinion composée par des étrangers au pays et forgée selon nos standards. Une fois à l'intérieur, c'est une toute autre histoire qui se présente. Je ne dis pas qu'il n'y a pas d'entorses aux droits humains et que la tactique du gouvernement est impeccable : elle est loin de l'être. Je dis seulement que le problème n'a pas qu'une seule facette.
Pour une fois depuis longtemps, l'El Salvador rêve de s'ouvrir plus au monde, d'attirer les touristes sur ses plages noires idéales pour le surf, prolongeant son projet de Surf City jusqu'au El Salvador Est. Les gens nous remercient de passer dans leur pays, littéralement. Ils en avaient marre d'être perçus comme de dangereux criminels. Et ce mois-ci, le gouvernement vient d'étendre le permis de tourisme de 90 à 180 jours. Ça en dit long.
Qu'est-ce qui est bien là-dedans ? Qu'est-ce qui est mal ? Y a de tout. Atteindre cette nouvelle qualité de vie pour la majorité aurait pris combien d'années à coups de lois et de projets ? Et combien de morts supplémentaires ?Toute cette nouvelle paix vaut-elle tous les innocents perdus dans le dédale carcéral ?
Sais pas.
Dans les pays voisins, l'effet Bukele se fait sentir. Au Costa Rica, Jeffrey, un résident du pays, me confie qu'il le tient en haute estime, qu'on devrait même imiter son intransigeance pour régler le fléau de la drogue : incarcérer sans procès tout ceux qui sont suspectés d'entretenir un lien direct ou indirect avec le marché. Je suis perplexe. Pour plusieurs raisons que je vous épargnerai. Reste que le Président salvadorien fait jaser et que la situation que vit présentement l'El Salvador montre que rien n'est jamais tout noir ni tout blanc.
......
Good time to visit El Salvador. With Nayib Bukele's government recently sending nearly 63,000 men suspected of gangsterism to prison, tranquility seems to be on all sides in this country known as the most violent in Latin America. In March, street gangs were responsible for 62 homicides in one day. Consequence: the hard line! They lock up loads of people. They target, the suspected affiliates, the tattooed, the anything suspicious, without appeal or trial. From outside the border, there have been cries of human rights violations, articles written about families who have lost a son, a brother, a father, and who cannot know where he is, as the government is not adept at transparency in this matter. We don't even know if the missing cousin is dead or even in which prison he is.
We entered the country with this situation in mind, this crisis, analyzed under the eyes of our countries.
After a few days, we realize that the general opinion here has nothing to do with the one conveyed by the Western press. It seems to be quite favorable to Bukele, very much so. The country is finally quiet, we are told. A woman who serves us the best pupusas we've had so far is adamant: she loves the current government. "Peace at last!" That another confides to us, a little leaning by forward, perhaps silencing his opinion in front of the other tables of this comida patio of Ahuachapán. “Some time ago, he adds, I would have reservations, but today I tell you that you can go anywhere you want, very safe.” Everywhere, it will be the same impression of deliverance, as to have found its air after having spent too much time under water, of force. Even that emigrants are coming back to live in the neighborhoods that had been deserted.
When I read our newspapers, I don't see this side of things. I only see an opinion composed by foreigners in the country and forged according to our standards. Once inside, it's a different story. I am not saying that there are no human rights abuses and that the government's tactics are flawless: they are far from it. I am only saying that the problem is not one-sided.
For once in a long time, El Salvador is dreaming of opening up more to the world, attracting tourists to its black beaches ideal for surfing, extending its Surf City project to eastern El Salvador. People thank us for coming to their country, literally. They were tired of being seen as dangerous criminals. And this month, the government just extended the tourist permit from 90 to 180 days. It speaks for itself.
What's good about it? What's wrong with it? It's got everything. How many more years of laws and projects would it take to achieve this new quality of life? And how many more deaths? Is all this new peace worth all the innocent people lost in the prison maze?
I don't know.
In neighboring countries, the Bukele effect is being felt. In Costa Rica, Jeffrey, a resident of the country, tells me that he holds him in high esteem, that we should even imitate his intransigence in dealing with the drug scourge: incarcerate without trial all those suspected of having a direct or indirect link with the market. I am puzzled. For several reasons that I will spare you. The fact remains that the Salvadoran President is the talk of the town and that the situation that El Salvador is currently experiencing shows that nothing is ever all black or white.
El Salvador
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Bon moment pour visiter l''El Salvador. Le gouvernement de Nayib Bukele ayant récemment envoyé en prison près de 63 000 hommes soupçonnés de gangsterisme, la tranquillité semble être maintenant de tous les côtés dans ce pays reconnu comme étant le plus violent d'Amérique latine. En mars, 62 homicides commis par les gangs de rue en une seule journée. Conséquence : la ligne dure ! On enferme à grands coups de fourgons. On vise les suspectés d'affiliation, les tatoués, les ci, les ça, sans appel ni procès. De l'extérieur de la frontière, on a crié au bafouement des droits humains, on a écrit des articles sur ces familles qui ont perdu un fils, un frère, un père, et qui ne peuvent savoir où il est : le gouvernement n'étant pas adepte de transparence dans ce dossier. On ne sait même pas si le cousin disparu est mort ou même dans quelle prison il se trouve.
On est entrés au pays avec cette situation en tête, cette crise, analysée sous l'oeil de nos pays.
Après quelques jours, on se rend compte que l'opinion générale, ici, n'a rien à voir avec celle véhiculée par la presse occidentale. Elle semble assez favorable à Bukele, très même. Le pays est enfin tranquille, qu'on nous dit. Une femme qui nous sert les meilleurs pupusas qu'on ait eu jusqu'à maintenant est catégorique : elle adore le gouvernement en place. “La paix enfin !” Qu'un autre nous confie, un peu penché par en avant, taisant peut-être son opinion devant les autres tablées de ce patio de comida d'Ahuachapán. “Il y a quelque temps, qu'il ajoute, j'aurais des réserves, mais aujourd'hui je vous dis que vous pouvez aller partout où vous le voulez, très sécuritaire.” Partout, ce sera cette même impression de délivrance, comme d'avoir retrouver son air après avoir passé trop de temps sous l'eau, de force. Même que des émigrés reviennent vivre dans les quartiers qui avaient été désertés.
Quand je lis nos journaux, je ne vois pas ce côté des choses. Je ne vois qu'une opinion composée par des étrangers au pays et forgée selon nos standards. Une fois à l'intérieur, c'est une toute autre histoire qui se présente. Je ne dis pas qu'il n'y a pas d'entorses aux droits humains et que la tactique du gouvernement est impeccable : elle est loin de l'être. Je dis seulement que le problème n'a pas qu'une seule facette.
Pour une fois depuis longtemps, l'El Salvador rêve de s'ouvrir plus au monde, d'attirer les touristes sur ses plages noires idéales pour le surf, prolongeant son projet de Surf City jusqu'au El Salvador Est. Les gens nous remercient de passer dans leur pays, littéralement. Ils en avaient marre d'être perçus comme de dangereux criminels. Et ce mois-ci, le gouvernement vient d'étendre le permis de tourisme de 90 à 180 jours. Ça en dit long.
Qu'est-ce qui est bien là-dedans ? Qu'est-ce qui est mal ? Y a de tout. Atteindre cette nouvelle qualité de vie pour la majorité aurait pris combien d'années à coups de lois et de projets ? Et combien de morts supplémentaires ?Toute cette nouvelle paix vaut-elle tous les innocents perdus dans le dédale carcéral ?
Sais pas.
Dans les pays voisins, l'effet Bukele se fait sentir. Au Costa Rica, Jeffrey, un résident du pays, me confie qu'il le tient en haute estime, qu'on devrait même imiter son intransigeance pour régler le fléau de la drogue : incarcérer sans procès tout ceux qui sont suspectés d'entretenir un lien direct ou indirect avec le marché. Je suis perplexe. Pour plusieurs raisons que je vous épargnerai. Reste que le Président salvadorien fait jaser et que la situation que vit présentement l'El Salvador montre que rien n'est jamais tout noir ni tout blanc.
......
Good time to visit El Salvador. With Nayib Bukele's government recently sending nearly 63,000 men suspected of gangsterism to prison, tranquility seems to be on all sides in this country known as the most violent in Latin America. In March, street gangs were responsible for 62 homicides in one day. Consequence: the hard line! They lock up loads of people. They target, the suspected affiliates, the tattooed, the anything suspicious, without appeal or trial. From outside the border, there have been cries of human rights violations, articles written about families who have lost a son, a brother, a father, and who cannot know where he is, as the government is not adept at transparency in this matter. We don't even know if the missing cousin is dead or even in which prison he is.
We entered the country with this situation in mind, this crisis, analyzed under the eyes of our countries.
After a few days, we realize that the general opinion here has nothing to do with the one conveyed by the Western press. It seems to be quite favorable to Bukele, very much so. The country is finally quiet, we are told. A woman who serves us the best pupusas we've had so far is adamant: she loves the current government. "Peace at last!" That another confides to us, a little leaning by forward, perhaps silencing his opinion in front of the other tables of this comida patio of Ahuachapán. “Some time ago, he adds, I would have reservations, but today I tell you that you can go anywhere you want, very safe.” Everywhere, it will be the same impression of deliverance, as to have found its air after having spent too much time under water, of force. Even that emigrants are coming back to live in the neighborhoods that had been deserted.
When I read our newspapers, I don't see this side of things. I only see an opinion composed by foreigners in the country and forged according to our standards. Once inside, it's a different story. I am not saying that there are no human rights abuses and that the government's tactics are flawless: they are far from it. I am only saying that the problem is not one-sided.
For once in a long time, El Salvador is dreaming of opening up more to the world, attracting tourists to its black beaches ideal for surfing, extending its Surf City project to eastern El Salvador. People thank us for coming to their country, literally. They were tired of being seen as dangerous criminals. And this month, the government just extended the tourist permit from 90 to 180 days. It speaks for itself.
What's good about it? What's wrong with it? It's got everything. How many more years of laws and projects would it take to achieve this new quality of life? And how many more deaths? Is all this new peace worth all the innocent people lost in the prison maze?
I don't know.
In neighboring countries, the Bukele effect is being felt. In Costa Rica, Jeffrey, a resident of the country, tells me that he holds him in high esteem, that we should even imitate his intransigence in dealing with the drug scourge: incarcerate without trial all those suspected of having a direct or indirect link with the market. I am puzzled. For several reasons that I will spare you. The fact remains that the Salvadoran President is the talk of the town and that the situation that El Salvador is currently experiencing shows that nothing is ever all black or white.